Etude d’homme asssis  1808

Etude exécutée à partir de la copie d’une sculpture romaine évoquant un sujet mythologique

Le peintre a maîrisé le jeu sobre et subtil de la draperie rouge couvrant la tête et le dos du vieil homme et le modelé de sa musculature encore vigoureuse par le contraste appuyé de la lumière et des ombres

Le choix de la rigoureuse posture de profil, de même que le cadrage original laissant à peine deviner les cuisses du modèle accentue l’étrangeté de cette belle figure

Oedipe explique l’énigme du Sphinx   1808-1827

Le Sphinx ravageait la région de Thèbes.

Oedipe libéra la cité du joug du Sphinx et résolvant son énigme « Qui marche à quatre pattes le matin, à deux le midi, et à trois le soir ? ». Il répondit « C’est l’homme »

Pour Ingres cette légende offrait l’occasion de démontrer la supériorité de l’intelligence humaine sur un adversaire monstrueux.

Multitude d’éléments terrifiants :

On accède au repaire du Sphinx par une gorge escarpée

Dans un geste d’effroi le compagnon d’Œdipe recule, son vêtement soulevé par le vent

Le Sphinx préside à l’intérieur d’une mystérieuse grotte, en haut à gauche, en partie aigle, en partie lion, en partie femme.

Au-dessous, caché dans son domaine rocheux, on peut voir la preuve de sa sauvagerie : les os du squelette d’une ancienne victime et la chair cadavérique du pied d’une nouvelle proie

Mais magnifique sérénité du jeune héros dont la sagesse et le noble corps affirment la puissance de la raison et de la beauté sur la déraison et la laideur

Le profil idéalisé de sa belle tête grecque rappelle « Le Torse d’Homme »

Il affronte calmement le monstre

La position de son corps athlétique suggère, par les muscles tendus des jambes une détermination virile mais en même temps une noble aisance qui permet à la main droite de relâcher sa prise sur les deux javelots

Ce tableau évoque « Les bergers d’Arcadie » de Poussin

Harmonieuse géométrie : les dessins triangulaires et perpendiculaires des membres, du torse et des javelots suffisent à dominer l’ensemble des anfractuosités de la montagne, des blocs de pierre fracassés et de l’anatomie hideuse du Sphinx

Ingres répéta cette peinture avec des variations jusqu’à la fin de sa vie

Joseph-Antoine Moltedo   1810

Français d’origine corse, Moltedo est un ancien  payeur des armées devenu directeur des postes à Rome

Il était aussi propriétaire d’une fonderie de plomb à Tivoli

Il a inventé une  pompe à incendie et une machine à filer le chanvre

Il était aussi agent général du clergé en France auprès du Saint-Siège ce qui explique le chapelet dans la main  gauche

Affable et diplomate, il était devenue l’homme de confiance de la mère de l’Empereur, Laetitia

Modèle vu en buste,  pris seulement au-dessus de la taille et les mains justes visibles en bas de la composition

Cadrage resserré, la tête du modèle proche du haut du tableau

Cadrage très resserré : la vue du Colisée à droite et la via Appia à gauche sont cachées par la carrure du modèle engoncé dans un ample manteau

Le modèle regarde le spectateur

L’épaule droite est en avant et la gauche en arrière

Ingres a joué sur la blancheur éclatante du col de chemise pour mieux mettre en valeur par contraste les chairs du visage

Univers poètique sombre et dramatique créé par le romantique effet d’orage qui se prépare et les nuages noirs qui  progressivement obscurcicent la ville et font disparaître la célèbre lumière italienne

Par la suite le paysage va disparaître de ses portraits : il mettra en valeur la condition sociale ou l’apparence mondaine des modèles

Charles-Marie-François-Jean- Baptiste-François Marcotte d’Argenteuil    1810

Marcotte d’Argenteuil (1787-1864) est âgé de 23 ans. Il est le Directeur des Eaux et Forêts dans la Rome napoléonnienne

Portrait baigné d’austérité

L’air sérieux du visage, soutenu par un haut col serré s’assortit à la sévérité du vêtement dont la texture sèche paraît aussi raide que le regard assuré et les lèvres fortement serrées

