La parade - 1980


Les écuyères, les trapézistes, les équilibristes et les clowns musiciens évoluent sur un fond tricolore bleu, rouge et jaune-vert


Clown à l'âne - 1927-1928


Dans les scènes de cirque Chagall récuse le réalisme

C'est le clown qui porte l'âne

Ces gouaches du cirque lui permettaient d'illustrer une idée drôle ou fantastique sous couvert de scènes de cirque

Ces gouaches servirent aux lithographies du livre Cirque édité en 1967 par Tériade

L'Ecuyère - 1927


Vollard demanda à Chagall des illustrations sur le thème du cirque

Ils allaient tous les deux au Cirque d'Hiver captivés par ce monde que Chagall aimait depuis son enfance

A partir de 1927 Chagall réalisa 20 grandes gouaches sur le thème du cirque


Dans l'attitude chaste de la Venus allongée, l'écuyère est étendue sur son cheval blanc, nue et immobile, vivante imitation d'une statue antique

Mais la main qui recouvre sa féminité tient le bouquet de fleurs qui appartient à  la diva du cirque

Au-dessus de la femme nue qui semble se prélasser sur son cheval blanc apparaît la voûte du ciel sur laquelle se trouvent deux lunes : une blanchâtre et l'autre dorée

Le blanc du cheval et du corps féminin se change alors en éclairage astral

L'Acrobate - 1930


Le cirque est l'image du monde et Chagall le peint depuis longtemps

En 1927 il avait peint 19 gouaches pour Ambroise Vollard

Les impressionnistes avaient vu dans le cirque la légèreté, l'insouciance, un art non guindé, frère du café-concert

L'Acrobate en maillot rouge bariolé est une jolie jeune femme qui a un air de Bella

Elle est assise paisiblement sur un trapèze, sur un fond de décor de rue, ce qui accentue sa signification allégorique

La tête de l'amoureux qui s'approche descend du ciel

L'acrobate est un personnage de cirque sans cesse à la recherche d'un équilibre, au bord de la chute : une figure de la destinée humaine

Comme l'acrobate l'artiste se tient sur ce fil où l'harmonie est une conquête de chaque instant

L'Ecuyère - 1931


Le thème du cirque sous un extérieur classique avec la beauté, l'élégance et une certaine douceur

Chagall considère comme valeur positive "le décoratif" pratiqué par un maître comme Matisse

Devenu un peintre célèbre Chagall vécut alors une époque heureuse dans la société mondaine parisienne

Le personnage gracile de la jeune écuyère est installé dans une attitude tranquille sur le caparaçon richement décoré de son cheval

Le rose mat de son habit et le rouge de son éventail sont les seuls accents colorés élevés

Cheval blanc de légende qui dans notre imagination enfantine était chargé du fardeau précieux de la belle princesse.

Sa tête retient un violon paré de fleurs

Le jeune amoureux en habit de velours tient l'écuyère dans ses bras

Ce double personnage reposant sur le large socle que constitue le cheval blanc remplit presque toute la surface de la toile

En haut à gauche un petit personnage joue sur son violon une mélodie d'amour

En bas à droite un clown, une vache et un coq devant le décor d'un village

La couleur est floconneuse même si les contours sont nets

Le rouge de l'écuyère  ramène sans arrêt à sa beauté

L'âne à la Tour Eiffel - 1927


Vollard avait une loge au Cirque d'Hiver qu'il faisait partager aux artistes qui travaillaient pour lui comme Picasso et Chagall

Chagall avait été formé dans la piété hassidique qui prône la joie et fait de la danse et de la musique une prière

Dans les gouaches du cirque il laisse libre cours à sa fantaisie et n'a nul souci de réalisme

Ce n'est pas une écuyère sur le dos de l'âne mais la Tour Eiffel munie de jambes


Le Grand Cirque  - 1968


Le cirque représente l'irruption du fantastique dans la grisaille quotidienne

Quand la première place  ne revient pas aux animaux ce sont les exercices d'équilibre et de voltige qui l'occupent

