AUGUSTE RENOIR
1881 -
Vue traditionnelle d'une allée de palmiers de hauteurs différentes avec des personnages
se promenant dans le lointain
Ce luxuriant jardin tropical, planté par le gouvernement
colonial, comme lieu de délassement, était un endroit très connu à Alger
Les frondes
des palmiers ressemblent à des feux d'artifice, ce sont des gerbes de couleur jaillissant
d'un même centre
Des verts et des bruns contre un capiteux ciel bleu
Sol rendu en touches
de tons bleus et violets
Renoir a traîné son pinceau chargé de couleur sur la toile
pour produire des touches allongées
La complexité de la structure des frondes des
palmiers nous donne l'impression de nous trouver au coeur de cette luxuriance
1881 -
Renoir disait à ses amis qu'il avait peint cette baigneuse sur un bateau, dans la
baie de Naples, en plein soleil
Renoir a voyagé en Italie durant l'automne et l'hiver
de 1881
Le modèle est Aline Charigot qui a commencé à poser pour Renoir en 1880 et
qui a 22 ans lorsqu'elle pose pour ce tableau
Renoir avait été impressionné par les
fresques de Raphaël à la Farnésine à Rome
Le modèle se détache nettement du fond
Le
modelé de la figure est toujours obtenu au moyen de la couleur
Blancheur éblouissante
des chairs éclairées par le soleil, nettes de formes et de contours
Présence physique
puissante
Les contours ne sont ni durs ni linéaires mais les formes sont clairement
délimitées par leur contraste avec les tons plus froids et plus sombres sur lesquels
elles se détachent
La femme, tournée sur le côté, regarde au-
La diagonale formée par son bras droit donne
à la figure une forme pyramidale simple qui confère à l'ensemble un aspect monumental
Les
fresques de Raphaël ont contribué à l'évolution de Renoir vers une conception plus
classique de l'art fondée sur la primauté de la forme humaine libérée de la contingence
des détails
Renoir et Aline ont dit qu'ils avaient visité l'Italie après leur mariage
car ils avaient caché à leur famille qu'ils ne s'étaient mariés qu'en 1890
1881 -
Sachant que de tels tableaux se vendraient bien Renoir s'est appliqué à peindre les
sites les plus familiers de Venise
Le campanile à droite n'est que sommairement mentionné
La
place est remplie de pigeons et de flâneurs sur la gauche, chacun étant représenté
par une petite touche de peinture
Renoir concentre son attention sur la basilique
: les niches profondes des portails, les arcades et les colonnes qui créent un effet
de recul dans l'espace, les dômes et les coupoles prédominent
Façade mouchetée de
rouge et de bleu
En 1881 Renoir se passionnait pour la réflexion sur les questions
d'architecture, particulièrement pour la comparaison de l'architecture moderne mécanique
avec les oeuvres anciennes, médiévales, dotées de beaucoup plus de caractère
En 1880
Saint Marc était couverte d'échafaudages car il avait été décidé de restaurer la
façade ouest. Ruskin déclencha une controverse internationale qui aboutit à l'annulation
de la restauration. Quand Renoir arriva à Venise les échafaudages avaient disparu.
C'était la preuve que le militantisme architectural pouvait produire des résultats.
Renoir quatre ans plus tôt, avait milité pour sauver Paris des dangers de la modernisation
La
place Saint Marc est une esquisse qui exprime le caractère de la basilique
Renoir
défendait le principe de "l'irrégularité dans la régularité"
Il écrivit à propos de
la basilique "Régulier dans son ensemble; pas un détail pareil"
"A Saint Marc et dès
l'entrée on sent qu'on est dans un vrai temple; cet air doux et tamisé et ces magnifique
mosaïques ... !
Impossible de soupçonner lorsqu'on n'est pas entré dans Saint Marc,
combien c'est beau, les piliers lourds, les colonnes sans moulures"
Avec ses coupoles
gonflées comme des bulles la basilique semble vouloir s'élever dans les airs telle
une apparition
L'horizon très haut permet au dallage mouillé de la place de refléter
les tons du ciel et de l'architecture
La touche de Renoir retrouve ici toute sa fluidité
impressionniste
1881 -
Le principal objet du voyage en Italie de 1881-
Il fit étape à Venise, fin
octobre début novembre 1881
Il peint des sites maintes fois représentés mais personne
avant lui n'avait peint le Palais des Doges depuis San Giorgio
La forme des bâtiments
est suggérée par des touches de couleur plus que par des contours linéaires
Les façades
éclairées par le soleil sont définies par des nuances crème, jaune et orange
Ces couleurs
sont reflétées dans l'eau avec des touches de vert
Les tons sombres des façades à
l'ombre aident à structurer la composition
Les reflets dans l'eau ne sont indiqués
que de façon approximative (le reflet du campanile est plus large que la tour)
Mais
les arcades du Palais des Doges sont peintes avec minutie
1881 -
Durand-
Les grands
maîtres de la veduta peignait chaque bâtiment avec précision afin que les spectateurs
puissent les identifier
Renoir est plus intéressé par l'effet général du soleil chatoyant
sur l'eau et se réfléchissant sur les façades de pierre richement texturées
Ciel bleuté
teinté de nuages fuyants
Eau bleue mouchetée de reflets scintillants
C'est la vue du
Canal depuis le palais Foscari jusqu'au Rialto
Scène animée par les gondoles à coque
noire et par les pieux d'amarrage rayés qui sortent de l'eau
Renoir n'utilise pas
de peinture noire pour les gondoles mais des violets et des bleus profonds qui évoquent
le jeu de la lumière réfléchie à la surface de l'eau
1881 -
Dans cette vue du Grand Canal, Renoir joue habilement sur les effets chromatiques
entre ciel et eau dans la brume de la lagune
Il anticipe sur l'allure fantasmagorique
de la Venise que peindra Monet en 1908
1882 -
Renoir a peint le portrait des enfants de Paul Durand-
Par le retour
à la hiérarchie des plans, où le personnage central occupe toujours une place prépondérante,
par ses couleurs vives, par la concentration avec laquelle il représente ses modèles,
Renoir cherche à fusionner une vision impressionniste avec la structure et la solidité
qu'il perçoit dans l'art du passé
Cette évolution dans son style n'enchante pas Durand-
Pour Durand-
Durand-
Durand-
Marie-
Ses longs cheveux tombent en tresses sur son épaule et aux touches
de brun, de noir et de rouge on pourrait croire que sa robe bleue est garnie d'un
col de fourrure
Les travaux d'aiguille sont une occupation féminine par excellence
au 19ème siècle
Freud estimait que les jeunes femmes qui brodent étaient sujettes
à état hypnoïde provoqué par une rêverie constante
Mais ici Marie-
1882 -
Renoir a séjourné à l'Estaque à son retour d'Italie pendant l'hiver 1882. Une lettre
du 23 janvier 1882 précise qu'il a rencontré Paul Cézanne et qu'ils ont l'intention
de travailler ensemble
Cézanne s'intéresse à la structure visuelle inspirée par des
formes géométriques et Renoir à l'impact visuel de la toile achevée
Large gamme de
tonalités mais les couleurs vives des tableaux d'Algérie ou de Venise ont disparu
Il
supprime presque tous les rouges au profit d'une palette discrète de bleus, de verts
et de bruns
Le ciel d'un bleu limpide ne garde rien de la mouvance des paysages des