Même la main participe à cette raideur : les doigts apparemment détendus sont immobiles

La froideur du fond gris, du col blanc et de la cravate noire mettent en valeur la résonance sombre des bruns, des bleus et des rouges foncé  qu’anime la petite rosette de la Légion d’Honneur

Discret éclat doré de la breloque, de la bague et du  gland du chapeau sur les vêtements sombres

Les arrondis du manteau et la chevelure indisciplinée sont compensés par la rigueur des lignes droites : dédoupure en forme de M du revers gauche, lignes droites des coutures et des boutonnières

M. Marcotte d’Argenteuil fut un des plus loyaux amis et protecteurs du peintre : il lui commanda « Le pape Pie VII à la Chapelle Sixtine » et « L’Odalisque à l’Esclave »

Vue intérieure de l’église Sainte-Praxède à Rome   1810

Ingres avait déclaré « Le dessin comprend les trois quarts et demi de ce qui constitue la peinture »

La  plupart des artistes du siècle parsément leurs carnets de croquis d’annotations indiquant la couleur

Au moment où l’artiste dessine il ne dispose  pas d’une boîte d’aquarelle

Ingres voyageur n’échappe pas à cette règle : il parsème ses croquis d’annotations de couleurs mais sans pratiquement jamais les reporter plus tard sur la feuille

Ici, Ingres a disposé dans son épure architecturale trois personnages : un prêtre, une italienne en prière et un pénitent

Thétis implorant Jupiter     1811

Représentation d’une scène de l’Illiade où l’on voit Thétis implorer Jupiter d’accorder la protection divine au combat que mène son fils Achille

Terrifiante grandeur d’un Dieu suprême et puissance sécuctrice de la femme nue

Jupiter règne dans une lointaine et majestueuse symétrie, du haut de son Olympe couronné de nuages

Par contraste la nymphe Thétis, plaquée de profil contre le dieu imposant vu de face, est une créature d’une grande fluidité conforme à ses origines aquatiques

Pour supplier le dieu elle s’enroule telle une anguille autour du géant immobile

Son bras gauche se tend vers la tête de Jupiter tandis que les doigts tentent de caresser sa barbe

Le sein et le bras droit établissent un contact avec le dieu

La jambe droite se presse si loin en avant que son orteil frôle celui de Jupiter

Les yeux sont humbles et pleins de servitude

Le nez et le front comme dans les profils grecs, se fondent en une ligne souple

Le cou se gonfle érotiquement comme celui d’un animal dans sa parade amoureuse

Dans le coin supérieur gauche, Junon, la femme de Jupiter regarde aussi sévèrement Thétis que l’aigle à droite

Ingres a utilisé les vases grecs et les gravures de Flaxman qui a représenté Homère

Mais une vie sensuelle anime les silhouettes schématiques des gravures antiques grâce à la description précise des textures de la chair, des cheveux, des étoffes, du marbre et des plumes

Le trône et le bras gauche supportés par un coussin de nuages donnent l’impression que l’énorme volume de Jupiter plane sur la surface du tableau

Thétis se fond avec l’ample prolifération du rose et du vert des draperies

Les draperies cachent les masses pesantes des jambes et du trône

Pyramide de chair palpable et d’étoffe

Le peu de profondeur de l’espace trouve un écho dans les sculptures traitées à la façon d’un camée, au premier plan

Ingres a gardé ce tableau dans son atelier jusqu’en 1834, date à laquelle il fut acheté par l’Etat. Il est aujourd’hui au Musée Granet d’Aix en Provence

Ce tableau présente les deux grands thèmes de l’art d’Ingres : le voluptueux et l’austère

Le nu féminin sous la forme d’une créature éthérée

La re-création noble de la grandeur immuable de l’art et de la littérature classiques

Madame Henri-Placide Joseph Panckoucke 1811

En 1811 Ingres peignit le portrait de M. Brochet et celui de sa sœur, Cécile-Françoise qui en 1805, âgée de 24 ans, avait épousé un des membres de la famille Panckoucke, éditeurs d’ouvrages d’érudition