Atmosphère enchantée de l'univers chagallien où la parole est donnée à l'animal et où le geste le plus naturel relève de l'acrobatie

Des hauteurs du chapiteau un ange se penche sur la foule alors que dans un arc de cercle la main de Dieu, telle que la représente la tradition byzantine, bénit la scène

Pour les juifs pieux hassidiens une parcelle de l'illumination divine participe toujours à la vision de l'artiste

Surfaces latérales colorées de vert froid

Sur la piste une écuyère debout sur un cheval à tête de coq joue du violon

A droite un clown souffle dans une clarinette et un ange aux ailes gigantesques se précipite de la zone céleste. La mitre et l'objet de culte indiquent qu'il s'agit d'un messager divin

Le cheval céleste cherche une relation amicale avec son compagnon de cirque à tête de coq

Dans le rectangle bleu nocturne en haut à droite l'écuyère se transforme en ange nuptial

Si l'enchevêtrement des figures suscite une légère confusion, la distribution des couleurs propose une lecture en séquences nettement compartimentées, à la manière des icones

La dominante blanche et noire se détache avec d'autant plus de force que les tons vifs sont réservés aux bords de la toile comme des rideaux qui seraient écartés pour laisser voir la présence divine planant sur le monde du cirque

L'élan des courbes en mouvement donne au tableau un caractère solennel

Le temps n'a point de rives - 1930-1939


De cette œuvre se dégage une atmosphère étrange : la pendule qui vole et le poisson dans les airs créent une ambiance surréaliste

Assemblage d'éléments disparates dont le rapprochement suscite une atmosphère onirique, c'est-à-dire de rêve

Le poisson et l'horloge sont des souvenirs d'enfance que l'on retrouve dans le paysage de Vitebsk

Chagall abolit les lois de la pesanteur pour nous présenter les images de son rêve

Le poisson joue du violon

Un couple d'amoureux s'ébat sur la berge

L'horloge ravie dans les airs figure la fuit du temps

Le songe d'une nuit d'été - 1939


Chagall aimait la comédie de Shakespeare

Nous reconnaissons dans le couple Tatania et la créature tête d'ours

La créature à tête d'animal embrassant une mariée est un motif souvent utilisé par Chagall

Chagall a décidé le titre après avoir réalisé la toile qui vit le jour comme une création indépendante

Atmosphère sérieuse et tendre

La créature essaie de protéger la mariée immobile et de trouver protection auprès d'elle. Cela correspond à la période de difficultés et d'angoisse vécue par le peintre

La structure de la composition est fixée par la couleur

La couleur s'affirme sans tenir compte de la vraisemblance : le bleu de la terre, l'arbre fleuri, le rouge vif de l'ange

La poésie pure de la couleur passe au premier plan

La composition axée sur la triple verticalité des deux figures et de l'arbre est statique

Les personnages au regard perdu semblent exprimer une relation d'absence

Le petit ange rouge évoque la tentation

Il provoque une tension par son opposition avec la chasteté de la mariée en blanc

Les mariés de la Tour Eiffel - 1932-1939


La mariée vit un moment de bonheur avec son mari qui la tient dans ses bras tandis que les emporte doucement un  poulet blanc aussi grand qu'eux

L'animal est arrivé tardivement dans le bestiaire de Chagall aux côtés de la vache, de la chèvre et de l'âne

C'est aussi l'animal totémique du nouveau pays de Chagall, français depuis peu

La Tour Eiffel aussi est un symbole national. Chagall a aimé Paris avant la 1ère Guerre Mondiale quand il était amoureux d'une fiancée lointaine. Il a tout fait pour y revenir alors qu'il était coincé en Russie

Paris est le lieu où il peut être à jamais le jeune marié de Bella

Dans une épaisse nuée apparaît leur mariage juif quand ils sont sous le dais à Vitebsk en 1915

Un ange musicien les accompagne sur le dos du volatil animal

Un autre ange sort d'un arbre, la tête en bas et brandissant un chandelier

L'âne musicien est aussi de cette partie joyeuse


Chagall à la veille de la Seconde Guerre n'était pas dupe de l'état du monde

Mais c'était cette image du bonheur qu'il gardait en lui

En 1941 Chagall aura du mal à accepter l'idée qu'il lui fallait encore s'exiler aux Etats-Unis

