Portrait de Charlotte-
Elle est la fille du graveur Taurel
Portrait d’une grande sentimentalité qui annonce toute une litanie de Jésus sulpiciens accompagnés de l’agneau sacrificiel
Madame Marcotte de Sainte-
Mme Marcotte de Sainte-
Aura de mélancolie et de fragilité
Beaucoup de choses dans ce portrait rappellent celui de Mme de Senonnes : la pose, les tonalités de brun et or, le canapé recouvert de soie, le châle, le mouchoir et la longue chaîne
Femme de santé fragile que les longues séances de pose fatiguaient beaucoup
Ses mains étaient si agitées qu’Ingres fut obligé de les modeler d’après celles de sa femme
Les grands yeux anxieux, le nez long, les lèvres pâles qui ne sourient pas sont loin des charmes séducteurs que chez Ingres nous attendons des visages de femmes
Image d’effacement accentuée par la complète dissimulation du corps par la dicrète robe marrons très légèrement ouverte au col
La grande boucle de la ceinture, les bracelets et le monocle font plus l’effet de joaillerie religieuse que de parure féminine
Les courbes complexes de la haute et lourde coiffure créent une enceinte protectrice en couvrant la plus grande partie du front
Col large avec de beaux dessins linéaires
Ingres évite les rythmes trop mous et voluptueux
Les courbes des extrémités des doigts sont cachées
Les plis étroits et anguleux de la robe empêchent toute forme féminine de se dévoiler
Le chatoiement de la soie jaune, le miroitement de l’or, la chaleur des bruns foncés, créent une harmonie qui enveloppe le modèle d’une tristesse obscure
L’Apothéose d’Homère 1827
Ce tableau symbolise la foi que portait Ingres à une hiérarchie de valeurs éternelles basées sur un précédent classique
La stricte symétrie des ses personnages et de son architecture évoque les fresques murales de Raphaël : « L’Ecole d’Athènes » ou « Le Parnasse »
Ingres veut déifier un génie à qui sont redevables toutes les générations suivantes
Comme Zeus au mont Olympe, Homère est placé dans un superbe isolement au sommet d’une pyramide ascendante de personnages historiques qui sont venus le vénérer
A ses pieds deux femmes personnifient l’Iliade et l’Odyssée
Au-
Le décor architectural rehausse cette apothéose car le poète est assis comme une statue de culte devant un temple dérivé de l’Erchthéion et sur le fronton duquel est inscrit son nom
Les personnages classiques sont placés dans la sphère supérieure
Eschyle avec son rouleau de parchemin est réfléchi sur la droite par Pindare avec sa lyre
Apelle avec ses pinceaux et sa palette par Phidias et son maillet
Seuls deux modernes sont admis : Raphaël qui est conduit par Apelle et Dante qu’accompagne Virgile
Plus bas : Poussin, Corneille et La Fontaine à gauche et Boileau, Molière et Racine à droite
On reprocha à ce tableau une détermination obstinée de préserver des traditions moribondes face aux expériences nouvelles du monde moderne
Certaines formes semblent plus juxtaposées que fondues (portrait de Poussin par lui-
Les figures semblent planer dans un espace ascendant peu profond, plutôt que d’obéir à la force de la gravité
Les blancs brillants des draperies d’Homère et de la Victoire jaillissent de l’arrière-
La peinture d’Ingres suscita des variations
Influence sur « L’Atelier » de Courbet en 1855
Degas parodia le tableau
Intérieur de harem 1828
Il réalisa cette petite toile (35*27 cm) pour honorer la promesse qu’il avait faite à un ami lors de son séjour à Florence
L’importance de cette toile tient à son statut d’état intermédiaire entre la Baigneuse Valpinçon et le plus tardif Bain Turc
Autour de la jeune femme de dos, revenant comme un leitmotiv, de nouvelles figures apparaissent près d’un bassin
Portrait de Pierre Baillot 1829