Large fond gris vide de tout ornement

Ce tableau peut sembler un peu sec pour Ingres

Surprenante expression désenchantée de la tête inclinée dont le charme ingénu, avec sa coiffure qu’on dirait d’une fillette, fait contraste à l’attitude distante plus habituelle dans les portraits féminins d’Ingres

Palette d’une délicate fraîcheur

Les bijoux se limitent au corail pâle des boucles d’oreilles, du collier et des bracelets

Robe Empire au satin étincelant

Ces deux tons sont mélangés dans les raies roses et blanches du châle qui cache négligemment l’articulation anguleuse du coude

Le jaune citron pâle du gant complète cette harmonie sourde

Les contours inclinés des joues roses riment avec le collier de corail

Couture en forme de T sur la rober qui produit une certaine stabilité

Ingres donne l’impression que le châle et la manche gauche poussent vers l’avant

Charles-Joseph-Laurent Cordier    1811

Ce portrait devant un ciel d’orage rappelle les conditions atmosphériques du portrait de Granet en 1807

Mais M. Cordier demeure froidement insensible au paysage qui lui sert de toile de fond

Plus que sous la menace d’un orage d’été on s’attendrait à  le voir dans le calme sûr d’un salon riche

Mise impeccable

Calme de bonne compagnie

Maintien élégant (une main dans la  poche, l’autre tenant un chapeau)

Granet, l’ami d’Ingres, aurait aidé son ami dans l’exécution du paysage de Tivoli

Le gris intense du ciel menaçant se fond étroitement avec le bleu-noir du costume et trouve un écho dans le bleu-gris froid des yeux

L’architecture lointaine est liée au premier plan sous la forme de ce rocher grais où M. Cordier appuie son bras droit

Les tons sombres sont contrastés par des touches vivifiantes :

Blancheur empesée du col

Chatoiement doré de la breloque finement ouvragée et des boutons

L’unique accent de rouge du ruban de la Légion d’Honneur qui réchauffe la chair déjà colorée du visage et de la main

Malgré la frontalité de cette tête, la réserve que M. Cordier porte comme un masque et son léger strabisme du regard ne nous permettent  pas de vraiment le connaître

Jacques Marquet de Monbreton de Norvins 1811

Le portrait du Baron de Norvins (1769-1854), fonctionnaire français dans la Rome napoléonnienne, diffuse une atmosphère de circonspection et de retenue

Il fut  Directeur de la police à Rome de 1810 à 1814. Il était également historien et son œuvre la plus réputée fut une « Histoire de Napoléon » en quatre volumes (1827-1828) et ses écrits lui valurent un fauteuil à l’Académie française

Attitude digne de sa fonction

Le visage semble tendu et éveillé, les yeux perçants et inquisiteurs, la bouche serrée ne sourit pas, la pose est rigide et effacée

Le bras droit paraît plus rigide que l’accoudoir recouvert par un pan du rideau

Le bras gauche, dans un geste tout napoléonien, se cache sous la veste

Sentiment de restriction souligné par :

- Le bord vertical du rideau qui joint la ligne du bras droit

- La base cubique de la statue qui empêche un geste trop libre du coude gauche

Reprise du motif damassé et fleuri du mur sur le tissu qui recouvre la chaise, ce qui resserre les limites étroites de l’espace réservé au modèle

En opposition au strict costume noir, au col et aux manchettes d’un blanc cassé, le rideau, le mur, le tissu de la chaise et du ruban de la Légion d’Honneur sont saturés d’un rouge vibrant encore davantage au contact du vert du bronze antique

Ce tableau appartint plus tard à Degas qui introduisit dans ses portraits la même tension entre des modèles pleins de réserve et leur environnement

La Comtesse de Tournon   1812

Seul portrait de femme âgée qu’Ingres ait exécuté : celui de la mère du préfet du département du Tibre à Rome, le comte de Tournon-Simiane

L’image se rapproche par sa franchise et sa sincérité du portrait que David fit l’année suivante de sa femme vieillissante

Ingres se plie à certaines exigences de la vanité féminine : nous sommes frappés par la véracité du nez proéminent, de la bouche légèrement affaissée, des petits yeux ronds et du double menton