La madone du village - 1938-1942


Marie, en mère de l'Enfant Jésus est la vedette féminine de l'iconographie chrétienne

Marie, heureuse de tenir son fils dans ses bras, est la mère universelle

Au lieu de son habituelle robe bleue Marie porte une robe et un voile blanc, qui font d'elle une éternelle mariée

La robe blanche est le signe de la virginité requise pour le mariage et celle qui sera toujours vierge peut bien continuer de la porter


L'homme qui descend du ciel sans pesanteur n'a pas l'air d'un ange : Saint Joseph qui aime la femme qu'il n'a pas touchée

La Madone n'est pas sans rapport avec Bella

Avec Bella et Ida (22 ans) il a l'expérience d'une trinité bien humaine

Le village est moins typé que lorsque Chagall peignait des shtetl

Un âne violoniste est la seule allusion faite par Chagall à son imagerie personnelle


La Madone est pour le village une divinité céleste et la Vierge manifeste l'attention qu'elle lui porte

La Madone conjure le mauvais sort qui met le monde à feu et à sang

Elle est l'espérance qui jamais ne quitte Chagall


La guerre - 1943


Chagall s'arrache à son art du bonheur, de l'amour, de la spiritualité pour exprimer sa douleur d'homme aux prises avec l'histoire

Une nouvelle guerre l'a chassé de France. Il a dû encore s'exiler, soumis à ce destin des juifs sans patrie

De justesse il est parti pour les Etats-Unis et put grâce à Ida emporter un lot important d'œuvres

En novembre 1941 Pierre Matisse organisait une grande exposition de ses œuvres

La destruction de Vitebsk qu'il n'avait pas revu depuis plus de 20 ans le bouleversa

Chagall a peint la guerre dans une facture qui le ramenait des décennies en arrière quand il peignait des rues de village et des isbas

Le ciel est plein de flammes et de fumée

Il faut fuir : ce que va faire le chariot dont le cheval se cabre

Ce que va faire aussi la mère, forte, solide, qui emporte son enfant sur un traîneau

Seul reste au milieu de la rue du village, le Mort qui nous rappelle celui étalé dans un des premiers tableaux de Chagall

Aleko - 1942


Extrait des Tziganes de Pouchkine, Aleko est un ballet créé sur une musique de Tchaïkovski

Aleko, beau jeune homme de Saint Petersbourg, tombe amoureux de Zemphira la gitane. Mais cet amour impossible finit par altérer sa raison et il va jusqu'à tuer celle qu'il aime, accomplissant ainsi son destin qui le voue à l'errance perpétuelle


Le bleu profond d'un ciel nocturne éclairé par la pleine lune, préfigure l'espace infini de l'errance

Annonciation du jour nouveau, le coq rompt par l'éclat de sa couleur rouge la sensation de noyade que suscite le geste désespéré du héros qui tente de saisir sa bien-aimée

Plumes en fleur - 1943


Le peintre fait du coq le signe de la séduction féminine, tout en rondeur, orné d'un collier de perles et capable de métamorphoser ses plumes en fleurs

Le coq fait partie du bestiaire de l'artiste comme le poisson, la vache, la chèvre et l'âne


Ici la vache prend une allure humaine avec ses jambes et son air débonnaire qui confirme son image biblique de bête paisible et humble

L'agressivité du coq au bec acéré et au corps vigoureusement brossé dans un mouvement tournoyant se trouve tempérée par le doux regard du quadrupède esquissant un pas de danse

A ma femme - 1933-1944


Chagall avait réalisé en 1933 une première version où les éléments colorés contrastaient vivement avec les figures

Dans cette seconde version de 1944 le peintre opte pour une lumière diffuse unifiant l'ensemble des éléments hormis la forme claire du nu


1944 est l'année du décès de Bella

Ce tableau apparaît comme une anthologie de l'iconographie de Chagall :