Ingres célébrait Baillot comme le « Poussin des violons »
Louis-
Manet disait de ce tableau que c’était « Le boudha de la bourgeoisie »
Par son réalisme sobre et aggressif ce portrait symbolise le règne de Louis-
Louis-
Homme d’affaires et journaliste, il dirigea dès 1799 le « Journal des Débats » qui en 1930 soutint activement la Monarchie de Juillet
Ingres éprouva quelques difficultés à trouver une pose appropriée à cet homme de forte carrure, actif, âgé de 66 ans
Il projeta d’abord de le montrer en pied
Intense confrontation avec une personnalité réelle, décrite en microscopique détail
Fort modelage de tonalités gris brun
Forte présence du modèle obtenue par la compression de l’espace qu’il occupe
A droite le dossier du fauteuil, comme une énorme pince, essaye vainement de contenir cet ample volume
Puissance des bras qui semblent avec leur aspect de ressort tendu prêts à nous happer
Les mains donnent une impression d’énergie enroulée sur elle-
Les doigts trapus pressent les cuisses largement ouvertes
Serrée dans un étroit col empesé et couronnée par des boucles effilées de cheveux blancs la densité de la tête assaille presque le spectateur
Le regard et la position de la tête sont décalés par rapport à l’axe vertical
Etonnante reproduction des rides, des cheveux et des plis des vêtements
Influence de ce tableau :
Portrait d’Ernest Renant par Léon Bonnat
Portrait de Gertrude Stein par Pablo Picasso
Etude pour le « Martyre de saint Symphorien » 1830-
Pour le Martyre Ingres travailla près de six années au cours desquelles il accumula des centaines d’études pour ses très nombreux personnages
Nous avons dans cette étude des fragments : des bras, des mains, des doigts
Etude pour le « Martyre de saint Symphorien » 1830-
Cette étude présente des personnages entiers
On ne sait pas comment saint Symphorien est mort. Mais le jeune derrière le licteur nu qui tient la foule en respect ramasse une pierre pour une éventuelle lapidation
Autoportrait à mi-
La période du directorat de la Villa Médicis coïncide avec un ralentissement de l’activité graphique
Il a abandonné la vente de portraits dessinés et n’en effectue plus que pour des amis
Ingres s’est représenté bien juvénile pour ses 55 ans, un crayon à la main, une feuille de papier devant lui, affirmant par là son credo classique du primat du dessin
Ce qui frappe dans cette effigie, virile, décidée, positive c’est moins l’introspection que la volonté
Un critique à écrit « Réactionnaire, doctrinaire et sectaire, misonéiste (peur profonde, superstitieuse de la nouveauté), misogyne, voire misanthrope, Ingres est sans doute l’artiste le plus haïssable de l’Ecole française »
Portrait de Victor Baltard 1837
Le futur architecte des Halles de Paris est debout devant la colonnade de Bernin et les bâtiments du Vatican
Prix de Rome d’architecture en1833 Baltard avait précédé Ingres à Rome et les deux ménages y vécurent jusqu’en 1838 dans une parfaite harmonie
Portrait de Franz Liszt 1839
Liszt fut introduit auprès d’Ingres, directeur de l’Académie, par sa maîtresse, Marie d’Agoult
Portrait d’Elisa Viollet-
1837
Un voyage d’études avait mené Eugène Viollet-
Portrait de son épouse dite Elisa ou (par son mari) « La mouche »
La princesse Mathilde a évoqué les relations difficiles de ce couple « Ce cocu a toujours tiré bénéfice des liaisons de sa femme »
Toujours en quête d’hommages masculins, la jolie Elisa connut pourtant des difficultés avec son propre aspect physique puisqu’elle eut la malchance de perdre à plusieurs reprises ses cheveux ce qui explique le bonnet qu’elle porte
Roger délivrant Angélique 1839
L’héroïne de cette scène est menacée par un monstre