Mais les détails qui dévoileraient l’âge avancé sont habilement cachés :

- Le front et les tempes par une perruque

- Le cou par une collerette compliquée

- Les mains par le châle et la robe

Mais le bras étendu, lisse et sans ride, est visible au premier plan

Grande présence psychologique qui nous permet d’éprouver un contact direct avec une dame élégante et éveillée dont l’esprit s’est aiguisé pendant de longues années à la conversation de salon

Les riches atours de la comtesse créent une ambiance de confortable dignité plutôt que de sérénité sensuelle

Dans l’espace étroit du fauteuil Empire, discrètement brodé, elle se tient très droite quoique ses bras soient détendus

Le foisonnement fluide du voile, du châle indien, du corsage et de la jupe de velours évoque plus la tenue de l’aristocratie que les ornements du boudoir

Les couleurs avec leurs harmonies d’ocre froid, de vert sombre et de bruns confèrent au tableau une froideur pompeuse

Pour Ingres une si éclatante mise à nu d’un personnage ne peut s’appliquer qu’à des gens âgés : nous la retrouverons dans M. Bertin à 66 ans et l’auto-portrait d’Ingres à 78 ans

Aphrodite blessée par Diomède remonte à l’Olympe   1810-1812

Illustration d’un épisode dramatique de l’Iliade durant lequel les dieux et les héros de la guerre de Troie s’affrontent avec violence

Diomède, fils de Tysée et roi d’Argos, est un valeureux guerrier grec, protégé par Athéna et qui n’hésite pas à s’attaquer à Arès, le dieu de la guerre, après avoir blessé Aphrodite à la main

Aphrodite prend part aux combats afin de protéger Enée, blessé durant la bataille et tandis qu’elle le défend, Diomède la frappe de sa lance

« L’arme aussitôt va pénétrant la peau à travers la robe divine et, au-dessus du poignet de la déesse jaillit son sang immortel »

Sa suivante Iris l’aide à s’enfuir, montant à ses côtés sur le char d’Arès, qui repose sur une nuée

« Prenant les rênes en main, d’un coup de fouet Iris enlève les chevaux ; ceux-ci pleins d’ardeur, s’envolent. Ils ont vite atteint le séjour des dieux, l’Olympe escarpé »

Ingres montre Enée,  blessé à terre, et Diomède pratiquement assis sur sa dépouille, tandis que le char céleste s’apprête à emporter Aphrodite loin de la bataille

Figures hiératiques et idéalisées

Sensualité du traitement des personnages

Romulus, vainqueur d’Acron   1812

En 1811 tout Rome s’attendait à voir arriver Napoléon l’année suivante mais il ne vint pas à cause de la désastreuse campagne de Russi

Mais les préparatifs pour le séjour impérial étaient très avancés

L’Empereur devait remplacer le Pape au Palais du Quirinal et ce changement exigeait une décoration nouvelle

Deux tableaux furent commandés à Ingres : « Romulus » et « Le songe d’Ossian » dont les sujets étaient empruntés à des livres favoris de Napoléon : les Vies de Plutarque et les poèmes épiques du barde légendaire Ossian

Ce couplage réunissait le monde romain et le monde nordique

Une allusion au triomphe de Romulus, fondateur des institutions politiques et militaires de l’ancienne Rome créait un antécédent de gloire et légitimait les  évènements de l’histoire moderne

Un atelier spécial fut construit dans la tribune de l’église de la Sainte Trinité des Monts

Acron, roi des Céninensiens a été tué dans un combat corps à corps avec Romulus et dépouillé de ses armes que le chef romain a promis d’offrir à Jupiter

Ces trophées sont placés sur un pieu taillé dans un chêne et portés en triomphe à Rome par Romulus

Il est couvert du manteau de pourpre, couronné de lauriers et entouré de ses troupes

Ainsi était établi le cérémonial des triomphes qu’allait connaître toute l’histoire romaine

Comme David dans ses Sabines (1799), Ingres veut reconstruire un sujet épique situé à l’aube de l’histoire romaine dans un style héroïque exprimant l’austérité et la puissance convenant au sujet

L’espace a été compressé : nous ne voyons plus des acteurs de chair et d’os mais des formes qui paraissent déshydratées et ont une fermeté de ciselure