- le nu allongé

- le couple des mariés

- les maisons de Vitebsk

- les violonistes

- l'horloge ailée du Temps n'a point de rives

- la forte présence animale


Chagall affirme dans ce tableau le rapport chromatique rouge-bleu qui  dominera dans de nombreuses œuvres postérieures


Autour d'elle - 1945


Bella Chagall mourut subitement le 2 septembre 1944 et Chagall fut accablé de chagrin. Elle avait été son grand amour et son soutien le plus constant dans sa pratique artistique et dans les contraintes de la vie quotidienne

Chagall à New York était perdu, ne touchant plus un pînceau

Ida, sa fille bien aimée, très attentive à la vie et au travail de son père veillait sur ce grand enfant de 57 ans incapable de vivre seul

Au cours de l'été 1945, désireuse de prendre des vacances avec son mari elle engagea la fille d'un diplomate anglais qui était l'épouse d'un peintre dépressif : Virginia Haggard, qui avait l'avantage de parle couramment le français alors que Chagall ne s'était pas soucié d'apprendre l'américain

Elle passait ses journées dans l'appartement et Chagall qui aimait faire la conversation en peignant se sentit en confiance et l'amitié se transforma en liaison amoureuse


"Autour d'elle" est le premier grand tableau qui évoque Bella après sa disparition

Dans un grand bleu nocturne le peintre jeune a la tête renversée et la palette à la main

La femme songe devant une vue de Vitebsk éclairée par la lune

Un couple de marié s'envole dans les feuillages

Un ange descend du ciel et ouvre le ciel sur la vue de Vitebsk

Un oiseau balourd porte une bougie

C'est le témoignage d'une Bella toujours vivante qu'il ne cessera d'évoquer bien que vivant avec Virginia et plus tard se remariant avec Vava

Il dira "Ce passé je me suis efforcé à ce qu'il devienne capable d'agir dans ma peinture"

La chute de l'ange - 1923-1933-1947


Il fallut 25 ans à Chagall pour réaliser définitivement ce tableau

Cet ange est une évocation allégorique des années sombres d'après 1933 et de la guerre qui suivit

Chagall réagit aux événements, pas avec des discours, mais en peintre avec ses tableaux


L'ange, une femme à la poitrine dénudée, symbole de la force vitale, est abattu et sa chute provoque un bouillonnement qui détruit l'équilibre du monde et entraîne le chaos


La Chute de l'ange est une œuvre clé de Chagall parce qu'elle est délibérément allégorique

Le modernisme abstrait aura au long du 20ème siècle refoulé l'allégorie

La restaurer c'est se placer en marge de la modernité

Mais c'est aussi affirmer que l'art peut tenir un discours sur le monde


Une lumière sombre faite de bleu foncé et de blanc éclaté éclaire le paysage

L'ange traverse l'obscurité dans sa chute, les ailes déployées

L'ange partage le sort qui sera celui du monde à cause de sa chute


Il entraîne avec lui l'horloge de l'histoire et le simple mortel qui parcourt le monde (en haut à gauche)

Le rabbin en costume solennel violet s'empare de la Torah pour la soustraire à la colère divine

En arrière-plan les toits de Vitebsk


La couleur doré de l'astre et d'une créature innocente indiquent qu'il existe dans ce désastre une lueur d'espoir

Un petit violon bleu joue à part


La couleur du cercle doré de la bougie répond à celle de l'astre

A droite le crucifié ceint du châle de prière juif et une mère et son enfant qui sort du vêtement de l'ange déchu

Le Christ est une allégorie de la souffrance humaine


Ce tableau présente la colère de Dieu mais il reste un Dieu d'espérance et d'amour

La madone au traîneau - 1947


Ce tableau fait partie des œuvres de transition après la disparition de Bella et le bonheur d'une paternité tardive

Au premier plan en bas une femme au visage grave est allongée, portant un enfant nimbé dans les bras


L'enfant pourrait être le Christ comme le laisse entendre le titre donné par l'artiste