environs de Paris ou de la côte normande
La géométrie de la composition a été étouffée
par les couleurs
Renoir à l'Estaque est tombé malade d'une pneumonie et a été soigné
par Cézanne
Il écrit "C'est certainement le plus beau pays du monde et pas encore
habité ... J'ai ici la campagne, la vraie, à ma porte"
Les rehauts de lumière sur
les rochers qui se découpent sur le ciel bleu et plat donnent une structure claire
à la composition avec les sommets vus de front
La couleur est nuancée et la facture
est moelleuse et variée
Différents verts des feuillages
Les bleus servent à suggérer
les ombres portées
Taches rouge orange sur les lumières du terrain
Sur la pente herbeuse
à gauche et sur l'arbre au-
1883 -
"La danse à Bougival" crée une atmosphère plus qu'elle ne raconte une anecdote
La
jeune femme semble se détourner momentanément des galanteries de son cavalier mais
nous ne savons rien de plus de leurs relations
Les allumettes et le bouquet au sol
ajoutent une note de négligé à l'ensemble de la toile
Ce tableau rappelle "Le moulin
de la galette"
Les formes principales comme le visage de la femme sont nettement définies
mais les figures secondaires sont plus floues
Des rappels de couleurs relient les
figures du premier plan à celles du fond : le rouge du chapeau de la danseuse et
des rubans, l'or de la ceinture et la boisson dans les verres
La couleur modèle les
formes à l'intérieur de contours nettement dessinés
Les touches en diagonales des
arbres du fon reflètent la t"ouche constructive" de Cézanne
Le modèle est Marie-
En
décembre 1883 elle donnera le jour à Maurice Utrillo
Le cavalier est Paul Lhote
Renoir
célèbre la joie de vivre de son époque avec les gens qu'il aimait et dont il partageait
les joies simples
Chez Renoir c'est souvent le personnage féminin qui assure l'identité
la plus précise
Visage encadré avec séduction par la capote rouge et la frange brune
La
masse pesante du corps du cavalier n'est là que pour faire valoir la souplesse de
celui de la jeune femme, dont le liséré rouge sur la robe répète le rythme de la
danse
Couleur concentrée en contrastes de rouge, de jaune, de rose blanc et de bleu
Couleurs
plus fluides du reste du tableau
Une foule joyeuse suggérée avec économie suffit à
créer une atmosphère de plein air
Le bavardage, la musique et le tintement des verres
représentent des sons distants
Pose tendre et passionnée du couple
Par sa gestuelle
l'homme exprime ses intentions
L'acquiescement réservé de sa compagne complète l'harmonie
sensuelle
Elle valse "délicieusement abandonnée" dans les bras de son cavalier
La robe
rose est peinte à gros traits de couleurs primaires mêlées sur la toile même
Le costume
de son partenaire est un déploiement de bleus soigneusement dégradés
Renoir, fils
d'un tailleur, laisse apparaître la doublure des manches dont le blanc tranche sur
les tons rosés des mains
Le mouvement des danseurs est rendu par le flou des éléments
de l'arrière-
Paul Auguste Lhote est le meilleur ami de Renoir à l'époque. Il
a 32 ans, a servi dans les zouaves en Afrique du Nord et travaillé dans la marine
marchande avant d'accepter un emploi de bureau à l'agence télégraphique Havas, ancêtre
de l'Agence France Presse. Il a voyagé avec Renoir en Algérie et en Italie. Il sera
témoin du mariage de Renoir avec Alice Charigot en avril 1890
Il regarde sa partenaire
avec attention car il adore faire la cour aux femmes mais il est aussi "myope comme
une taupe"
Suzanne Valadon (1865-
Elle devint modèle suite à une blessure au dos, tout en se disant
couturière comme la future épouse de Renoir
Elle dira que Renoir avait la passion
des chapeaux "Il m'emmenait chez les modistes"
Bougival est à 18 km à l'ouest de Paris
et à quelques minutes de marche de La Grenouillère
Tourgueniev et Berthe Morisot y
ont acheté des villas
Les cheveux de Suzanne sont "coupés à la chien" avec une longue
frange sur le front, coiffure apparue en 1883
Mais les bals ne sont plus l'amusement
de bon aloi qu'ils étaient. La culture populaire s'est commercialisée
1883 -
Indifférence banale du couple de la ville réuni seulement pour accomplir un rite
social, puis aller bientôt chacun de son côté
Le modèle est Suzanne Valadon, 17 ans,
qui danse avec Paul Lhote
Simplicité des structures et clarté des contours des figures;
c'est le reflet des leçons qu'il a tirées de son voyage en Italie
Les plis de la robe
sont modelés par des bleus
Ce tableau a été conçu pour former une paire avec "Danse
à la campagne"
La jeune fille qui danse est inconsciente de notre existence. Nous
ne pouvons qu'admirer son profil et le tombant de la robe du soir
Artificiel arrière-
1883 -
Ce tableau forme une paire avec "Danse à la ville"
Une passion impulsive a poussé
le couple à danser avant la fin du repas
Nous éprouvons une complicité active avec
la jeune fille qui nous regarde en souriant
Le danseur est Paul Lhote, l'ami de Renoir
La
danseuse aux formes déjà volumineuses est Aline Charigot
En arrière-
1883 -
En décembre 1883 Renoir et Monet firent un voyage sur la côte de la Méditerranée
entre Marseille et Gênes
Renoir écrivit "Que de jolis paysages avec des horizons éloignés
et des couleurs les plus belles..."
Composition ordonnée assez conventionnelle
Les
arbres fournissent des axes structuraux vigoureux et créent une progression sans
heurts dans l'espace
Facture variée, petites taches ou touches largement peintes,
qui anime toute la surface en créant un mouvement onduleux qui parcourt l'herbe,
les troncs et les feuillages
Une série d'oranges et de rouges court à travers la toile,
depuis les troncs du premier plan jusqu'au littoral lointain
Les bleus de la mer et
du ciel sont repris dans les ombres du premier plan
Les jaunes et les verts captent
les effets des herbes et des feuillages sous le soleil méditerranéen
Paysage d'arbres
tortueux et de taillis battus par les vents
Ailleurs la nature a peut-
1883 -
ROBERT NUNES
En août 1883 Renoir se rend à Yport sur la côte normande pour exécuter
les portraits des enfants d'Alfred Nunes, maire de la ville
Le 21 août il écrit à
un ami qu'il est "occupé des moutards qui me font enrager"
Lui qui a la réputation
de s'attarder à table se plaint de la vie mondaine de ses amis "car chez eux on reste
toute la journée à table"
Robert Nunes a 10 ans
Fièrement campé dans son costume de
marin bleu vif, la main sur la hanche tel un jeune prince hautain, le garçon dévisage
le spectateur avec un aplomb surprenant pour son âge
Robert tourne le dos à la mer
Les
falaises luisent dans le soleil
Robert se détache sur un fond de mer et de marécage
Le
visage et peint dans un style détaillé et descriptif
Renoir suggère les jeux de lumière
sur l'eau, les marais et les lointaines falaises lumineuses
Le pompon rouge est repris
par des accents de même teinte sur le sol
Des notes jaune vif dans l'eau et sur les
falaises reprennent l'ancre finement brodée sur la manche
Après son voyage en Italie
Renoir cherche à donner une apparence sculpturale à ses sujets en accentuant le décalage