Mouvement processionnel d’un bas-relief classique où les protagonistes se pressent les uns sur les autres dans des positions frontales ou de profil

Influence des frises du Parthénon

Le jeune Ingres avait aussi copié « L’Amazone blessée »

Ingres utilisa la gouache qui contrairement à l’huile tend à produire des formes plates

Les couleurs pastels sont contractées et froides

L’ensemble fait penser à une peinture murale d’une époque éloignée

Observations réalistes :

- Le flanc gris glacé du cheval révèle des veines et des rides

- Acron mort et le guerrier qui s’incline pour le soulever sont faits d’une chair et de muscles souples

- Naturalisme des draperies qui insuffle de la vie dans ce rêve de grandeur classique

Laure Zoëga  1813

En 1807, après son départ pour Rome, Ingres rompit avec Julie Forestier

On ignore tout de sa vie sentimentale jusqu’au 11 décembre 1812, date d’une lettre où le peintre demandait respectueusement à ses parents leur consentement à son mariage avec une charmante jeune femme de 28 ans, Laure Zoëga, fille d’un célèbre archéologue danois

Hélas, les premiers mois de 1813 les fiancés avaient déjà rompus

Grande douceur dans le visage et le regard aux grands yeux clairs

Le songe d’Ossian     1813

« Le songe d’Ossian » fut l’un des livres favoris de Napoléon

Tableau destiné au plafond de la chambre à coucher de Napoléon au Palais du Quirinal

Il explore un monde nocturne de rêveries fantômes inspiré par les légendaires héros nordiques des poèmes ossianiques que James Macpherson avait « découverts » et publiés en 1760-1763

Ossian excitait l’imagination d’une grande partie du monde occidental

Les poèmes de l’Homère du Nord comme on appelait Ossian devinrent le pendant nordique d’un passé méditerranéen primitif,  puissant et lointain, dont les gestes héroïques et les batailles avaient trouvé un chantre au style poètique vigoureux et obsédant

Accompagné seulement de deux chiens qui aboient dans un paysage nordique désert et rocheux, au bord de la mer, le vieil Ossian, aveugle comme Homère, a cessé de chanter et appuyé sur sa harpe et sur un rocher il est tombé dans un profond sommeil

Des boucles blanches qui couronnent le front du poète, surgit une vision froide des sceptres nordiques

Ils planent portés par les nuages au-dessus d’Ossian qui lui est sur terre

Contraste chromatique de leur grisaille d’ectoplasme avec les verts et les roses qui colorent la robe du poète et le ciel nocturne

Comme transition avec ce royaume de la mort qui donne le frisson, Malvina, veuve du fils d’Ossian, Oscar, mort massacré tend un bras pour un geste de consolation

Starno, le Roi des Neiges, trône au centre

Voluptueuse souplesse des harpistes et des héroïnes enlaçant leurs guerriers-amants

Inquiétant mélange sous la clarté lunaire de l’érotique et de l’héroïque, avec ces sirènes fantomatiques et cette troupe militaire

Cette troupe est la contrepartie nordique de celle de Romulus

Raphël et la Fornarina   1814

Ingres vouait une grande vénération à Raphaël

En 1812 Ingres projetait de réaliser une série de tableaux illustrant les épisodes de la vie de Raphaël

En fait il ne réalisa que le fiançailles de Raphaël avec la nièce du cardinal Bibbiena (1813) et la représentation de son amour pour celle qu’on appelait la Fornarina, la fille du boulanger

A la fin du 18ème siècle était née la tradition de peindre des sujets tirés de la vie des grands artistes comme s’ils étaient des saints modernes

Nous voyons l’atelier de Raphaël au moment où celui-ci peignait la Fornarina

Elle semble à la fois étreindre l’artiste et s’en éloigner

Elle semble assise en même temps sur les bras du fauteuil et sur les genoux de Raphaël

Par la fenêtre on aperçoit le Vatican et la vieille basilique Saint-Pierre d’avant Michel-Ange

Contre le mur on reconnaît « La Vierge à la chaise »

