Etude d’homme asssis 1808
Etude exécutée à partir de la copie d’une sculpture romaine évoquant un sujet mythologique
Le peintre a maîrisé le jeu sobre et subtil de la draperie rouge couvrant la tête et le dos du vieil homme et le modelé de sa musculature encore vigoureuse par le contraste appuyé de la lumière et des ombres
Le choix de la rigoureuse posture de profil, de même que le cadrage original laissant à peine deviner les cuisses du modèle accentue l’étrangeté de cette belle figure
Oedipe explique l’énigme du Sphinx 1808-
Le Sphinx ravageait la région de Thèbes.
Oedipe libéra la cité du joug du Sphinx et résolvant son énigme « Qui marche à quatre pattes le matin, à deux le midi, et à trois le soir ? ». Il répondit « C’est l’homme »
Pour Ingres cette légende offrait l’occasion de démontrer la supériorité de l’intelligence humaine sur un adversaire monstrueux.
Multitude d’éléments terrifiants :
On accède au repaire du Sphinx par une gorge escarpée
Dans un geste d’effroi le compagnon d’Œdipe recule, son vêtement soulevé par le vent
Le Sphinx préside à l’intérieur d’une mystérieuse grotte, en haut à gauche, en partie aigle, en partie lion, en partie femme.
Au-
Mais magnifique sérénité du jeune héros dont la sagesse et le noble corps affirment la puissance de la raison et de la beauté sur la déraison et la laideur
Le profil idéalisé de sa belle tête grecque rappelle « Le Torse d’Homme »
Il affronte calmement le monstre
La position de son corps athlétique suggère, par les muscles tendus des jambes une détermination virile mais en même temps une noble aisance qui permet à la main droite de relâcher sa prise sur les deux javelots
Ce tableau évoque « Les bergers d’Arcadie » de Poussin
Harmonieuse géométrie : les dessins triangulaires et perpendiculaires des membres, du torse et des javelots suffisent à dominer l’ensemble des anfractuosités de la montagne, des blocs de pierre fracassés et de l’anatomie hideuse du Sphinx
Ingres répéta cette peinture avec des variations jusqu’à la fin de sa vie
Joseph-
Français d’origine corse, Moltedo est un ancien payeur des armées devenu directeur des postes à Rome
Il était aussi propriétaire d’une fonderie de plomb à Tivoli
Il a inventé une pompe à incendie et une machine à filer le chanvre
Il était aussi agent général du clergé en France auprès du Saint-
Affable et diplomate, il était devenue l’homme de confiance de la mère de l’Empereur, Laetitia
Modèle vu en buste, pris seulement au-
Cadrage resserré, la tête du modèle proche du haut du tableau
Cadrage très resserré : la vue du Colisée à droite et la via Appia à gauche sont cachées par la carrure du modèle engoncé dans un ample manteau
Le modèle regarde le spectateur
L’épaule droite est en avant et la gauche en arrière
Ingres a joué sur la blancheur éclatante du col de chemise pour mieux mettre en valeur par contraste les chairs du visage
Univers poètique sombre et dramatique créé par le romantique effet d’orage qui se prépare et les nuages noirs qui progressivement obscurcicent la ville et font disparaître la célèbre lumière italienne
Par la suite le paysage va disparaître de ses portraits : il mettra en valeur la condition sociale ou l’apparence mondaine des modèles
Charles-
Marcotte d’Argenteuil (1787-
Portrait baigné d’austérité
L’air sérieux du visage, soutenu par un haut col serré s’assortit à la sévérité du vêtement dont la texture sèche paraît aussi raide que le regard assuré et les lèvres fortement serrées
Même la main participe à cette raideur : les doigts apparemment détendus sont immobiles
La froideur du fond gris, du col blanc et de la cravate noire mettent en valeur la résonance sombre des bruns, des bleus et des rouges foncé qu’anime la petite rosette de la Légion d’Honneur
Discret éclat doré de la breloque, de la bague et du gland du chapeau sur les vêtements sombres
Les arrondis du manteau et la chevelure indisciplinée sont compensés par la rigueur des lignes droites : dédoupure en forme de M du revers gauche, lignes droites des coutures et des boutonnières
M. Marcotte d’Argenteuil fut un des plus loyaux amis et protecteurs du peintre : il lui commanda « Le pape Pie VII à la Chapelle Sixtine » et « L’Odalisque à l’Esclave »