entre les styles employés pour le premier plan et pour le fond
Renoir crée un contraste
entre le premier et l'arrière plan qui capte notre attention
1883 -
Ce tableau fut peint en extérieur à Guernesey
Il illustre la volonté de Renoir de
mieux organiser sa toile en distinguant nettement le premier et le second plan
Caractère
peu descriptif du fluide paysage du fond
Grande qualité chromatique des verts, des
oranges, des bruns et des bleus
La petite femme est Aline Charigot qui deviendra la
femme de Renoir
Il émane d'elle à la fois de la délicatesse et de la solidité
Aline
a le visage jeune, doux, plein de santé qui respire l'innocence
1883 -
Début septembre 1883 Renoir part pour Jersey avec sa compagne Aline Charigot et leur
ami Paul Lhote et de là ils se rendent à Guernesey pour "voir le rocher sur lequel
a gémi pendant dix-
Il écrit "On se croirait beaucoup plus
dans un paysage de Watteau que dans la réalité"
Il aime la beauté sauvage du site
et les joies de la mer dans une ambiance décontractée
La facture tourbillonnante évoque
le déferlement des vagues sur les rochers
Des jeunes filles en chapeau de paille bavardent
En
travaillant sur le motif Renoir a saisi les personnages dans l'animation des jeux
de lumière
C'est une oeuvre fondamentalement impressionniste
1884 -
A son retour d'Italie Renoir tourne son regard vers une nouvelle discipline de dessin
dans la tradition des grands italiens
Le modelé ferme et le graphisme méticuleux du
visage lisse, rebondi et solide comme une pomme à la peau tendue expriment ce nouveau
regard
Nous retrouverons la main droite tenant la chevelure
Le bras gauche ne semble
être qu'une ébauche
Les tons dorés du chapeau font contraste avec les tons bleus du
fond
1884 -
Renoir rivalise avec les plus grands peintres classiques
Sobriété presque géométrique
des contours
Volumes denses et contenus
Forme massive et compacte
Mais Renoir reste
un coloriste et c'est par des gradations subtiles de teintes chaudes et froides qu'il
donne l'impression de rondeur et d'une ample lumière
Opposition des jaunes satinés
et des bleus intenses
Les tons dorés du chapeau de paille donnent de l'éclat par leur
contraste avec les bleus du fond
Riches bruns chauds de la chevelure soyeuse cascadant
par dessus les épaules pour définir la pyramide de la silhouette
Lignes finies dans
le traitement de la robe
1884 -
Renoir reçut moqueries et quolibets pour ce chef d'oeuvre de la période aigre
On trouve
dans ce tableau :
Dessin raffiné, la ligne est d'une grande pureté
L'éclairage est plat mais Renoir
obtient cependant grâce aux teintes délicates une rondeur voluptueuse des corps
Renoir
attachait une grande importance à son tableau "Je vais tomber Raphaël" disait-
Il a été inspiré par un bas-
Son nouveau
style est ressenti comme une sorte de trahison à la cause impressionniste
Pissarro
écrit "Il a voulu ne s'occuper que de la ligne"
Pendant trois ans Renoir a réalisé
un travail graphique considérable pour préparer cette toile de 1.15 sur 1.70 m
Les
dessins furent reportés au moyen de calques pour permettre d'ultimes corrections
sur la toile
La toile bénéficia de soins particuliers : une couche de céruse traitée
au couteau à palette constitua un enduit très uni, favorable à la précision du trait
La
gamme chromatique évita les couleurs trop riches. Elles furent employées en couches
légères, lisses, sans le moindre empâtement, comme sur une porcelaine
Renoir ne se
servit pas du pinceau seulement pour déposer les tons mais encore pour dessiner,
pour calligraphier les lignes
L'action est un duel entre celle qui lance de l'eau
et celle qui se renverse pour se soustraire aux éclaboussures tandis que la troisième,
à l'abri car un peu plus haut, regarde en souriant cette lutte joyeuse
1884 -
Ce tableau représente l'intérieur de la maison de campagne de Bérard à Wargemont
près de Dieppe
Ses trois filles : Marthe, 14 ans assise à droite; Marguerite, 10 ans
assise à gauche; Lucie, 4 ans debout
Tableau de 1.27 * 1.73 monumental par sa forme
et paisible par son atmosphère, sans allusion à l'espièglerie des enfants
Ce tableau
rivalise avec le portrait de Madame Charpentier et ses enfants mais ici :
Composition équilibrée grâce aux figures établies de chaque côté
Les têtes s'inscrivent
dans le système de lignes créé par les meubles, les fenêtres et les panneaux du mur
Le
contraste des couleurs prédomine
Moitié gauche froide et bleue aux formes dépouillées,
scandée par des rayures et ponctuée seulement par le visage et les cheveux dorés
de Marguerite
Côté droit fait de tons chauds rehaussés seulement par quelques accents
bleus tranchés
Abandon du clair obscur
L'éclairage clair et diffus ne donne lieu qu'à
peu de modelé coloré
Tonalité d'ensemble claire et uniforme
Accents bleus foncés des
chaussures et de la coupe de fleurs
Les formes se détachent nettement les unes des
autres surtout dans le profil de Marthe qui se découpe sur les fleurs
La touche opaque
définit discrètement les formes sans donner de l'animation à la surface picturale
Seulement
mouvement diagonal des touches dans la partie d'herbe vue à travers la fenêtre
Les
visages stylisés des deux fillettes de droite ressemblent à celui de la poupée
En
peignant des visages simplifiés Renoir s'éloignait de l'individuel pour aller vers
le type
Renoir peignit peu de portraits entre 1885 et 1890
La précision de toutes les
parties et la blondeur de l'ensemble du tableau paraissent proches des fresques italiennes
du 15ème siècle
Ont aussi pu jouer un rôle le souvenir diffus des peintures murales
de Pompeï et les deux fresques de Boticelli acquises par le Louvre en 1882
Un critique
a parlé d'une "lumière qui n'éblouit pas, qui n'échauffe pas, qui n'abat pas, qui
permet de se passer de l'ombre"
La hiérarchie traditionnelle entre sujet et décor
a disparu : Renoir traite le profil de Marthe sans plus d'emphase que la jardinière
de porcelaine ou les rideaux fleuris
Chaque élément a le même poids, les accessoires
comme les figures
1885 -
Tableau troublant en raison de la contradiction qui existe entre les deux moitiés
tant pour la facture et la couleur que pour la mode féminine
Quatre ans se sont écoulés
entre l'exécution du groupe de droite (l'enfant au cerceau et la femme derrière lui)
et celle du reste du tableau
Les parapluies et le fond appartiennent à la seconde
phase de l'exécution ainsi que le couple de gauche
Les figures de droite sont traitées
par touches délicates et duveteuse. Les traits ne sont pas modelés clairement ou
cernés avec netteté et leurs couleurs sont vives et variées
Les figures de gauche
sont peintes plus sèchement. Leurs formes offrent une silhouette plus nette et leurs
traits comme leurs yeux sont dessinés avec plus de précision. La couleur est plus
terne
Dans la robe de la femme la couleur est traitée par morceaux relativement distincts
qui en suivent le modelé et les plis
La partie de droite plus ancienne montre la technique
délicate et souple que Renoir a utilisé de 1875 à 1881
Dans l'ensemble la tonalité
des parapluies est froide
Les toilettes féminines permettent de dater cette toile.