Pour représenter Raphaël, Ingres a copié l’autoportrait du maître qui se trouve au Musée des Offices

Les contours froids et fermes de la Fornarina tiennent plus de la facture d’Ingres que de la chaleur des portraits de Raphaël

Notre attention, comme celle de Raphaël, est partagée entre la présence palpable de la femme et la représentation picturale sur la toile

La tension entre l’art et la réalité est accrue par le tableau de la Madone en arrière-plan qui porte aussi un turban

Le tableau de la Madone et le tableau de la Fornarina sont coupés de la même manière

Plancher fortement incliné

Les personnages de Raphaël et de sa bien-aimée sont saisis d’un trait fin et souple

L’intérieur de la Chapelle Sixtine   1814

L’affaiblissement de la foi chrétienne dans la société moderne eut de profonds retentissements dans l’art religieux

L’artiste, plus spectateur que chrétien, représenta des scènes du rituel chrétien.

Des cathédrales, des processions commençèrent à remplacer les images surnaturelles de l’art chrétien

Le jeune Ingres a été grisé par la splendeur de l’art catholique et de ses cérémonies

En avril 1807 il fut bouleversé par un miserere chanté de la tribune de la Chapelle Sixtine

Ce tableau commandé par M. Marcotte représente le Pape Pie VII en train de célébrer l’office du Jeudi Saint

Il décrit le Pape et sa suite de cardinaux dans une pose oblique

Le Pape, au centre et tout de blanc vêtu, est traité comme une miniature

On ne voit qu’un quart du Jugement Dernier

Chaude lumière

Tonalités d’ors, de rouges et de bruns

Le spectacle rappelle les splendides processions religieuses des maîtres de la Renaissance vénitienne

L’échelle diminuée fond les détails riches des personnages, des vêtements sacerdotaux et de la décoration du mur

Une forte disposition au conservatisme le poussa à faire des efforts pour perpétuer la gloire passée de l’art chrétien

La Grande Odalisque   1814

Nu le plus fascinant qu’ait peint Ingres

Tableau commandée par la sœur de Napoléon, Caroline, reine de Naples

Les critiques l’associèrent à la Venus d’Urbino du Titien qu’Ingres ne copiera qu’en 1822

La complexité de la pose se rapproche du type de figure établi par Michel-Ange pour la Tombe de Julien de Médicis

Ingres connaissait ce type de figure de Michel-Ange par David qui s’en servit dans son portrait de «  Mme Juliette Récamier »

La complexité érotique décontenance mais séduit le spectateur

Oisive créature de harem dont les pieds n’ont jamais été souillés par la marche l’odalisque est exhibée passivement pour notre délectation

Pourtant elle se dérobe à notre regard, cachant tout d’elle, sauf le dos

Tête vue presque de profil fortement illuminée

Mais un œil et une joue sombres, presque vus de face ( préfiguration de Picasso ? )

Elle nous renvoie notre regard avec une combinaison de franchise et d’obliquité

Elle repose avec une orientale langueur dans un luxe de soies, de fourrures et de plumes

La  tête se tient bien droite, maintenue par la verticale de la ligne du cou

Le poids du haut du corps est porté par le triangle tendu du bras gauche tendu auquel fait écho la forme du coussin

La jambe gauche croise la droite dans une tension précaire

Contraste entre la froideur des accessoires et la chaleur rosée de la peau

La chair volupteuese et souple semble avoir été polie pour ressembler à du marbre

Mélange d’oppositions : molesse et fermeté, chaleur et froideur

Les crititques reprochèrent à l’Odalisque trois vertèbres de trop ; ces vertèbres avaient permis l’élongation de la colonne vertébrale et l’amélioration de la courbure du dos

Sont enregistrés avec une précision photographique : la pipe, le brûle-parfum, les plusmes, la boule de perle de la ceinture, le dessin floral sur les rideaux bleus, les plis du drap et les glands dorés du turban

Les Fiançailles de Raphaël    1813-1814

Ingres nourrissait un véritable culte pour Raphaël dont il avait tout au long de ses études assimilé les poses et les détails iconographiques