Dans la partie supérieure un traîneau, tiré par un cheval qui semble voler comme dans un rêve, traverse le tableau

Chagall a séjourné en 1944 avec Bella dans une région de vastes forêts étendues sous la neige ce qui le replonge dans les paysages de sa jeunesse

C'est là que Bella, victime d'une infection mal soignée disparaît en très peu de temps


L'année suivante Chagall se lie avec Virginia Mac Neil qui lui donne un fils, David

Chagall "C'est Bella qui t'a envoyée pour veiller sur moi"


Deux autres personnages féminins apparaissent en haut à droite

L'enfant nimbé tient le sein de sa mère serré entre ses bras. Chagall malgré le titre pense à son fils nouveau né

La dimension fantastique résulte de la juxtaposition d'éléments, animaux, personnages et décors dont les dimensions sont fixées en fonction de leur importance dans le rêve de l'artiste

Le violoniste bleu - 1947


En 1947, à 60 ans, il était père d'un petit garçon David dont la maman Virginia avait l'âge de sa fille Ida

L'idée d'être père ne l'avait pas réjoui mais Virginia avait tenu bon et il tenait à Virginia

Il fut séduit par le bébé qui ne portait pas son nom car la mère était mariée et ne parvenait pas à dissoudre ce mariage


En 1946 il avait passé trois mois à Paris où le Musée d'art moderne avait organisé une importante exposition

Il avait repris goût au travail

Le violoniste bleu, l'éternel musicien du monde yiddish joue dans le ciel en compagnie des oiseaux, l'œil grand ouvert, le visage serein

A ses pieds c'est Vitebsk dans une nuit claire

Le bleu n'est pas un bleu froid mais un bleu profond, dense, qui se marie avec des rouges éclatants


La couleur est sa grande préoccupation : il lui donne de nouvelles transparences et allège son dessin pour qu'il ne lui fasse plus obstacle

Il voulait se consacrer à une peinture heureuse.

Il lui arrive quelques désillusions : Virginia le quitte pour un photographe belge

Il a déclaré "Je veux que la couleur joue et parle seule"

Il a renoncé au dessin pour laisser chanter la couleur

Le bœuf écorché - 1947


Chagall a écrit dans "Ma Vie" : "Dans l'étable de mon grand-père se trouve une vache ventrue … le boucher en blanc et noir, le couteau à la main, retrousse ses manches … et lui redressant le cou, il lui enfonce l'acier dans la gorge"

Chagall aura attendu plus de 50 ans pour mettre en peinture ce souvenir d'enfance


Plus qu'une nature morte il s'agit d'exprimer la piété de la peinture envers ceux qui ont été tués pour que des hommes se nourrissent


Dans son enfance pendant les voyages avec son oncle Neuch, le marchand de bestiaux, ou dans la boucherie de son grand-père, il avait regardé abattre les bêtes selon le rite juif


Son premier atelier à La Ruche se trouvait près des abattoirs de Vaugirard

"Pas très loin d'ici on commence à égorger les bœufs, les vaches crient, et je les peins"

Gigantesque le corps de la bête est suspendu en croix devant le décor nocturne

La bête écorchée semble exprimer sa volonté de vivre en lapant son propre sang

Un coq terrifié s'enfuit

Le drame se joue devant un village russe par une nuit claire d'hiver


Le colosse solitaire est comme une offrande sacrée offerte pour protéger le village dont on voit l'emboîtement des cabanes


La tête d'une paysanne surgit d'un toit

En haut à droite, un juif barbu vole vers nous

Son couteau plein de sang indique que c'est le boucher qui a accompli son sacrifice mais c'est aussi le prophète qui proclame que l'homme ne connaît la paix que par le sanglant sacrifice des innocents


Ce tableau est une variante du thème de la crucifixion

Comme les sertissures de plomb d'un vitrail des contours noirs isolent chaque zone de couleur

Résistance - 1937-1948


Résistance est le premier de trois tableaux issus d'une œuvre datant de 1937 marquant le 20ème anniversaire de la révolution russe