Les figures de droite portent des vêtements coûteux à la mode en 1881
A gauche la
robe de la femme, plus sévère de ligne, n'a été à la mode qu'en 1885
Après 1885 Renoir
n'a plus peint de compositions monumentales inspirées par la vie moderne
1885 -
Portrait peint en mars 1885 après la naissance de Pierre leur premier fils
La vue
frontale accentue les formes robuste d'Aline. Les courbes simples de ses joues et
de sa mâchoire se répètent dans les épaules et les bras
Elle est présentée comme une
fille de la campagne au lieu d'être vêtue avec élégance comme dans le Déjeuner des
Canotiers
A l'automne 1885 Renoir s'est rendu pour la première fois à Essoyes, village
du sud de la Champagne où Aline était née et où elle se sentait chez elle
Des bleus
et des jaunes clairs dominent la composition qui est affermie par le bleu foncé des
yeux et de la jupe et par les jaunes et les bleus foncés du chapeau et des cheveux
Les
chaudes nuances de la chair ainsi que la rose du chapeau fournissent une note colorée
Dans
le fond les bleus dominent les jaunes; dans la jaquette ce sont les jaunes qui dominent
les bleus mais les couleurs restent distinctes
Les bleus de la jaquette en suggèrent
le modelé par touches groupées à peu près parallèles
Les contours sont nets mais soulignés
d'un trait seulement là où il est nécessaire de séparer deux zones de couleur très
semblable; autrement les formes sont surtout suggérées par des variations de couleurs
Renoir
a épousé Aline Charigot en 1890. Il a conservé ce portrait jusqu'à sa mort
Aline,
fille de boulanger, est née le 23 mai 1859 (18 ans de moins que Renoir) à Essoyes,
village de moins de 1.500 habitants en Champagne
En 1865 son père Claude abandonne
sa femme et sa fille pour aller vivre aux Etats Unis où il deviendra cultivateur
Aline
et sa mère Thérèse s'établissent à Paris
Aline apprend le métier de sa mère qui était
couturière
Aline commence à poser pour Renoir dans le Déjeuner des Canotiers
Devenue
sa maîtresse elle l'accompagne à Naples et à Capri à la fin de 1881, voyage dont
elle parlera toujours comme de son "voyage de noces"
Elle pose en resplendissante
"Baigneuse blonde" et est la partenaire de Lhote dans "Danse à la campagne"
Ici, traitement
délicat du visage et du cou, conférant à ce dernier une texture de porcelaine
Ce portrait,
légèrement décentré, cheveux ébouriffés, rend discrètement hommage aux irrégularistes
dont les principes ont occupé Renoir qui écrivit "Les yeux du plus beau visage seront
toujours légèrement dissemblables, aucun nez ne se trouve exactement placé au-
Aline qu'il épousera le 14 avril 1890 apparaît comme une campagnarde
rayonnante de santé, vêtue simplement, les joues rougies par l'air frais
Julie Manet
admirera la simplicité et la bonne humeur de cette femme "franchement grosse et paysanne"
Elle
mourra le 27 juin 1915 à l'âge de 56 ans
1885 -
Dessin de ce nu incisif et contours cernés
Cette oeuvre marque le rejet par Renoir
de la technologie impressionniste qui noyait les figures dans l'atmosphère ambiante
Contours
non définis par une ligne mais nettement différenciés du fond par les contrastes
de des couleurs et la matière de la peinture
Seulement autour des fesses et du ventre
une ligne délicate bleue pour les délimiter
Fortement éclairée de front la peau du
modèle offre des plans simples peints en aplats denses avec seulement de faibles
modulations suggérant le jeu de la lumière sur la forme
Les couleurs du paysage sont
plus riches mais la simplicité du coloris du modèle, avec ses cheveux bruns tombant
sur la peau claire, l'isole des nuances kaléidoscopiques qui l'environnent
L'éclairage
très généralisé de la figure et l'illisibilité de l'espace suggèrent que ce tableau
a été composé en atelier
A cette époque Renoir était fasciné par la ligne nettement
dessinée et par l'oeuvre d'Ingres
La tonalité claire, assez crayeuse du tableau évoque
l'intérêt que Renoir portait aux effets propres à la fresque
On peut aussi comparer
ce tableau à une peinture sur porcelaine
1886 -
Pierre, le premier fils de Renoir, naquit en mars 1885. Au cours de l'été Renoir
commença à peindre Aline allaitant son bébé
Cette composition baigne familiarité et
éternité
Le geste du bébé tenant son pied lui donne un air de spontanéité
Mais la simplicité
de la structure pyramidale est monumentale
Les traits d'Aline ont été simplifiés et
ont pris un caractère général et elle est présentée comme un type
Elle est montrée
en vêtements campagnards, placée devant un arrière-
Elle est
la figure de la maternité campagnarde
Renoir admirait la "Vierge à la chaise" de Raphaël
au Palais Pitti à Florence "la peinture la plus libre, la plus solide, la plus merveilleusement
simple et vivante qu'il soit possible d'imaginer, des bras, des jambes avec de la
chair vraie et quelle touchante expression de tendresse maternelle"
Sur le fond lisse
et blanc de la toile une grande partie du fond est brossée librement avec une matière
diluée qui permet au fond blanc de prêter sa luminosité aux nuances multicolores
de l'herbe, de l'arbre, de la maison et des autres arbres lointains
A l'inverse les
formes principales peintes dans une matière opaque sont clairement définies
Les bords
de la chaise sont soigneusement tracés avec un pinceau fin
Les contours du groupe
entier sont nettement établis par le contraste avec le fond
La chair est traitée de
manière uniforme avec des nuances de couleur délicates pour suggérer le modelé
Des
touches précises indiquent les plis des vêtements d'Aline
De doux rouges orangés suggèrent
le modelé de sa jupe bleue
Les couleurs dominantes du chapeau, de la jaquette et de
la jupe se détachent nettement par contraste avec le chatoiement des couleurs du
fond
La clarté de la structure colorée, la précision des contours et la simplicité
de l'agencement des formes poussent le groupe des figures en avant du paysage sur
lequel elles se détachent et qui sert de toile de fond
Dans "Les Baigneuses" les touches
de peinture sont opaques d'un bout à l'autre de la toile à la différence de la transparence
d'une grande partie de l'Enfant au sein
La jeune mère nous regarde directement pour
partager avec nous les joies de la matenité
1886 -
En août et septembre 1886 Renoir loue une maison à La Chapelle Saint Briac en Bretagne
Il
y séjourne avec sa compagne Aline Charigot et leur fils Pierre qui a un an et demi
Aline
assise sur un banc dans le jardin ensoleillé de la maison bretonne s'occupe à des
travaux d'aiguille. Pierre lui pose la main sur le genou pour maintenir son équilibre
Le
tableau glorifie la fécondité de la nature : le jardin regorge de fleurs écloses
et d'arbres dont les branches ploient sous le lourd feuillage
Renoir a dessiné séparément
chaque feuille. Ces détails semblent former une fine mosaïque
Renoir "Les moindres
détails ont été préalablement dessinés à la plume tant je cherchais à être précis
par haine de l'impressionnisme"
Depuis 1880 il cherche à surmonter l'aspect inconsistant
ou informe que l'on reproche à la peinture impressionniste
Les contours nettement
perceptibles servent à déterminer la structure de la composition qui gouverne la
répartition des couleurs
La verticale bien marquée du tronc d'arbre à droite et l'arête
horizontale du toit divisent nettement le plan du tableau
Les parterres de fleurs
délimitent l'espace ou évoluent les personnages
Ce tableau reflète l'attirance de
Renoir pour les fresque romaines et renaissantes examinées en Italie
1888 -
En 1888 Renoir cherche à sortir de l'impasse technique dans laquelle il se trouvait
en tentant de réconcilier le dessin et la couleur, la définition précise de la forme
et la liberté du pinceau
Ce tableau marque le retour à une manière plus impressionniste
par contraste avec la structure rigide des formes du milieu des années 1880
Le paysage
de l'arrière-
La
figure bien que traitée librement se distingue nettement du fond
Les taches de couleur
n'envahissent pas la figure : elles tournent autour de la robe en relevant les accents
puissants de rouge et d'or
L'analogie entre la beauté des jeunes filles et celle des
fleurs est devenue un thème capital des peintures de Renoir
1888 -
Cette toile a été peinte à Essoyes
"Je suis en train de paysager en Champagne pour
fuir les modèles couteux" "Je redeviens de plus en plus campagnard"
Il passa environ
trois mois à Essoyes, le village natal d'Aline Charigot
Les femmes agenouillées sont
traitées dans des rythmes souples et aisés tandis que la femme debout se tourne pour
accueillir gentiment l'enfant qui observe, Pierre, le fils de Renoir né en mars 1885
Pour
Renoir la campagne est un lieu de relations sociales faciles et naturelles et de
saines occupations
Renoir disait à son fils Jean "Le meilleur pour une femme c'est
de se baisser pour nettoyer le plancher, allumer le feu ou faire la lessive, leur
ventre a besoin de ces mouvements"
L'arrière-
La couleur lumineuse se tient dans des tons pastels avec des contrastes accentués
entre les tons chauds et les tons froids
Des accents rouge-
Le modelé des figures est soigneusement suggéré.
