8 - LE DELUGE UNIVERSEL

Cette fresque représente le salut du genre humain lors de l'épisode de l'arche de Noé. Michel-Ange montre l'arche flottant sur les eaux du déluge qui n'a pas encore atteint le niveau le plus élevé. Quelques rescapés essaient encore de se sauver et de survivre.

Au premier plan des hommes, des femmes et des enfans avec leurs biens montent au sommet de la montagne. Au second plan à droite se trouve une seconde cîme rocheuse circulaire transformée en îlot sur lequel se dresse une tente où certains cherchent le salut face à la marée montante. Au centre plusieurs personnes tentent de monter sur une embarcation au risque de la renverser. Au fond d'autres personnes grimpent sur l'arche depuis l'extérieur et essaient d'en atteindre le sommet à l'aide d'une échelle

Michel-Ange ne présente pas les trois cents coudées de la longueur de l'arche. Il ne peint pas non plus la pluie qui d'après la Genèse ne cessa de tomber que lorsque l'eau eut recouvert de quinze coudées les sommets des montagnes les plus hautes. Mais les cheveux et les extrémités des manteaux qui s'envolent laissent percevoir le vent qui marqua la fin du déluge

Sur l'arche apparaît une colombe blanche et d'autres oiseaux esquissés en marron en train de voler vers l'arche. A sa fenêtre Noé désigne de son bras tendu la masse des nuages. Le déluge n'a pas encore pris fin. Il bat son plein puisque les hommes qui se trouvent hors de l'arche n'ont pas encore péri.

La théologie médiévale interprétait l'arche comme l'Eglise flottant sur les eaux de la tentation et de la persécution

Importance du jaune safran qui symbolise le discernement spirituel. Le discernement spirituel s'applique aux choses qui concernent la vie de l'Eglise et la vie chrétienne. C'est l'utilisation de nos facultés d'observation et de réflexion en y ajoutant la Parole de Dieu. Il ne s'agit pas d'une révélation spontanée de l'Esprit Saint mais d'un exament attentif et profond de la Parole écrite de Dieu. Dans les Actes il est écrit à propos des gens de Bérée "Ils accueillirent la parole avec le plus grand empressement. Chaque jours ils examinaient les Ecritures pour voir si tout était exact". Saint Paul souligne le rôle de "ceux dont le jugement est exercé  par l'usage à discerner ce qui est bien et ce qui est mal"

A l'extrême gauche une femme debout porte un habit de couleur jaune safran. Au bord de l'arche une autre femme vêtue d'un habit jaune safran. Au milieu, gravissant la colline sur le dos d'un homme nu une autre femme vêtue de jaune safran. A droite sous la tente une femme s'enveloppe dans un manteau jaune safran.

A droite sous la tente, la femme en jaune safran se couvre l'œil de sa main droite voilée. A l'extrême gauche un jeune garçon vêtu de vert (couleur de l'espoir ) placé derrière la figure féminine du premier plan se couvre aussi un œil. Le vert est la couloir de l'espoir mais d'un espoir qui ne se porte que sur les choses terrestres. Comme les cyclopes impies, ceux qui gardent un œil fermé ne regardent que les choses terrestres

La femme assise au premier plan est presqu entièrement nue, les seins particulièrement mis en évidence. Un manteau bleu ciel lui fait une capuche sur la têt. Le bleu ciel du manteau représente habituellement la contemplation des choses célestes et pourtant elle regarde vers le sol. Avec ses seins gonflés elle pourrait être la personnification de la sagesse terrestre.

Sur l'île rocheuse à droite nous distinguons une jeune femme vêtue de vert, couleur de l'espérance, qui soutient sur le bord du plateau rocheux un jeune corps nu. Selon les experts ces deux figures furent exécutées durant l'été 1508 lors de la toute première journée de travail de Michel-Ange dans toute la voûte de la Sixtine

Nous retrouvons la couleur verte de l'espérance pour la figure masculine qui à l'aide d'une échelle s'efforce de monter sur l'arche. La chemise verte trop courte signifie que l'espérance dans le salut n'est pas suffisante pour les hommes qui cherchent à échapper au déluge

Pas de vert sur la barque au  milieu qui est sur le point de se renverser sous l'effet d'une dispute violente. Pour eux il n'existe pas la moindre espérance de salut.