Chagall s'était jeté avec fougues dans le renouveau attendu de la révolution

Mais dès 1922 il voit l'antisémitisme renaître et décide de son départ

En 1943 sous la pression de l'occupation nazie en France il se réfugie à New York


L'angoisse suscitée par la guerre et ses répercussions dans la région de Vitebsk ont provoqué un changement dans son travail


La présence du Christ, juif sacrifié, symbole de la douleur imposée à l'homme devient obsédante dans ses peintures

Le fond rouge insiste sur les malheurs de la guerre


Résistance met l'accent sur la violence des incendies qui ravagent le village plongé dans l'ombre, au bas du tableau, où flotte doucement la pendule, souvenir du foyer familial

Une foule agitée s'échappe en désordre


Composition soulignée par de larges formes géométriques intensifiées par la couleur


Chagall s'est représenté en peintre gisant à terre

Résurrection - 1937-1948


Résurrection insiste davantage sur la déception qui a suivi la révolution

Un personnage en haut élève une lumière au-dessus de la foule, célébrant l'avènement de la liberté

Mais plus bas sur un fond blafard de neige, c'est un juif s'accrochant à la Torah et une femme fuyant avec son enfant et appelant au secours, bras tendu vers le Christ, qui entourent la croix


La tragique histoire du peuple juif continue et le seul espoir réside dans l'amour divin ainsi que dans l'amour humain matérialisé par la lampe, symbole de la chaleureuse intimité du foyer familial

Ventre rond soigneusement souligné du Christ

Dynamisme créé par les obliques

Chagall s'est représenté en peintre renversé le long des jambes du Christ

Libération - 1937-1953


Dans ce tableau l'artiste raconte ce qui faisait la saveur de sa vie dans son Vitebsk natal :

- la maison familiale

- la célébration du shabbat

- la célébration du mariage

- les clowns et le violoniste


Tous ces souvenirs tournent autour d'une cible rayonnante dont le centre est rouge comme un cœur

Chagall s'est représenté au chevalet à la place de celui qui recrée un monde disparu

L'Odyssée - Ulysse et Nausicaa  -  1973-1975


Cette lithographie représente Nausicaa dans la splendeur de sa nudité découvrant Ulysse couché, aussi nu qu'elle

Un superbe cheval rouge s'apprête à ramener le linge lavé par les compagnes de Nausicaa

Un bouquet de roses rouges anime le coin droit de la lithographie

L'Odyssée - Polyphème  -  1973-1975


Cette lithographie montre le cyclope Polyphème, fils de Poseidon, dieu de la mer, mangeur de compagnons d'Ulysse, aveuglé par celui-ci


Ulysse et ses compagnons lui enfoncent un pieu dans son œil unique


Chagall atténue l'horreur de cette scène : point de caverne sinistre, de sang, de membres humains déchiquetés


Le cyclope a même trois yeux

On voit Ulysse et son pieu et deux de ses compagnons, mais aussi des arbres et des oiseaux


L'Odyssée  -  Les Sirènes  -  1973-1975


Les sirènes charmaient par leurs chants tous les mortels les approchant qui s'échouaient mortellement sur les rochers


Circé conseille à Ulysse la cire pour boucher les oreilles de ses compagnons

Elle lui conseille aussi de se faire lier solidement au mât lorsque son navire passerait à portée de leurs voix


Chagall a dessiné les sirènes avec et sans ailes

Daphnis et Chloé - Découverte de Daphnis - 1958-1961


Après son mariage avec Vava le 12 juillet 1952, Chagall et sa femme partirent pour la Grèce

Chagall fut subjugué

Teriade suggéra à Chagall d'illustrer les Pastorales de Longus relatant les amours de deux enfants abandonnés, nourris par une brebis et une chèvre

En 1954, avec Vava il retourna en Grèce


Un chevrier nommé Lamon gardant son troupeau trouva un petit enfant qu'une de ses chèvres allaitait

Quand la nuit fut venue il prit l'enfant qu'il conduisit à sa femme Myrtale et tous deux, d'accord de l'élever, dirent partout qu'il est à eux et l'appelèrent Daphnis