Vue intérieure de l’église Sainte-
Ingres avait déclaré « Le dessin comprend les trois quarts et demi de ce qui constitue la peinture »
La plupart des artistes du siècle parsément leurs carnets de croquis d’annotations indiquant la couleur
Au moment où l’artiste dessine il ne dispose pas d’une boîte d’aquarelle
Ingres voyageur n’échappe pas à cette règle : il parsème ses croquis d’annotations de couleurs mais sans pratiquement jamais les reporter plus tard sur la feuille
Ici, Ingres a disposé dans son épure architecturale trois personnages : un prêtre, une italienne en prière et un pénitent
Thétis implorant Jupiter 1811
Représentation d’une scène de l’Illiade où l’on voit Thétis implorer Jupiter d’accorder la protection divine au combat que mène son fils Achille
Terrifiante grandeur d’un Dieu suprême et puissance sécuctrice de la femme nue
Jupiter règne dans une lointaine et majestueuse symétrie, du haut de son Olympe couronné de nuages
Par contraste la nymphe Thétis, plaquée de profil contre le dieu imposant vu de face, est une créature d’une grande fluidité conforme à ses origines aquatiques
Pour supplier le dieu elle s’enroule telle une anguille autour du géant immobile
Son bras gauche se tend vers la tête de Jupiter tandis que les doigts tentent de caresser sa barbe
Le sein et le bras droit établissent un contact avec le dieu
La jambe droite se presse si loin en avant que son orteil frôle celui de Jupiter
Les yeux sont humbles et pleins de servitude
Le nez et le front comme dans les profils grecs, se fondent en une ligne souple
Le cou se gonfle érotiquement comme celui d’un animal dans sa parade amoureuse
Dans le coin supérieur gauche, Junon, la femme de Jupiter regarde aussi sévèrement Thétis que l’aigle à droite
Ingres a utilisé les vases grecs et les gravures de Flaxman qui a représenté Homère
Mais une vie sensuelle anime les silhouettes schématiques des gravures antiques grâce à la description précise des textures de la chair, des cheveux, des étoffes, du marbre et des plumes
Le trône et le bras gauche supportés par un coussin de nuages donnent l’impression que l’énorme volume de Jupiter plane sur la surface du tableau
Thétis se fond avec l’ample prolifération du rose et du vert des draperies
Les draperies cachent les masses pesantes des jambes et du trône
Pyramide de chair palpable et d’étoffe
Le peu de profondeur de l’espace trouve un écho dans les sculptures traitées à la façon d’un camée, au premier plan
Ingres a gardé ce tableau dans son atelier jusqu’en 1834, date à laquelle il fut acheté par l’Etat. Il est aujourd’hui au Musée Granet d’Aix en Provence
Ce tableau présente les deux grands thèmes de l’art d’Ingres : le voluptueux et l’austère
Le nu féminin sous la forme d’une créature éthérée
La re-
Madame Henri-
En 1811 Ingres peignit le portrait de M. Brochet et celui de sa sœur, Cécile-
Large fond gris vide de tout ornement
Ce tableau peut sembler un peu sec pour Ingres
Surprenante expression désenchantée de la tête inclinée dont le charme ingénu, avec sa coiffure qu’on dirait d’une fillette, fait contraste à l’attitude distante plus habituelle dans les portraits féminins d’Ingres
Palette d’une délicate fraîcheur
Les bijoux se limitent au corail pâle des boucles d’oreilles, du collier et des bracelets
Robe Empire au satin étincelant
Ces deux tons sont mélangés dans les raies roses et blanches du châle qui cache négligemment l’articulation anguleuse du coude
Le jaune citron pâle du gant complète cette harmonie sourde
Les contours inclinés des joues roses riment avec le collier de corail
Couture en forme de T sur la rober qui produit une certaine stabilité
Ingres donne l’impression que le châle et la manche gauche poussent vers l’avant
Charles-
Ce portrait devant un ciel d’orage rappelle les conditions atmosphériques du portrait de Granet en 1807
Mais M. Cordier demeure froidement insensible au paysage qui lui sert de toile de fond
Plus que sous la menace d’un orage d’été on s’attendrait à le voir dans le calme sûr d’un salon riche
Mise impeccable
Calme de bonne compagnie
Maintien élégant (une main dans la poche, l’autre tenant un chapeau)