Des touches fluides
suivent la direction des plis des vêtements
Le fond est plus l'archétype d'un décor
champêtre que la représentation d'un lieu particulier. Ce tableau a été exécuté à
l'atelier et non en plein-
Renoir à propos de ce tableau "J'ai repris pour ne plus
la quitter l'ancienne peinture douce et légère"
Ce tableau évoque la peinture française
du 18ème siècle par :
1888 -
On reprochait à Renoir de peindre des nus
Il répondit "On ne s'est pas fait faute
de me dire que ce n'était pas cela qu'il fallait aimer, que Boucher ce n'était qu'un
décorateur. Boucher est l'un des peintres qui ont le mieux compris le corps de la
femme. Un peintre qui a le sentiment des tétons et des fesses est un homme sauvé"
Renoir
voulait célébrer la merveille de la forme féminine
Pour lui "La nudité de la femme
est l'oeuvre de Dieu"
Dans ce tableau préfigure son style futur, sculptural et monumental
On
découvre une chaleur jaillie de la plénitude de la couleur, de l'adoucissement des
contours et de l'épanouissement complet des formes
Nulle trace dans ce tableau de
relation personnelle entre le peintre et son modèle
1888 -
Ce tableau montre la palette "arc en ciel" de Renoir : riche orchestration de la
gamme entière des couleurs
Luxuriance veloutée des nuances de jaunes, de rouges, de
verts et de bleus
Effet de lumière somptueuse et modulée
Le long des courbes d'un ruisseau
Renoir a placé sa créature épanouie, rayonnante de beauté charnelle
Renoir imprègne
de grandeur un geste insignifiant dans une pose naturelle
Expression douce et sereine
du visage
Le désordre des vêtements laisse entrevoir les charmes délicieux du corps
Toile
pleine de fraîcheur et de charme
1889 -
Le thème des jeunes filles jouant du piano fut un des sujets favoris de Renoir
Ce
tableau est une des premières versions de ce sujet
Ici les individus sont sans importance
et ils sont présentés en tant que types généraux
Le visage est peu individualisé car
le sujet principal de la toile c'est leur activité
Cette peinture de genre évoquant
une atmosphère d'harmonie juvénile a des liens avec des artistes français du 18ème
siècle
1890 -
A l'époque de ce tableau Renoir retournait temporairement à l'impressionnisme mais
un impressionnisme personnel
Il peint en couche mince sur fond clair créant une surface
soyeuse, ondulante comme une herbe fine délicatement agitée par la brise d'été. Il
en résulte un effet de luminosité spéciale
La composition est en X
D'en bas à droite
vers le haut à gauche, succession de couleurs adoucies depuis le chapeau dans le
coin, à travers la blanche silhouette jusqu'au paysage lointain et au ciel
L'autre
diagonale est faite de couleurs plus substantielles : violet et corail. Elle suit
la robe de l'autre jeune fille et monte vers les arbres en haut et à droite
Au croisement
de l'X un petit bouquet de fleurs dans la main de l'une des jeunes filles
Les jeunes
filles tournent le dos au spectateur apportant un élément humain mais non personnel
On
reprochait à Renoir "une excessive mollesse des objets" comme ici dans les zones
du premier plan et des arbres
Renoir recherchait précisément cet effet de mollesse
et de fluidité, ce sentiment de fusion qui pénètre toute l'atmosphère par une chaude
journée d'été dont il traduit l'agréable lassitude
Entre 1882 et 1892 Renoir a peint
des toiles représentant les distractions des jeunes filles de la bourgeoisie : jouer
du piano, se promener, cueillir des fleurs
Ces jeunes filles vont souvent deux par
deux, vêtues avec soin mais sans cérémonie
Les gestes sont typifiés plutôt que saisis
dans un instant particulier. Il n'y a pas d'indice d'engagement psychologique
Les
tableaux de ce genre ont eu un succès commercial
Ici le spectateur regarde du dehors
le monde des deux jeunes filles qui se suffit à lui-
Le tableau tout entier offre
une vision d'harmonie et de totalité
La blonde est vêtue de blanc et de bleu et la
brune est en rose comme dans de nombreux tableaux de Renoir
Les figures sont unies
à leur environnement par la répétition de couleurs semblables dans tout le paysage
avec des nuances plus vigoureuses au premier plan et dans l'arbre principal et des
teintes pastels lumineuses dans les lointains
1890 -
La jeune fille brune est en rose et la blonde en blanc avec une ceinture bleue
Renoir
a réduit le décor à une simple toile de fond colorée avec des indications ténues
des formes de la nature
Les figures sont traitées de profil mais leur univers est
complètement séparé de celui du spectateur
Leurs attitude s'entremêlent créant un
léger mouvement circulaire au centre du tableau
L'arbre intrigue car il faudrait qu'il
soit très petit pour que ses branches fleuries fussent à la portée de la jeune fille
agenouillée
Cet arbre encadre la composition et offre une image de l'abondance de
la nature
La juxtaposition des fleurs et des jeunes filles crée une métaphore de la
beauté et de l'innocence
1892 -
Cette baigneuse marque le rejet par Renoir de la facture linéaire et dure adoptée
vers 1885
Exécution douce faite de touches souples qui suivent les formes de la figure
Des
nuances de rose et de jaune suggèrent le ton chaud de la peau et le jeu de la lumière
qui l'effleure
Les couleurs du paysage répondent aux nuances de la figure
Il n'y a
pas de relation spatiale entre le modèle et l'arrière-
C'est une oeuvre
faite en atelier
L'arrière-
Pour Renoir la figure
doit être l'objet principal de l'attention du peintre
La tête est détournée et le
bras protège en partie le corps du regard du spectateur
La pose suggère la pudeur
et l'ignorance complète d'un spectateur
Ce genre de pose s'accorde au type de très
jeune fille que Renoi préférait chez ses modèles de ces années là, cherchant à évoquer
l'esprit d'innocence
Après 1900 Renoir peindra des modèles aux formes plus amples
qui paraîtront solliciter de manière plus directe le spectateur
1892 -
Au début de 1892 l'Etat demanda à Renoir de peindre un tableau important qui serait
acheté par le Musée du Luxembourg
Renoir réalisa plusieurs tableaux de 1.5 m de haut
C'est
Mallarmé qui avait demandé à Roujon, directeur des Beaux-
Renoir a peint cinq versions de "Jeune fille au piano"
Tableau traité avec
subtilité
La touche est douce et libre comme dans les tissus et les chevelures
Jeune
fille brune vêtue en rose et jeune fille blonde portant du blanc avec une ceinture
bleue
Couleurs chaudes et adoucies pour donner à la toile un ton vaguement doré
Renoir
n'utilise plus le bleu pour modeler les ombres
Ce tableau fait partie des oeuvres
de Renoir présentant les divertissements insouciants des jolies jeunes filles de
la bourgeoisie
Présence du thème de la musique qui revient fréquemment dans les dernières
peintures de Renoir
Après 1890 l'innocence et le charme de la jeunesse ont été le
thème capital de son art en contraste avec son comportement personnel
Parfois généreux
et expansif, parfois grognon et misanthrope, Renoir, sans cesse agité et inquiet
manquait de la sérénité dont il a créé une image apaisante dans des peintures comme
"Jeunes filles au piano"
Tout ce qui pouvait être rigide ou angulaire est supprimé
Les
formes amples qui entourent les jeunes filles semblent les envelopper et les protéger
Les
tons roux du premier plan (coussin, fauteuil, piano) créent un arc mouvant vers la
droite
Les corps des jeunes fille se penchent en avant suivant un arc semblable mais
inversé
Les jeunes filles, harmonie de tons pastels délicats, forment un groupe typique
de Renoir dans leur pose
1892 -
En mai 1892 la galerie Durand-
A la
fin du printemps il voyage en Espagne
En août et septembre il séjourne à Pornic où
il s'ennuie
"Le paysage devient pour moi un supplice ... se planter dehors comme un
saltimbanque, je ne le puis plus"
Mais "Je suis allé à Noirmoutie; c'est superbe et
tout à fait le Midi"
Ce paysage représente le Bois de la Chaise, une petite forêt
en bordure de l'océan. Renoir a achevé sa peinture en atelier comme il le fait de
plus en plus souvent
Par la liberté d'exécution et la délicatesse des coloris il rappelle
les paysages impressionnistes des années 1870
De longues touches de couleur déterminent
le tronc et les branches robustes de l'arbre sur la gauche
Des touches rapides de
vert et de jaune indiquent le feuillage qui dessine une entrelacs de dentelle sur
le ciel
L'ombre bleue et violette projetée par l'arbre épouse les contours du terrain
Au
second plan le blanc d'un voilier accroche le regard
Renoir a dit "Moi, j'aime les
tableaux qui me donnent envie de me balader dedans lorsque c'est un paysage"
Des branches
qui s'étirent de gauche à droite à travers toute la toile, en croisant d'autres arbres
plus éloignés, délimitent un abri accueillant pour les promeneurs
1894 -
Berthe Morisot (1841-
Sa fille Julie Manet (1878-
Ce portrait grave et sobre rend admirablement
la solitude de cette femme de 53 ans
L'air épanouie de Julie atténue la sobriété de
l'oeuvre, peinte d'une touche uniforme et dans une palette restreinte
Renoir a dit
de Berthe Morisot qu'elle avait été "une des amitiés les plus solides qu'il ait jamais
rencontrées"
Mais ils ne sont vraiment proches que dans les dix dernières années de
Berthe
Berthe qui avait six mois de plus que Renoir a passé ses premières années à
Limoges où son père était préfet (Le père de Renoir y était tailleur. Il quitta Limoges
en 1845)
Elle passe une enfance privilégiée à Passy et devient l'élève de Manet.