La dizaine de personnes qui au premier plan à gauche montent sur le sommet de la montagne ne semblent pas avoir peur du déluge à l'exception de la femme portée sur les épaules de son époux qui regarde vers la droite, pleine d'effroi

Au sommet les personnages se séparent en trois groupes :

- la femme nue et son enfant (la sagesse et l'espoir terrestre )

- les trois personnes situées près de l'âne

- les personnes qui entourent le tronc de l'arbre. La femme qui a commencé à monter sur l'arbre porte un manteau vert bleuté. Le vert est le symbole de l'espérance et le bleu exprime la contemplation céleste. Elle regarde dans la direction d'un couple tourné vers elle et qui s'enlace. L'homme a un manteau rouge violacé jeté sur l'épaule tandis que la femme, assise sur un drap blanc, a un bandeau blanc autour de la tête. Le blanc et le rouge symbolisent l'amour et la foi. Ainsi, la foi qui s'unit à l'amour disposé à la pénitence (manteau rouge violacé) regarde vers l'espérance contemplative (vert bleuté) qui s'agrippe au tronc sans rameau, symbole de la croix

A leur droite la femme avec ses deux enfants personnifie l'amour. Cette figure maternelle a les cheveux tressés, caractéristiques de l'épouse.

Le déluge universel est le symbole des désordres, de l'instabilité et des persécutions de tous les temps. Noé représente le Christ ou une autorité ecclésiastique qui autant que possible construit l'arche, l'Eglise, afin qu'elle-même et ses enfants, c'est-à-dire ceux qui lui sont soumis, puissent y trouver le salut

La répartition de l'arche en deux étages renvoie à la division entre les personnes qui mènent une vie active à l'étage inférieur et sont destinées à travailler dans le monde et celles qui ont une vie contemplative, installées à l'étage supérieur et tournées vers le ciel

Une famille est dans le groupe qui monte sur la montagne : le jeune père avec une grande poêle, la mère avec la table et les ustensiles sur la tête et tenant l'enfant par la main. Les quatre pieds de la table ronde sont d'une solidité qui contraste avec la petite barque proche de se renverser. L'Eglise est faite de saints dont la vie fortifiée est prête à assumer n'importe quelle bonne œuvre de même que le bois équarri est bien solide sur chacun des ses côtés

Nous reconnaisson, un peu caché, l'image de Saint Paul avec sa longue barbe et sa chevelure clairsemée. Son regard se porte vers le haut et vers la droite et il est habillé de vert, couleur de l'espérance

Les pesonnes qui montent vers la montagne pour s'agripper à l'arbre ne sont pas encore sauvées car c'est en se tenant solidement à l'arbre nu de la croix que l'on atteint le salut

L'homme âgé entièrement nu qui accède à la petite île rocheuse à droite en soutenant le cadavre d'un autre homme est l'expression du Père avec son Fils mort. L'homme âgé avec sa longue barbe blanche qui tend son bras droit vers eux serait le portrait du prophète Zacharie et ressemble au pape Jules II

Selon certains interprètes les personnages qui ont pris place sur la petite île rocheuse représentent ceux qui à la suite du péché originel commis par leurs ancêtres ont besoin de la rédemption à travers la mort de Jésus sur la croix

Nous aurions alors :

- Adam qui serait l'homme d'âge revêtu d'un mélange de vert et de jaune, couleur du péché

- Eve qui serait la femme portant un habit bleu, couleur de la contemplation, tandis qu'une étole blanche lui entoure la tête

- Caïn appuyé sur un tabouret

- Abel, à droite de Caïn; assassiné il laisse pendre sa tête et son bras sans vie

- Seth, derrière Caïn, et qui, nu lui aussi, regarde son frère Abel d'un air pensif

Sur la petite barque chacun pense à sa propre survie. Le groupe représente ceux qui abandonnés à leur instinc ont perdu toute espérance. Sur cette barque il n'y a ni le vert de l'espérance ni le jaune safran du discernement spirituel

Les figures qui tentent de se sauver en montant sur l'arche sont elles aussi dépourvues de foi. Celle qui est vêtue de jaune safran porte bien un foulard blanc, couleur de la foi, mais il lui recouvre entièrement le visage ce qui l'empêche de voir. Elle représente la foi aveugle de ceux qui ne trouvent pas le salut.

Un homme nu s'approche par derrière en catimini, brandissant une hache dans le dessein de tuer. La hache signifie que ceux qui ne se trouveront pas sur l'arche protectrice au dernier jour seront surpris par la mort

La fresque du Déluge est la première exécutée par Michel-Ange dans la Sixtine. Pour obtenir des effets de perspective et de profondeur il a varié les dimensions de ses figures mais par la suite il a renoncé à ces effets de profondeur

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