Granet, l’ami d’Ingres, aurait aidé son ami dans l’exécution du paysage de Tivoli
Le gris intense du ciel menaçant se fond étroitement avec le bleu-
L’architecture lointaine est liée au premier plan sous la forme de ce rocher grais où M. Cordier appuie son bras droit
Les tons sombres sont contrastés par des touches vivifiantes :
Blancheur empesée du col
Chatoiement doré de la breloque finement ouvragée et des boutons
L’unique accent de rouge du ruban de la Légion d’Honneur qui réchauffe la chair déjà colorée du visage et de la main
Malgré la frontalité de cette tête, la réserve que M. Cordier porte comme un masque et son léger strabisme du regard ne nous permettent pas de vraiment le connaître
Jacques Marquet de Monbreton de Norvins 1811
Le portrait du Baron de Norvins (1769-
Il fut Directeur de la police à Rome de 1810 à 1814. Il était également historien
et son œuvre la plus réputée fut une « Histoire de Napoléon » en quatre volumes (1827-
Attitude digne de sa fonction
Le visage semble tendu et éveillé, les yeux perçants et inquisiteurs, la bouche serrée ne sourit pas, la pose est rigide et effacée
Le bras droit paraît plus rigide que l’accoudoir recouvert par un pan du rideau
Le bras gauche, dans un geste tout napoléonien, se cache sous la veste
Sentiment de restriction souligné par :
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Reprise du motif damassé et fleuri du mur sur le tissu qui recouvre la chaise, ce qui resserre les limites étroites de l’espace réservé au modèle
En opposition au strict costume noir, au col et aux manchettes d’un blanc cassé, le rideau, le mur, le tissu de la chaise et du ruban de la Légion d’Honneur sont saturés d’un rouge vibrant encore davantage au contact du vert du bronze antique
Ce tableau appartint plus tard à Degas qui introduisit dans ses portraits la même tension entre des modèles pleins de réserve et leur environnement
La Comtesse de Tournon 1812
Seul portrait de femme âgée qu’Ingres ait exécuté : celui de la mère du préfet du
département du Tibre à Rome, le comte de Tournon-
L’image se rapproche par sa franchise et sa sincérité du portrait que David fit l’année suivante de sa femme vieillissante
Ingres se plie à certaines exigences de la vanité féminine : nous sommes frappés par la véracité du nez proéminent, de la bouche légèrement affaissée, des petits yeux ronds et du double menton
Mais les détails qui dévoileraient l’âge avancé sont habilement cachés :
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Mais le bras étendu, lisse et sans ride, est visible au premier plan
Grande présence psychologique qui nous permet d’éprouver un contact direct avec une dame élégante et éveillée dont l’esprit s’est aiguisé pendant de longues années à la conversation de salon
Les riches atours de la comtesse créent une ambiance de confortable dignité plutôt que de sérénité sensuelle
Dans l’espace étroit du fauteuil Empire, discrètement brodé, elle se tient très droite quoique ses bras soient détendus
Le foisonnement fluide du voile, du châle indien, du corsage et de la jupe de velours évoque plus la tenue de l’aristocratie que les ornements du boudoir
Les couleurs avec leurs harmonies d’ocre froid, de vert sombre et de bruns confèrent au tableau une froideur pompeuse
Pour Ingres une si éclatante mise à nu d’un personnage ne peut s’appliquer qu’à des
gens âgés : nous la retrouverons dans M. Bertin à 66 ans et l’auto-
Aphrodite blessée par Diomède remonte à l’Olympe 1810-
Illustration d’un épisode dramatique de l’Iliade durant lequel les dieux et les héros de la guerre de Troie s’affrontent avec violence
Diomède, fils de Tysée et roi d’Argos, est un valeureux guerrier grec, protégé par Athéna et qui n’hésite pas à s’attaquer à Arès, le dieu de la guerre, après avoir blessé Aphrodite à la main
Aphrodite prend part aux combats afin de protéger Enée, blessé durant la bataille et tandis qu’elle le défend, Diomède la frappe de sa lance
« L’arme aussitôt va pénétrant la peau à travers la robe divine et, au-
Sa suivante Iris l’aide à s’enfuir, montant à ses côtés sur le char d’Arès, qui repose sur une nuée
« Prenant les rênes en main, d’un coup de fouet Iris enlève les chevaux ; ceux-