Dans la verte campagne méditerranéenne (oliviers et cyprès) avec au loin une ville (Mytilène) une chèvre blanche veille sur un enfant (Daphnis) pendant que son chevreau, à droite, est esseulé

A l'écart un troupeau et Lamon qui lève la main dans un petit geste d'étonnement


Chagall fait de Lamon un personnage gulliverien se dressant derrière une colline lointaine sans que ses dimensions ne subissent le rétrécissement dû à l'éloignement

Les équilibristes - 1984


En 1984 Chagall, 97 ans peignait cinq heures par jour

Puissance des couleurs et fraîcheur de la lumière

Univers en apesanteur où tout vole dans la joie

Projet pour le ballet Aleko - 1942


New York fascine Chagall

Il n'apprit jamais l'anglais mais parlait yiddish avec les petits commerçants de Manhattan

Le chorégraphe russe Hassine lui commanda un décor pour son balle Aleko sur une musique de Tchaïkovski

La 1ère représentation eut lieu le 10 septembre 1942 à Mexico


Pour ce tableau final Chagall eut l'idée d'une sorte d'apothéose de la condition du poéte

Sur un fond rouge une ville de style italien

A gauche une colline avec un cimetière

Un ciel immense assombri de nuages d'orage

Un cheval blanc tirant une voiture qui ressemble à un char homérique bondit à travers l'obscurité

Il s'élève vers un astre apaisant qui cache le chandelier à sept branches

C'est l'âme du poète, purifiée par la violence et la mort, qui parvient à la délivrance


Pendant les années américaines de Chagall se renforce la force descriptive de la couleur

Le jongleur - 1943


Le Jongleur est une des toiles principales des années de guerre passées en Amérique

Elle montre une danseuse de cirque, la jambe repliée très haut, dont la tête est une tête d'oiseau

L'allure et l'expression du personnage sont celles d'un coq

Il porte deux ailes d'ange d'un blanc brillant

La partie inférieure du personnage est du domaine féminin : cela est signifié par le bleu de cobalt nocturne


La tête du coq symbolise le domaine masculin et les ailes blanches le domaine divin

L'essence de l'artiste est d'être homme, femme et dieu


La pendule murale démodée symbolise l'écoulement du temps

La figure prend ses racines dans un cercle qui pourrait être une piste de cirque (la petite écuyère) mais la maison et la clôture pourraient signifier qu'il s'agit du globe terrestre avec un arc en ciel sur la droite

Autour de ce cercle une piste avec des spectateurs

Un être mi-femme mi-cheval abaisse son regard vers la piste ou le globe


Il est fier de montrer sa prestance au public

En haut à droite une trapéziste qui porte un voile de mariée

Ce personnage symbolise l'être de l'artiste

Il est enraciné dans la terre mais entouré par le cosmos

Il est à la fois femme, homme et dieu

Il oppose à la fuite du temps des images durables


Le Jongleur se joue des lois de la pesanteur qui toujours été une obsession pour Chagall

Il est un acteur d'un théâtre sans parole et Chagall était un homme de peu de mots, pris dans le silence de la peinture


Le tableau fut peint en 1943 : il peignait contre le malheur du monde dans un élan de rêve qui est le meilleur remède contre le désespoir

C'est une image de lui ce personnage lumineux qui n'a pas la lourdeur des autres hommes et a conquis la légèreté toute relative de l'acrobate mais est toujours incapable de voler comme le coq de basse-cour


Une femme au double visage humain et chevalin l'observe, drapée de noir

C'est la mort qui guette tout homme

Les lumières du mariage - 1945


Bella mourut le 2 septembre 1944 d'une infection virale inoffensive à ses débuts mais mal soignée

Pour Chagall désemparé il n'était plus question de peinture

Il ne revint à la peinture qu'au printemps 1945


Il reprit un tableau de 1933 et le coupa en deux : la partie gauche devint le tableau "Autour d'Elle"

La moitié droite constitue "Les lumières du mariage"