Elle
participe à 7 des 8 expositions impressionnistes
Renoir dira "Dire qu'une autre femme
avec tout cela trouverait moyen d'être insupportable"
Berthe et Renoir deviennent
amis en janvier 1886. Ce n'est que cinq ans après, été 1891, que Renoir présentera
Aline à Berthe et à son époux (soit un an après son mariage)
Des liens étroits se
tissent ensuite entre les deux familles qui prennent parfois leurs vacances ensemble
Dans
la représentation de Berthe Renoir se montre d'une scrupuleuse exactitude
Henri de
Régnier, habitué du Salon Morisot décrit Julie comme "une enfant silencieuse et farouche
aux joues naïvement coloriées"
Il décrit Berthe comme "la svelte et nerveuse femme
à cheveux blancs, un peu crispée et délicate, hautaine ave un rien de militaire et
de bref"
La représentation de Renoir n'a rien de la déplaisante condescendance de
Régnier
Berthe Morisot est emportée le 2 mars 1895 par une infection pulmonaire causée
par une grippe transmise par sa fille
Mallarmé devint le tuteur de Julie et Degas
et Renoir font partie du conseil de famille
Au cours de l'été qui suit la mort de
sa mère Julie fait presque partie de la famille Renoir
Elle épousera en mai 1900 le
peintre Ernest Rouart
1895 -
Renoir traite ici la chair féminine comme un "fruit mûr" en nous donnant une illusion
de volume
Le fond est artificiel mais les tons fauves brûlants donnent une chaude
nuance à la chevelure de la jeune fille
1895 -
Baigneuse placée dans un décor boisé avec un fond vaguement indiqué comme toile de
fond
L'espace est sommairement suggéré
L'éclairage est diffus
De subtils dégradés de
couleurs suggèrent le modelé de la figure et les masses du feuillage
L'harmonie de
couleurs est restreinte et assourdie
Seuls les roses du visage de la jeune fille et
de ses vêtements posés sur le rocher mettent en valeur les harmonies de beige, de
jaunes et de verts éteints qui dominent le reste
Renoir disait "Les sujets les plus
simples sont éternels. La femme nue sortira de l'onde amère ou de son lit, elle s'appellera
Vénus ou Nini. On n'inventera rien de mieux"
La baigneuse ignore complètement le spectateur
: elle regarde à droite, en dehors du tableau
Le geste qu'elle fait avec le linge
qu'elle tient livre son corps nu à notre regard
L'innocence de la baigneuse est accentuée
par le fait que Renoir a choisi un modèle très jeune
A cette époque Renoir était fasciné
par le langage gestuel des jeunes filles qui, dira un critique "existent comme des
enfants, mais aussi comme de jeune animaux joueurs, et comme des fleurs qui absorbent
l'air et la rosée"
Ces baigneuse inaugurent la période nacrée de Renoir
1895 -
Jean, second fils de Renoir, naquit en septembre 1894
Au début de l'été 1894, Gabrielle,
cousine d'Aline vint vivre avec les Renoir pour aider aux soins du ménage
Elle est
restée près de 20 ans chez eux et fut le modèle auquel Renoir a recouru le plus fréquemment
Renoir
écrit "Je suis dans ce moment à faire des moues de Jean et je vous assure que ce
n'est pas une sinécure, mais c'est si joli et je vous assure que je travaille pour
moi, rien que pour moi"
La blouse rouge de Gabrielle se détache sur le mur vert
Les
cheveux dorés de la petite fille ressortent sur des bleus légers
Les trois figures
s'ajustent dans un demi-
Jean est protégé par Gabrielle : seule la petite main
quitte l'abri de sa présence enveloppante
Le pinceau suggère des formes et des éclats
de lumière sans contours rigides
La composition fait écho au tableau de Rubens "Hélène
Fourment et ses enfants" que Renoir dans sa jeunesse avait copié au Louvre
1896 -
En septembre 1890 Renoir emménage à Montmartre, rue Girardon dans un des édifices
rassemblés dans un îlot pittoresque du 18ème siècle
Il y a un jardin envahi de fleurs
Jean
écrira "Ce petit paradis de lilas et de roses semblait le bout du monde"
Au printemps
1896 il fait poser sa famille, sa gouvernante et une jeune voisine dans le jardin
A
gauche, Pierre 11ans, s'appuie sur le bras de sa mère, bien en chair
Le petit Jean
est tendrement soutenu par Gabrielle, la gouvernante
La jeune voisine, la fille de
l'écrivain Paul Alexis, joue les coquettes car Pierre la dévore du regard
Les formes
amples des cinq personnages en grande toilette revêtent une importance quasi sculpturale
sur le fond pastel un peu flou du jardin
Des masses de feuillage floconneux répondent
aux rondeurs majestueuses des personnages
Les plis anguleux des chapeaux extravagants
d'Aline et Jean contrastent avec les courbes moelleuses
Renoir maîtrise les monochromes
des vêtements unis bleu, rouge ou blanc
Le petit Jean est offert à l'admiration du
spectateur d'une manière qui rappelle "Les Ménines" de Velasquez
Portrait de groupe
peint dans un très grand format (173 * 140 ) qui évoque celui utilisé par les aristocrates
pour glorifier leur lignée et exalter leur puissance
En 1896 (55 ans) Renoir connaissait
la réussite financière et jouissait d'une renommée grandissante. Il avait des domestiques
et Aline portait des vêtements de luxe
Les gens "bien" s'habillaient de tons neutres
mais Renoir aimait par réaction proclamer son "mauvais goût"
Aline a l'air déguisé
avec son chapeau voyant semblable à ceux des habitués des cafés de Montmartre
La sollicitude
que Gabrielle prodigue au petit Jean traduit un amour sincère
Jean dira "On m'aurait
bien étonné si l'on m'avait dit que ces belles filles ne faisaient pas partie de
la famille"
Renoir nous présente sa famille comme des membres de la nouvelle noblesse
de l'esprit où les artistes se situent pour mieux s'opposer à la bonne société
Il
célèbre la liberté durement gagnée de s'affranchir du poids des conventions bourgeoises
1896 -
Dans la peinture anecdotique du 19ème siècle une lettre entre des mains féminines
était souvent prétexte à l'évocation d'une rêverie sentimentale
Renoir ne peint jamais
de femmes trop pensives et l'attitude de sa liseuse reste gracieuse, légère, empreinte
de l'innocente malice de la plus instinctive joie de vivre
1897 -
Renoir rend hommage aux peintres français du 18ème siècle.
