Durant les dernières années de sa vie Turner qui perdit beaucoup d’amis souffrit de solitude

Il se partageait entre deux maisons 


Celle de Queen Anne Street à Londres où il vivait avec Mme Danby, sa gouvernante depuis de nombreuses années. On n’avait pas repeint la porte depuis vingt ans, des couches de pluie et de poussières maculaient les vitres

A l’étage la galerie était une grande salle, l’une des plus belles de Londres, mais en piteux état. Elle présentait des tableaux de toute la carrière de Turner

Un visiteur fut choqué par le très mauvais état des tableaux. Les verrières du toit étaient sales. Beaucoup de vitres étaient brisées. Certaines avaient disparu. La pluie tombait sur le plancher. Quatre chats tournaient autour du visiteur

La petite maison qu’il avait acheté à Chelsea où il vivait avec Mme Booth. Il s’y retirait loin de sa vie professionnelle et résistait à toutes les tentatives des ses collègues pour l’y dénicher


TURNER PAR LE COMTE D’ORSAY

C’était un petit homme trapu qui ressemblait un peu à un marin. Il aimait plaisanter et dîner en ville mais ne donnait  pas de dîner lui-même. Il se déplaçait de façon traînante et gauche. C’était un grand artiste mais d’une personnalité sans rien de plaisant  ni d’aimable

Il avait pour gouvernante une vieille femme qui avait vécu avec son père, Hannah Danby, et qui avait de strictes habitudes d’économie. Elle souffrait d’une maladie qui l’obligeait à se cacher le visage, ce qui n’ajoutait rien aux charmes du domicile. Mais elle dégageait une certaine impression de netteté sur sa personne


1843   JOHN RUSKIN  PAR GEORGE RICHMOND

En 1843 une relation amicale s’instaura entre Turner (68 ans) et Ruskin (24 ans). Turner admirait l’intelligence et la ferveur de son jeune admirateur  qui publia le 15 mai 1843 Modern Painters, étude critique dans laquelle il lui rendait un éloquent témoignage d’admiration. Mais Turner ne le remercia que 18 mois après.

Ruskin « Quand il marchait dans une ville, il avait toujours en poche un rouleau de minces feuillets où il notait rapidement en abrégé tout ce dont il voulait se souvenir. Le soir une fois rentré à l’auberge il complétait  l’ébauche au crayon et indiquait  toute la couleur nécessaire »

Il n’avait pas coutume d’achever des aquarelles sans un but financier précis, gravure ou vente à un collectionneur. Ce but ne s’imposait pas pour les peintures à l’huile dont le seul fait de pouvoir les exposer à l’Académie justifiait l’existence. Mais l’Académie n’aurait jamais accueilli des aquarelles.

Il tenait aux œuvres dont il était le créateur

A un admirateur voulant acheter  Le passage du ruisseau « Je désire le conserver par-devers moi ; c’est l’un de mes enfants »

A propos du Téméraire « Aucune considération d’argent ou de faveur ne me poussera à prêter de nouveau mon chéri »


LAC DE GENEVE AVEC LA DENT D’OCHE   1841

L’aquarelle est tirée d’un carnet de croquis. Lors des ses derniers voyages Turner utilisa des carnets de croquis à couverture souple qui pouvaient se roulet et étaient facilement transportables.

Les aquarelles ont été exécutées d’après des souvenirs réels et imaginaires même si ici Turner a peint des vignobles et des vendangeurs qu’il a réellement dû voir.

Au loin le massif s’élève au-dessus du lac baigné par une couleur somptueuse. Turner a posé sa couleur sur le papier humide et a laissé sécher le papier avant d’ajouter les détails du premier plan. Il a trouvé le manque de précision de ses formes fortement expressif. Il n’a même pas esquissé les montagnes dans le lointain pour mieux exprimer l’irréelle beauté de leur couleur.



MONTREUX   1841

Le sujet de cette aquarelle n’a jamais été identifié. C’est une page d’un carnet d’esquisse souple utilisé lors de son voyage en Suisse de 1941 où il séjourna à Lausanne.

A l’est de Lausanne la rive du lac s’infléchit vers Montreux et la vallée du Rhône en direction de Montigny.

Nous regardons vers le sud avec l’ombre d’un des pics de la Dent d’Oche.

Au premier plan les tonalités sombres d’une petite île boisée et un moulin à eau confèrent une grande profondeur au paysage.