Ingres montre Enée, blessé à terre, et Diomède pratiquement assis sur sa dépouille, tandis que le char céleste s’apprête à emporter Aphrodite loin de la bataille
Figures hiératiques et idéalisées
Sensualité du traitement des personnages
Romulus, vainqueur d’Acron 1812
En 1811 tout Rome s’attendait à voir arriver Napoléon l’année suivante mais il ne vint pas à cause de la désastreuse campagne de Russi
Mais les préparatifs pour le séjour impérial étaient très avancés
L’Empereur devait remplacer le Pape au Palais du Quirinal et ce changement exigeait une décoration nouvelle
Deux tableaux furent commandés à Ingres : « Romulus » et « Le songe d’Ossian » dont les sujets étaient empruntés à des livres favoris de Napoléon : les Vies de Plutarque et les poèmes épiques du barde légendaire Ossian
Ce couplage réunissait le monde romain et le monde nordique
Une allusion au triomphe de Romulus, fondateur des institutions politiques et militaires de l’ancienne Rome créait un antécédent de gloire et légitimait les évènements de l’histoire moderne
Un atelier spécial fut construit dans la tribune de l’église de la Sainte Trinité des Monts
Acron, roi des Céninensiens a été tué dans un combat corps à corps avec Romulus et dépouillé de ses armes que le chef romain a promis d’offrir à Jupiter
Ces trophées sont placés sur un pieu taillé dans un chêne et portés en triomphe à Rome par Romulus
Il est couvert du manteau de pourpre, couronné de lauriers et entouré de ses troupes
Ainsi était établi le cérémonial des triomphes qu’allait connaître toute l’histoire romaine
Comme David dans ses Sabines (1799), Ingres veut reconstruire un sujet épique situé à l’aube de l’histoire romaine dans un style héroïque exprimant l’austérité et la puissance convenant au sujet
L’espace a été compressé : nous ne voyons plus des acteurs de chair et d’os mais des formes qui paraissent déshydratées et ont une fermeté de ciselure
Mouvement processionnel d’un bas-
Influence des frises du Parthénon
Le jeune Ingres avait aussi copié « L’Amazone blessée »
Ingres utilisa la gouache qui contrairement à l’huile tend à produire des formes plates
Les couleurs pastels sont contractées et froides
L’ensemble fait penser à une peinture murale d’une époque éloignée
Observations réalistes :
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Laure Zoëga 1813
En 1807, après son départ pour Rome, Ingres rompit avec Julie Forestier
On ignore tout de sa vie sentimentale jusqu’au 11 décembre 1812, date d’une lettre où le peintre demandait respectueusement à ses parents leur consentement à son mariage avec une charmante jeune femme de 28 ans, Laure Zoëga, fille d’un célèbre archéologue danois
Hélas, les premiers mois de 1813 les fiancés avaient déjà rompus
Grande douceur dans le visage et le regard aux grands yeux clairs
Le songe d’Ossian 1813
« Le songe d’Ossian » fut l’un des livres favoris de Napoléon
Tableau destiné au plafond de la chambre à coucher de Napoléon au Palais du Quirinal
Il explore un monde nocturne de rêveries fantômes inspiré par les légendaires héros
nordiques des poèmes ossianiques que James Macpherson avait « découverts » et publiés
en 1760-
Ossian excitait l’imagination d’une grande partie du monde occidental
Les poèmes de l’Homère du Nord comme on appelait Ossian devinrent le pendant nordique d’un passé méditerranéen primitif, puissant et lointain, dont les gestes héroïques et les batailles avaient trouvé un chantre au style poètique vigoureux et obsédant
Accompagné seulement de deux chiens qui aboient dans un paysage nordique désert et rocheux, au bord de la mer, le vieil Ossian, aveugle comme Homère, a cessé de chanter et appuyé sur sa harpe et sur un rocher il est tombé dans un profond sommeil
Des boucles blanches qui couronnent le front du poète, surgit une vision froide des sceptres nordiques
Ils planent portés par les nuages au-
Contraste chromatique de leur grisaille d’ectoplasme avec les verts et les roses qui colorent la robe du poète et le ciel nocturne
Comme transition avec ce royaume de la mort qui donne le frisson, Malvina, veuve du fils d’Ossian, Oscar, mort massacré tend un bras pour un geste de consolation