Il admirait la douceur
lyrique de Watteau et l'enjouement de Boucher
Les limpides harmonies de couleur et
la houle du mouvement paraissent naître sans effort
Une jeune fille nue taquine une
de ses compagnes en brandissant un petit crabe
La seconde jeune fille se replie dans
une attitude de défense tandis que les autres se retournent pour regarder le jeu
Les
formes robustes sont enveloppées dans la lumière nacrée du matin
Renoir contrebalance
les cobalts de la mer et du ciel par les bleus verts de la robe entre les deux jeunes
filles
Note de rouge aigu dans un drapé à droite
Equilibre visuel qui donne largeur
et vitalité à cette scène d'abandon insouciant
1897 -
Le mouvement du pinceau est large et fluide, doux et unifiant
L'éclat rouge et or
des étoffes embrase la clarté des chairs
Campée dans un intérieur somptueux qui préfigure
par ses tons rouges et dorés la palette des dernières années de l'artiste, cette
jeune femme s'étire avec la volupté instinctive d'un animal se préparant au repos
Renoir
aimait cette sensualité féminine fondamentale, sans préméditation
Il tenait à "amener
son sujet à se fondre dans une futilité d'esprit proche de l'éternité. Il le voulait
détendu d'esprit autant que de corps
Cet état de semi-
1910 -
Cette image féminine sans visage offre au regard la grâce exquise de l'arc souple
de son dos
1900 -
Les deux personnages et leurs formes monumentales dominent la composition
Les courbes
de leurs deux corps dessinent un contour élégant sur la verdure qui emplit la toile
tel un rideau de scène et bouche l'horizon
Décor champêtre loin de l'univers quotidien
Seul
un tas de vêtements, surmonté par un chapeau de paille, évoque l'époque contemporaine
L'Arcadie
intemporelle va devenir le cadre privilégié de ses nus de ses dernières années
Le
geste de la baigneuse qui tente de voiler sa nudité nous renvoie au thème de la Venus
pudica dans la sculpture romaine antique
Le regard de la baigneuse croise calmement
celui du spectateur
Ses longues mèches magnifiques tombent en cascade évoquant l'association
du nu féminin avec l'eau
La peau blanche et les cheveux roux de la baigneuse contrastent
avec le teint vermeil et les cheveux noirs de la servante
Hors du temps et de tout
lieu identifiable, les nus aux rondeurs lisses évoquent une Eve ardemment désirée
mais irrévocablement absente, avec tout ce qu'elle suppose de beauté, de simplicité
et d'innocence
Ce tableau préfigure les nus idéalisés sculptés par Maillol et "La
Coiffure" de Matisse
1901 -
A l'automne 1901, Jean Renoir, âgé de 7 ans, entre au collège jésuite de Sainte-
Il devra se faire couper ses longues
boucles car les gamins le traitent de fille
Jean "J'avais la grippe, mon père en profita
pour me prendre comme modèle. Pour que je reste tranquille il suggéra qu'on me donne
un crayon et une feuille de papier; il me convainquit de dessiner des animaux pendant
que lui dessinerait mon portrait"
Jean est assis à une table simplement ébauchée,
tout entier absorbé par son dessin
Les cheveux brun roux réchauffent cette composition
austère
Renoir privilégie les couleurs de terre
Les cils félins et la grande bouche
sont rendus avec délicatesse
Il émane de cette toile soigneusement construite une
quiétude qui évoque Chardin
1903 -
Claude naquit le 4 août 1901 à Essoyes
Le petit Clo-
Dans les bras de sa bonne il resplendit dans sa robe et son
bonnet blanc
Des nuances de rose, de jaune et de bleu illuminent cette toile d'une
tonalité blonde et uniforme
L'or des boucles de Claude se retrouve dans le col de
René
Le bleu soutenu des yeux de l'enfant se trouve un écho dans la rayure verticale
de la jupe de sa bonne
Le rose des joues des deux modèles apparaît dans le corsage
à motifs de Renée
Les blancs de la robe de l'enfant et de la jupe de la nurse sont
appliqués d'un pinceau plus gros qui leur confère texture et éclat
La nurse de Claude
est Renée Jolivet, la plus mémorable des modèles servantes de Renoir après Gabrielle,
Georgette Pigeot et la Boulangère
Elle devint actrice, voyagea beaucoup et habita
l'Egypte
Sa mère, sage-
Elle ne demeura pas
longtemps au service des Renoir et n'y sera pas vraiment heureuse car Renoir passait
de plus en plus de temps dans le Midi et elle avait été contrainte de s'occuper de
Claude sous l'oeil exigeant d'Aline et sans la diversion apportée par "le patron"
Elle
mourut en octobre 1973 à 88 ans
La technique de ce tableau procède du peintre flamand
Rubens auquel Renoir s'intéressera beaucoup dans les vingt dernières années de sa
vie
Un ami a écrit "Jamais il ne semblait avoir éprouvé tant de joie à suivre les
jeux du jeune animal humain qui s'éveille, gonflé de lumière et de lait"
1895 -
L'atmosphère lyrique baignée d'une fraîcheur printanière atténue la majesté classique
de ce nu
Cette fraîcheur est une allusion au réveil et rappelle le mythe d'Eurydice
( Nymphe des arbres qui épouse Orphée, grand poète et musicien)
Cette baigneuse doit
son allure plastique au célèbre type du spinario (le tireur d'épine) dont elle reproduit
l'attitude : une jambe repliée, la tête inclinée
Le corps a une sorte de respiration
atmosphérique grâce à l'harmonie d'accords chromatique éclaircis (d'où le terme de
nacré)
Un coup de brosse unifie les volumes
La touche est diffuse. Il s'en dégage un
effet figé qui confirme la consistance des corps
1903 -
La figure est d'un modelé simple mais ferme
C'est un des derniers tableaux où Renoir
a peint des nus à côté de leurs vêtements modernes, qui sont plus une adjonction
de couleurs qu'un signe spécifique de modernité
La baigneuse retient une masse de
cheveux de la main gauche
En faisant du fond un vague décor Renoir a fait du nu isolé
et monumental l'unique centre d'intérêt de la composition
Le modèle semble d'un regard
furtif constater la présence du spectateur et son geste offre son corps à nos regards
Cette
exhibition manifeste est rare parmi les nombreux nus de Renoir
Un critique a écrit
"Son type de femme sans aucune cérébralité n'invite pas le regard à se détourner
de la chair troublante des seins ou du ventre pour chercher une pensée dans le visage"
1906 -
Renoir est père de trois garçons. Les images des rapports entre les enfants et les
adultes se multiplient dans son oeuvre tardive
"La Promenade" a été peinte à Essoyes
au cours de l'été 1906
La fillette, Julienne Dubanc, donne la main à la gouvernante
et modèle Adrienne, "à la démarche de reine, blonde comme Venus"
Adrienne tourne la
tête dans un geste familier comme pour dire bonjour à un voisin rencontré par hasard.
L'enfant
s'agrippe à la main de la jeune femme sans prêter attention aux autres promeneurs
car elle est tout occupée à chercher des fleurs pour les cueillir
L'artiste traduit
le sentiment de sécurité éprouvé par l'enfant auprès de l'adulte
La position centrale
de la jeune femme est renforcée par les verticales énergiques des troncs d'arbres
La
forêt n'est pas un environnement mais une toile de fond lumineuse devant laquelle
l'artiste dispose ses figures monumentales
Climat attachant d'intimité et de confiance
1908 -
Renoir a fait la connaissance d'Ambroise Vollard en 1894
Originaire de l'île de la
Réunion, Vollard avait ouvert une galerie rue Laffitte et il commença à acheter des
tableaux à Renoir
Avec Durand-
Cette
image lisse, presque enjolivée, évoque peu le caractère
Vollard était laid et il aurait
voulu être beau
Ce portrait est devenu l'image de l'archétype de l'amateur d'art plus
que l'évocation du marchand rusé qui vendait des trésors d'art accumulés dans sa
petite galerie
Vollard tient dans ses mains "La femme accroupie" de Maillol
Renoir
admirait l'esprit antique de la sculpture de Maillol "Je me croyais transporté en
Grèce"
Vollard et Maillol ont incité Renoir à se lancer dans la sculpture
A partir
de 1905 la peinture de Renoir devient plus libre.