Le sujet trouve sa source dans le poème épique d’Arioste, « Roland furieux »
Complètement nue, enchaînée à un rocher dans « L’île des pleurs », Angélique est laissée en pâture à l’orque, monstre marin visqueux
Nous la voyons au moment précis où Roger arrive à son secours, monté sur son hippogriffe, créature hybride, moitié cheval, moitié aigle, capable à la fois de galoper et de voler
Ingres montre Roger en train de porter un coup de sa longue épée à la gueule du monstre
Avec ce tableau Ingres pénètre dans un territoire étranger : celui du romantisme
La scène est une côte de rochers sauvages, battus par une mer écumante
Opposition des protagonistes :
Un chevalier dans sa brillante armure face à une jeune fille dévêtue
Un monstre répugnant des profondeurs et une bête fabuleuse
Ingres fige l’action avec une précision qui détache chaque personnage pour un examen individuel minutieux
A gauche on peut compter les plumes de l’aigle et sentir la différence de texture entre l’armure dorée et le manteau de soie qui s’envole
A droite Angélique est isolée comme une statue glacée
Sa chair lisse mais flexible, opposée aux cheveux de soie, aux plumes hérissées et aux roches déchiquetées, apporte une note érotique
Angélique est une créature sans défense dont la tête retombe avec une anxiété pitoyable et dont la gorge se gonfle
Ses grands yeux roulent dans la direction du héros
Ses bras sont d’une grande élasticité
Les cuisses se joignent au genou et s’effilent à la cheville
L’Odalisque à l’Esclave 1839-
Depuis la Grande Odalisque de 1814 le thème du harem au Proche-
Tableau commandé par son ami M. Marcotte
Le caractère voluptueux du nu doit lutter pour attirer l’attention avec une esclave faisant de la musique et un eunuque noir
Les motifs décoratifs de l’environnement visuel rapellent les miniatures persanes
Prolifération de détails : les géométries du mur du haut, la fontaine, les balustres, le sol en carrelage, les costumes de l’esclave et de l’eunuque et le coussin sur lequel repose le nu
Juxtaposition du rouge froid de la colonne à gauche et de la chaleur du rideau à droite
L’abandon ondulant de l’odalisque contre les géométries de surface en devient d’autant plus lascif
Rythme caressant du corps qui court du bout de ses orteils au coude plié parmi le flot de la chevelure dorée qui va s’élargissant
Emoustillante fusion des contours des seins arrondis et du ventre
Surface parfaite de chair sans ride et sans ossature
Les jambes à l’extension relâchée riment avec celles de l’esclave derrière
L’inclinaison moëlleuse de son torse et de sa tête s’élève à l’unisson du fin manche du luth oriental
Ingres avait vu au Salon de 1834 « Les femmes d’Alger » de Delacroix
Cette vision d’une Arcadie érotique inspirera Renoir et Matisse
Portrait de Madeleine Ingres, son époux derrière elle 1830
Ingres qui n’a pas dessiné plus de deux ou trois effigies du même modèle en consacra dix à son épouse
En bonne modiste Madeleine prenait elle-
Ingres se représente derrière Madeleine coiffée d’un large chapeau, ses stricts bandeaux dérangés par une mèche rebelle
Agé de 50 ans l’artiste en paraît plutôt 30
Par sa position discrète à l’arrière-
Don Pedro de Tolède baisant l’épée d’Henri IV 1832
Ingres a été très tôt attiré par le genre « troubadour », tentative élaborée par un groupe d’artistes, pour une grande part formés dans l’atelier de David
Ils voulaient renouveler la tradition classique en abandonnant les références antiques et en mettant à la mode le goût pour le Moyen Age et l’histoire de France
Ils voulaient s’appuyer sur un style réaliste, une documentation historique rigoureuse, une facture colorée et une description théâtralisée des personnages