Starno, le Roi des Neiges, trône au centre
Voluptueuse souplesse des harpistes et des héroïnes enlaçant leurs guerriers-
Inquiétant mélange sous la clarté lunaire de l’érotique et de l’héroïque, avec ces sirènes fantomatiques et cette troupe militaire
Cette troupe est la contrepartie nordique de celle de Romulus
Raphël et la Fornarina 1814
Ingres vouait une grande vénération à Raphaël
En 1812 Ingres projetait de réaliser une série de tableaux illustrant les épisodes de la vie de Raphaël
En fait il ne réalisa que le fiançailles de Raphaël avec la nièce du cardinal Bibbiena (1813) et la représentation de son amour pour celle qu’on appelait la Fornarina, la fille du boulanger
A la fin du 18ème siècle était née la tradition de peindre des sujets tirés de la vie des grands artistes comme s’ils étaient des saints modernes
Nous voyons l’atelier de Raphaël au moment où celui-
Elle semble à la fois étreindre l’artiste et s’en éloigner
Elle semble assise en même temps sur les bras du fauteuil et sur les genoux de Raphaël
Par la fenêtre on aperçoit le Vatican et la vieille basilique Saint-
Contre le mur on reconnaît « La Vierge à la chaise »
Pour représenter Raphaël, Ingres a copié l’autoportrait du maître qui se trouve au Musée des Offices
Les contours froids et fermes de la Fornarina tiennent plus de la facture d’Ingres que de la chaleur des portraits de Raphaël
Notre attention, comme celle de Raphaël, est partagée entre la présence palpable de la femme et la représentation picturale sur la toile
La tension entre l’art et la réalité est accrue par le tableau de la Madone en arrière-
Le tableau de la Madone et le tableau de la Fornarina sont coupés de la même manière
Plancher fortement incliné
Les personnages de Raphaël et de sa bien-
L’intérieur de la Chapelle Sixtine 1814
L’affaiblissement de la foi chrétienne dans la société moderne eut de profonds retentissements dans l’art religieux
L’artiste, plus spectateur que chrétien, représenta des scènes du rituel chrétien.
Des cathédrales, des processions commençèrent à remplacer les images surnaturelles de l’art chrétien
Le jeune Ingres a été grisé par la splendeur de l’art catholique et de ses cérémonies
En avril 1807 il fut bouleversé par un miserere chanté de la tribune de la Chapelle Sixtine
Ce tableau commandé par M. Marcotte représente le Pape Pie VII en train de célébrer l’office du Jeudi Saint
Il décrit le Pape et sa suite de cardinaux dans une pose oblique
Le Pape, au centre et tout de blanc vêtu, est traité comme une miniature
On ne voit qu’un quart du Jugement Dernier
Chaude lumière
Tonalités d’ors, de rouges et de bruns
Le spectacle rappelle les splendides processions religieuses des maîtres de la Renaissance vénitienne
L’échelle diminuée fond les détails riches des personnages, des vêtements sacerdotaux et de la décoration du mur
Une forte disposition au conservatisme le poussa à faire des efforts pour perpétuer la gloire passée de l’art chrétien
La Grande Odalisque 1814
Nu le plus fascinant qu’ait peint Ingres
Tableau commandée par la sœur de Napoléon, Caroline, reine de Naples
Les critiques l’associèrent à la Venus d’Urbino du Titien qu’Ingres ne copiera qu’en 1822
La complexité de la pose se rapproche du type de figure établi par Michel-
Ingres connaissait ce type de figure de Michel-
La complexité érotique décontenance mais séduit le spectateur
Oisive créature de harem dont les pieds n’ont jamais été souillés par la marche l’odalisque est exhibée passivement pour notre délectation
Pourtant elle se dérobe à notre regard, cachant tout d’elle, sauf le dos
Tête vue presque de profil fortement illuminée
Mais un œil et une joue sombres, presque vus de face ( préfiguration de Picasso ? )
Elle nous renvoie notre regard avec une combinaison de franchise et d’obliquité
Elle repose avec une orientale langueur dans un luxe de soies, de fourrures et de plumes
La tête se tient bien droite, maintenue par la verticale de la ligne du cou
Le poids du haut du corps est porté par le triangle tendu du bras gauche tendu auquel fait écho la forme du coussin
La jambe gauche croise la droite dans une tension précaire
Contraste entre la froideur des accessoires et la chaleur rosée de la peau