Le cortège nuptial sort du village russe devant le soleil couchant


Un lustre aux bougies allumées est suspendu au-dessus du dais nuptial dans une lumière verdâtre

Sur la place jouent isolément quelques musiciens

La silhouette blanche de la mariée se dirige vers le bleu nocturne où elle est accueillie par un couple d'amoureux, un coq de légende et un personnage ailé à tête de chèvre qui lui souhaite la bienvenue un verre à la main

En haut un joueur de trompette céleste

La petite forme de la mariée symbolise l'épouse juive et elle réapparaît souvent sous cette forme dans les tableaux suivants

L'Odyssée - Protée  -  1973-1975


Chagall a illustré l'Odyssée éditée en deux tomes par Fernand Moulot

L'Odyssée raconte les péripéties du retour d'Ulysse après la guerre de Troie pour revenir auprès de Penelope dans son Ithaque natal


Cette lithographie représente Protée : dieu marin


Protée révèle à Menelas qu'Ulysse est retenu prisonnier par la nymphe Calypso, ce qui permet à Menelas de l'apprendre à Telemaque, fils d'Ulysse, parti à la recherche de son père

Daphnis et Chloé - Songe de Lamon et Dryas - 1958-1961


Deux années après la découverte de Daphnis par Lamon un berger nommé Dryas découvrit une petite fille allaitée par une de ses brebis

Avec sa femme Napé ils décidèrent que cette petite fille serait leur fille, la nommant Chloé


Quand les enfants eurent 15 ans, Lamon et Dryas songèrent que les Nymphes livraient Daphnis et Chloé aux mains d'un jeune garçonnet fort beau qui avait des ailes aux épaules et portait un petit arc et de petites flèches


Dans le lointain sous le soleil couchant, Mytilène devant la mer

Dans une énorme bulle bleue le garçonnet qui est Eros, le dieu de l'Amour

Un poète vert et sa lyre court sur la bulle tel un diablotin


Puisque le texte des Pastorales précise qu'ils firent le même songe Chagall leur fit une même tête

Une seule tête pour deux visages inversés

Le caractère irréel des couleurs ajoute à l'onirisme du récit (onirisme=qui a rapport au rêve)

Daphnis et Chloé - Au bord de la fontaine  - 1958-1961


Daphnis poursuivant un bélier se blessa en tombant dans un piège à loup

Il se mit au bord de la fontaine à laver les traces de sa boue


Chloé le regardait et le trouva beau

Elle lui lava le dos et les épaules et trouva sa peau très fine


Elle n'eut plus autre chose en l'idée que de revoir Daphnis se baigner

Daphnis et Chloé - La chasse aux oiseaux  -  1958-191


L'hiver Daphnis et Chloé ne pouvaient plus mener les bêtes aux champs

Daphnis trouva une idée pour voir Chloé


Devant le logis de Dryas où habitait Chloé il y avait un grand arbre qui attirait même l'hiver une grande multitude d'oiseaux

Afin d'entrevoir Chloé Daphnis eut l'idée de prétexter d'aller chasser ces oiseaux


Lithographie pleine de chatoiements et de battements d'ailes

Daphnis et Chloé - Arrivée de Dionysophane  - 1958-1961


De riches bergers avaient demandé à Dryas la main de Chloé

Daphnis n'avait que sa pauvreté

Un rêve lui révéla la cachette d'une bourse qu'il alla porter à Dryas

Lamon accepta le mariage mais il lui fallait l'accord de son maître Dionysophane

Dionysophane et sa femme Cléoriste trouvèrent le domaine bien tenue et acceptèrent le mariage

Daphnis lui offre deux chevreaux


Daphnis et Chloé - Temple de Bacchus - 1958-1961


Dans la forêt il y avait un temple dédié à Bacchus

Au centre Sémelé qui accouche

En bas Ariane dort

En haut à droite Pan joue de la flûte

Des bacchantes mènent la danse


A la in du livre Daphnis est reconnu comme le fils de Dionysophane et Chloé comme la fille d'un riche citadin

Le mariage conclut l'histoire


MARC  CHAGALL  4/7

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