Quand Ingres peignit ce tableau il épousait à Rome, Madeleine Chapelle, avec laquelle il s’était fiancé par correspondance sans jamais l’avoir vue, mais qui se révélera une épouse fidèle et une compagne prévenante

Raphaël avait l’intention d’épouser la vertueuse nièce du cardinal Bibbiena mais de santé fragile il mourut avant les noces

Il n’avait pas envisagé d’épouser la Fornarina, symbole de l’inépuisable mystère de la beauté féminine

De même Ingres a partagé sa vie avec une épouse attentive et affectueuse en réservant à la peinture la sublimation et le triomphe du charme féminin

Avec sa femme Madeleine il partira pour Naples au printemps 1814 pour rejoindre la cour de Caroline Murat, commanditaire de ce tableau, l’une des premières peintures de reconstitution historique et exemple du genre troubadour

Le cardinal Bibbiena avait offert pour épouse à son ami Raphaël sa propre nièce

Les silhouettes sont placées dans des poses d’une gestuelle éloquente

Le cardinal prenant avec la main droite celle de Raphaël, ouvre la main gauche comme pour unir les mains des deux jeunes gens

La jeune fille se tient les bras croisés dans une attitude pudique et réservée

Pour le visage de Raphaël, Ingres s’est inspiré d’un portrait considéré à l’époque comme un autoportrait

Le cardinal, lui, est élaboré d’après un portrait de Raphaël conservé à Florence

Portrait de Madeleine Ingres enceinte   1814

Après des déboires sentimentaux, Ingres jeta son dévolu en 1813 sur l’épouse du greffier en chef du tribunal impérial à Rome.

L’épouse trouva judicieux de détourner l’enthousiasme du peintre à son égard en lui faisant miroiter la possibilité d’une union avec une cousine, Madeleine Chapelle

Il commença donc une correspondance avec Madeleine, âgée de 31 ans, qui était installée à Guéret où elle tenait une boutique de mode après avoir assisté sa sœur et son beau-frère dans l’éducation de leurs enfants puis dans la  tenue de leur café où elle fut un temps caissière

Ingres se décrit « … des vices on ne m’en connaît point, je n’ai ni fortune ni belle figure, mais j’ose dire un talent distingué et connu … Je suis naturellement doux de caractère et cependant la colère s’empare aisément de moi … Je ne suis ni triste ni gai, quelquefois préoccupé de mon art, ce qui est bien naturel quand on est passionné comme je le suis … »

La fiancée arriva à Rome en octobre 1813. Ingres se rendit au devant d’elle et la renconta près du tombeau de Néron

Le mariage célébré le 4 décembre devait durer près de 36 ans et il semble que l’union ne fut obscurcie d’aucun nuage

Ingres était d’un caractère aussi enthousiaste que nerveux, prompt  à s’emporter, se sentant facilement persécuté, s’enthousiasmant pour des œuvres d’art de trois sous comme pour des chefs-d’œuvre, généreux avec les mendiants comme avec ses élèves

Cette union parfaite ne connut que l’amertume de demeurer sans descendance car Madeleine accoucha en 1814 d’un enfant mort-

La reine Caroline Murat    1814

Portrait exécuté quelques mois seulement avant la chute et la mort de son époux

En fond la baie de Naples et le Vésuve

Influence des grands modèles de portraits royaux en pied

« Je viens de voir mes appartements, je les trouve charmants ainsi que la terrasse »

La reine tout habillée de noir et tenant dans sa main un petit carnet intime pode debout devant une table sur laquelle ne se trouve qu’une clochette

Plis compliqués de deux rangées de rideaux

Lumineuse vue de la baie de Naples où l’on aperçoit la  mer d’un bleu intense et  une myriade de petites maisons blanches construites au pied du Vésuve d’où s’échappent de lourdes volutes de fumées blanches

Contraste raffiné du bleu, des verts et du noir

Composition élaborée à partir de :

- larges croisillons des vitres de la baie située derrière la reine

- horizontales crées par les divers plans successifs (bas du mur, rebord de la fenêtre, terrasse, balustrade de la terrasse, ligne du rivage, horizon autour du volcan)

- verticales toutes en courbes des rideaux qui accompagnent et soulignent le corps gracieux de Caroline Murat

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