Le visage et les mains de Vollard
sont animés par des fils de peinture blanche et rose qui suggèrent le modelé et remplacent
la peinture opaque
Les rehauts de lumière blancs sur les vêtements et sur la figurine
posée sur la table sont formés de touches souples
Seuls les bleus de la faïence et
les verts du tapis de table font contraste avec la tonalité à dominante chaude, accentuée
par le mur du fond
1908 -
Gabrielle n'est pas représentée ici comme une personne fortement individualisée :
Renoir a peint la douceur et le naturel de la jeune fille
La touche gris de perle
et blanc satiné donne à la blouse l'aspect d'un cocon diaphane d'où émerge le beau
torse rose
Le maximum de couleur est dans le visage, modelé avec largeur et mis en
valeur par la simplicité de la coiffure dont la masse sombre contraste avec la fleur
délicate
L'arrière-
1910 -
L'épouse de Renoir qui paraît plus que ses 50 ans pose dans une de ses robes amples
et peu flatteuses qu'elle aime
Les cheveux gris relevés en chignon sont légèrement
décoiffés autour du visage
Elle n'a pour bijoux qu'une broche ronde et une double
alliance
Elle regarde le peintre droit dans les yeux et la présence du chiot endormi,
révèle, derrière un air un peu narquois, le caractère protecteur et la présence importante
de cette femme plantureuse
Les portraits que Renoir réalise pour lui sont plus pénétrants
que les portraits de commande
La composition est traitée par larges masses de couleurs
juxtaposées : le fond rouge, la forme jaune d'Aline, la nappe verte à droite
Renoir
applique par petites touches une peinture liquide qui prend par endroits la transparence
de l'aquarelle
La lumière tombante sur le bras et le visage d'Aline façonne les plis
de sa robe et lustre ses cheveux gris
De minuscules empâtements donnent à la texture
du col et des manchettes de dentelle une forte matérialité
La souplesse de la facture
recrée le bouffant des vêtements d'Aline et suggère le poids de sa personne
Renoir
réussit à évoquer la lassitude et la santé chancelante de sa femme
Aline souffre de
bronchite chronique et d'emphysème
Elle vieillira encore plus vite après les débuts
de la guerre durant laquelle ses deux fils aînés seront blessés au combat
Diabétique
elle refusera toujours de suivre un régime
Elle mourra d'épuisement à 56 ans en juin
1915 au retour d'un voyage à Gerardmer où elle était aller voir son fils Jean à l'hôpital
pour empêcher les chirurgiens de lui amputer la jambe
Jean dira "Ma mère apporte beaucoup
à mon père : la paix de l'esprit, des enfants qu'il pouvait peindre et un bon prétexte
pour ne plus sortir le soir"
Elle était déterminée et dévouée sans être servile
Elle
excellait au billard et à la pêche à la ligne
Elle avait appris à conduire à Baptistin,
le chauffeur de la famille
Elle prenait plaisir à raconter des histoires drôles au
dîner
Tensions dans le ménage car Aline est de plus en plus jalouse de Gabrielle,
qui d'ailleurs ne cache plus son mépris pour l'épouse de son employeur et lointaine
cousine
En décembre 1913, Gabrielle est congédiée
Mary Cassatt écrit "Le pauvre Renoir
souffre. Sa femme a renvoyé son ancien modèle qui était chez eux depuis 18 ans, sa
fidèle infirmière ... et il doit se débrouiller seul, lui qui est aussi impotent
qu'un bébé"
1910 -
Pour peindre de grands formats verticaux, Renoir paralysé par l'arthrite fit installer
sa chaise sur des tréteaux
Portrait en plein air entièrement peint dans le grand atelier
des Collettes
Renoir juxtapose des tons dont l'accord n'est pas évident : un foulard
écarlate sur une veste pourpre
Variété de bleus, d'oranges et de violets unifiés par
une généreuse application d'ocres
Fond diaphane peint de couleurs délayées
Malgré la
solidité de la figure, les costumes et les accessoires sont joyeux et animés
Renoir
sculpte le modelé du visage et des mains
Jean, 15 ans, élève du Lycée Masséna à Nice,
a encore sa frimousse enfantine et pose en veste de chasse. Bob qui n'est plus un
chiot attend assis à ses pieds
Jean "Nous avions emprunté le fusil à un de nos fermiers.
Je n'ai tiré qu'une fois, j'ai tué un oiseau et j'en ai été horrifié ... Je venais
tout juste de recevoir ma première motocyclette et j'étais impatient d'aller me promener"
En
février 1913 il s'engage pour trois ans dans le 1er régiment des Dragons. Il sera
sous-
Renoir aimait le paysage des Collettes : "Regardez donc
la lumière sous les oliviers ... Ca brille comme du diamant. C'est rose, c'est bleu
... Et le ciel qui joue à travers. C'est à vous rendre fou. Et les montagnes là-
1910 -
Renoir s'est concentré sur la seule figure, remplissant la toile de ses formes et
réduisant le fond au minimum
Les couleurs réduites sont dominées par les roses et
les blancs de la chair
Le pinceau crée des mouvements ondulants à l'intérieur des
formes du personnage
Ces mouvements suggèrent la rondeur et la plénitude de la chair
Les
formes opulentes du modèle rappellent la vision de la beauté féminine propre à Titien
et à Rubens
L'attention du modèle n'est pas distraite par une présence extérieure
1910 -
Renoir présente une vision idéalisée de lui-
Les tons froids du veston servent à faire valoir
la tête et le fond
Facture variée : pleine pâte de la cravate et dessin plus fin de
la barbe
1910 -
Somptueux étalage de parures et de fanfreluches
Les parties les plus travaillées de
la peau sont encadrés par les rehauts fluides du costume, des bijoux et de la coiffeuse
Le
costume de Gabrielle est intemporel et suggère la splendeur et l'exotisme dans leur
généralité
Le thème de la femme à sa toilette a une longue histoire en peinture
Gabrielle
a quitté le ménage Renoir car Madame Renoir souffrant de son infirmité croissante
était jalouse de la dépendance où se trouvait le peintre par rapport à sa bonne qui
était aussi son modèle
Gabrielle a épousé le peintre américain Conrad Slade
1910 -
La silhouette plantureuse emplit quasiment la surface de la toile
Paysage feuillu
mais pratiquement indistinct
Elle ne prête pas la moindre attention à la présence
du spectateur
La baigneuse a un visage anonyme
C'est pour Renoir une ode à l'éternel
féminin qu'il conçoit tranquille, apetissant et docile
Peinture appliquée librement
en couches fines
Quelques notes grises mettent en valeur le rose nacré de la chair
Les
coups de pinceau rapide marquent un sursaut de vigueur chez le peintre affaibli qui
veut oublier le déclin inéluctable de ses forces
1911 -
Les tons chauds de la figure et de la table se détachent sur un fond plus froid
Contraste
entre les cheveux bruns et les rehauts de lumière sur le corsage et la peau
Facture
rigoureuse du corsage et des roses
Sur le visage les rehauts blancs sont posés en
alternance
Les rouges chauds des joues et des lèvres font écho à ceux des roses et
du plateau de la table
Renoir "Je veux qu'un rouge soit sonore pour résonner comme
une cloche, si ça n'y est pas je rajoute des rouges et d'autres couleurs jusqu'à
l'obtenir. Je ne suis pas plus intelligent que ça"
Il cherchait à obtenir les effets
les plus riches par les moyens les plus simples
Renoir associait les roses à la beauté
physique des femmes
Dans les dix dernières années de sa vie sa joie de peindre n'est
tempérée par aucune trace d'effort ou de doute "Je suis comme un de ces bouchons
jetés à la rivière et charriés par le courant. Quand je peins, je m'abandonne complètement"
AUGUSTE RENOIR