La chair volupteuese et souple semble avoir été polie pour ressembler à du marbre
Mélange d’oppositions : molesse et fermeté, chaleur et froideur
Les crititques reprochèrent à l’Odalisque trois vertèbres de trop ; ces vertèbres avaient permis l’élongation de la colonne vertébrale et l’amélioration de la courbure du dos
Sont enregistrés avec une précision photographique : la pipe, le brûle-
Les Fiançailles de Raphaël 1813-
Ingres nourrissait un véritable culte pour Raphaël dont il avait tout au long de ses études assimilé les poses et les détails iconographiques
Quand Ingres peignit ce tableau il épousait à Rome, Madeleine Chapelle, avec laquelle il s’était fiancé par correspondance sans jamais l’avoir vue, mais qui se révélera une épouse fidèle et une compagne prévenante
Raphaël avait l’intention d’épouser la vertueuse nièce du cardinal Bibbiena mais de santé fragile il mourut avant les noces
Il n’avait pas envisagé d’épouser la Fornarina, symbole de l’inépuisable mystère de la beauté féminine
De même Ingres a partagé sa vie avec une épouse attentive et affectueuse en réservant à la peinture la sublimation et le triomphe du charme féminin
Avec sa femme Madeleine il partira pour Naples au printemps 1814 pour rejoindre la cour de Caroline Murat, commanditaire de ce tableau, l’une des premières peintures de reconstitution historique et exemple du genre troubadour
Le cardinal Bibbiena avait offert pour épouse à son ami Raphaël sa propre nièce
Les silhouettes sont placées dans des poses d’une gestuelle éloquente
Le cardinal prenant avec la main droite celle de Raphaël, ouvre la main gauche comme pour unir les mains des deux jeunes gens
La jeune fille se tient les bras croisés dans une attitude pudique et réservée
Pour le visage de Raphaël, Ingres s’est inspiré d’un portrait considéré à l’époque comme un autoportrait
Le cardinal, lui, est élaboré d’après un portrait de Raphaël conservé à Florence
Portrait de Madeleine Ingres enceinte 1814
Après des déboires sentimentaux, Ingres jeta son dévolu en 1813 sur l’épouse du greffier en chef du tribunal impérial à Rome.
L’épouse trouva judicieux de détourner l’enthousiasme du peintre à son égard en lui faisant miroiter la possibilité d’une union avec une cousine, Madeleine Chapelle
Il commença donc une correspondance avec Madeleine, âgée de 31 ans, qui était installée
à Guéret où elle tenait une boutique de mode après avoir assisté sa sœur et son beau-
Ingres se décrit « … des vices on ne m’en connaît point, je n’ai ni fortune ni belle figure, mais j’ose dire un talent distingué et connu … Je suis naturellement doux de caractère et cependant la colère s’empare aisément de moi … Je ne suis ni triste ni gai, quelquefois préoccupé de mon art, ce qui est bien naturel quand on est passionné comme je le suis … »
La fiancée arriva à Rome en octobre 1813. Ingres se rendit au devant d’elle et la renconta près du tombeau de Néron
Le mariage célébré le 4 décembre devait durer près de 36 ans et il semble que l’union ne fut obscurcie d’aucun nuage
Ingres était d’un caractère aussi enthousiaste que nerveux, prompt à s’emporter,
se sentant facilement persécuté, s’enthousiasmant pour des œuvres d’art de trois
sous comme pour des chefs-
Cette union parfaite ne connut que l’amertume de demeurer sans descendance car Madeleine
accoucha en 1814 d’un enfant mort-
La reine Caroline Murat 1814
Portrait exécuté quelques mois seulement avant la chute et la mort de son époux
En fond la baie de Naples et le Vésuve
Influence des grands modèles de portraits royaux en pied
« Je viens de voir mes appartements, je les trouve charmants ainsi que la terrasse »
La reine tout habillée de noir et tenant dans sa main un petit carnet intime pode debout devant une table sur laquelle ne se trouve qu’une clochette
Plis compliqués de deux rangées de rideaux
Lumineuse vue de la baie de Naples où l’on aperçoit la mer d’un bleu intense et une myriade de petites maisons blanches construites au pied du Vésuve d’où s’échappent de lourdes volutes de fumées blanches
Contraste raffiné du bleu, des verts et du noir
Composition élaborée à partir de :
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