La chute de l’Empire s’était accompagnée d’un regain d’intérêt pour la vie des rois de France et les grands moments de la monarchie
Don Pedro de Tolède, passant par Paris pour aller dans les Pays Bas, rencontre au Louvre un officier qui portait l’épée d’Henri IV
Il s’avance, met en genou en terre et la baise, en disant « Rendons honneur à la plu glorieuse épée de la chrétienté »
Quelques jours auparavant ce personnage avait eu un démêlé avec le roi qui lui avait dit « Enfin, Monsieur l’Ambassadeur, vous êtes Espagnol, et mois Gascon ; ne nous échauffons pas »
Le Martyre de saint Symphorien 1834
Le prélat de la cathédrale d’Autun demanda au Ministère une œuvre dédiée à saint
Symphorien, patron de la ville, ayant vécu sous Commode entre 160 et 180 ap. J-
Il fut envoyé au martyr pour avoir refuser d’adorer les dieux païens
Ingres fit peindre par un architecte les remparts de la ville en les mettant de biais. Le temple païen est suggéré sur la droite par la colonne
La foule est reléguée sur le fond comme l’empereur, le bras levé pour ordonner la pein
Saint Symphorien, au centre avec le vêtement blanc, dessine avec son propre corps un X
Le bras droit et le visage sont tournés vers la mère qui se penche par-
La correspondance des bras tendus, visant à créer un dialogue intime, a tendance à calmer la brutalité des visages empressés autour du martyr
Le geste ferme et l’acceptation du martyr contrastent avec l’agitation de la foule
La brutalité des sbires et le dos exagérément musclé du licteur furent fortement contestés au Salon de 1834. Ingres fut défendu par Théophile Gautier qui écrivit que la beauté étant le but, la forme devait si nécessair dominer la réalité du sujet
Pour s’éloigner Ingres dédida alors de concourir au poste de directeur de l’Académie de France à Rome
Le Comte Mathieu-
Avant de partir pour Rome où il allait succéder à Horace Vernet à la direction de l’Académie de France, Ingres acheva le portrait peint du comte Molé.
Effigie sombre et glacée où seul un effet de lumière vient illuminer un morceau du dossier du fauteuil vide où le ministre du roi appuie son coude
En dehors du fauteuil ne sont éclairés que le visage triste et les mains
De façon inhabituelle le regard du spectateur est conduit vers une partie très secondaire du tableau
Le comte Molé s’entremettra pour empêcher un duel avec un certain Pommereux qui avait critiqué un portrait d’Ingres en présence du peintre
Il fut trois mois ministre des Affaires Etrangères en 1830
Il fut président du Conseil de 1836 à 1839
Angélique, étude 1919
Ce tableau est une étude pour « Roger délivrant Angélique »
Longue chevelure blonde
Par comparaison avec une étude antérieure, Ingres a modifié la position des bras
d’Angélique, croisés au-
Long bras droit
Un critique a écrit « Un troisième sein tient la place de la gorge, amoureusement modelé à l’image des deux autres, dodu, petit, comme il les aime ; la pomme d’Adam est devenue mamelon »
La Vierge adorant l’Enfant endormi 1839
Ingres a toujours affectionné les figures en qui pureté et sensualité se conjuguaient : ce sont Vénus et la Fornarina dans le monde païen, Marie ou Jeanne d’Arc dans le monde chrétien
Belle comme les anciennes déesses de l’antiquité, la Vierge incarnait l’amour chrétien à travers sa maternité et une forme de ferveur religieuse dont Ingres ressentait le besoin et la nostalgie
Depuis le début du 15ème siècle les peintres avaient souvent représenté Marie adorant son enfant avec ravissement
Ce tableau fut commandé par le futur tsar Alexandre II en 1836 lors de son pasage en Italie
La Vierge, les mains jointes, semble adorer l’Enfant Jésus endormi couché devant elle
Ingres était mécontent de son œuvre et fit un autre tableau