Turner a posé ses couleurs diluées avec une grande liberté et ses roses opalescents et ses pâles gris-bleu dans le lointain font le charme de ce dessin inachevé.


1842   VALHALLA  REFAIRE PHOTO COMPLETE


L’œuvre célèbre les réalisations de Louis II de Bavière

Turner avait visité la Walhalla, panthéon allemand, construit en surplomb du Danube en  1840 lorsqu’il était inachevé

Le tableau fut exposé avec des vers qui faisaient allusion à la défaite de Napoléon et à l’aube d’une nouvelle ère de prospérité pour l’Europe

Mais la paix renaît ; les rayons matinaux

Eclairent la Walhalla, érigée à la science et aux arts

Aux grands hommes de la patrie allemande


1842   ZURICH

Cette vue atteste l’intérêt constant et passionné de Turner pour les sites urbains bruissants de vie



1842    LE RIGI ROUGE



La montagne est vue au coucher du soleil. Pour Turner la Suisse incarne tout à la fois la grandeur sublime et la paix transcendante



PAIX-SEPULTURE EN MER   1842


Le 1er juin 1841 Sir Wilkie un ami de Turner mourut subitement sur le bateau qui le ramenait d’un voyage en Egypte. Turner fit ce tableau pour lui rendre hommage. Turner était réputé pour sa palette vive qui permettait d’obtenir des couleurs éclatantes. Wilkie, lui était considéré pour ces tableaux noirs. Il voulut avec ce tableau montrer sa maîtrise du noir.

On voit une explosion de flammes au milieu des ombres noires du navire. Mais sur le catalogue de l’Académie royale de 1842 deux vers éclaire ce fait : « La torche de minuit miroitait sur le flanc du bateau / Et le corps du Mérite fut abandonné aux flots »

Turner croyait que les obsèques eurent lieu au large de Gibraltar. A l’arrière-plan on devine l’évocation fantastique du Rocher et une tour qui rappelle bizarrement le campanile de la place Saint Marc.

Un collègue académicien critiqua l’aspect monotone de la composition : « Une large éclaboussure de lumière au centre entourée de taches noires ». Tuner ne montra jamais un grand intérêt pour la composition. Les problèmes de dessin semblaient l’ennuyer. Turner inventa cependant deux méthodes de composition : le tourbillon et la concentration de taches noires autour d’une lumière centrale

Turner « Le flambeau de minuit brillait sur les flancs du vapeur ;    Et le cadavre du Mérite fut rendu à la mer »

1842  TEMPETE DE NEIGE : VAPEUR AU LARGE D’UN PORT  


Tout l’univers visible est emporté dans un énorme tourbillon qui enveloppe le vapeur aussi bien que le spectateur.

Turner fut piqué par une critique qui déclarait que son œuvre était « une masse d’eau savonneuse et de lait de chaux »

Son interprétation libre restitue l’énergie sauvage d’une  tempête de façon bien plus authentique que s’il avait peint chaque goutte de pluie ou chaque vague avec un plus grand souci de vraisemblance.

Turner a peint ce tableau dans le seul but de montrer à quoi ressemblait une tempête de neige

« Je persuadai les marins de m’attacher au mât pour l’observer ; je restai attaché pendant quatre heures et je ne croyais plus en sortir vivant, mais je me sentais obligé de l’enregistrer si jamais j’en réchappais. Mais il n’est pas question d’aimer ce tableau »

Un critique écrivit que ce n’était qu’une « masse d’eau de savon et de lait de chaux »

Turner trouve un équilibre entre plusieurs éléments : abstraction et représentation, forme et contenu, observation et vision intérieure.

L’interprétation est abstraite et pourtant nous sommes submergés par le dynamisme des formes naturelles, par l’orage terrifiant dont le tumulte semble aspirer le bateau dans un gouffre destructeur.

Finis les nuages statiques et architecturaux des premières peintures. Ils ont fait place à des voiles de brumes qui fouettent le bateau et le poussent vers la lumière aveuglante au centre.

Finies les vagues grossièrement colorées. On a maintenant des masses d’eau mouvantes d’énormes ondulations qui frappent et secouent le navire avec  une force terrible.

Il a créé un ensemble tourbillonnant, tourmenté, compact.


1842   LA DOGANA, SAN GIORGIO VUES DES MARCHES DE L’EUROPA

Etude froide et classique dans sa composition avec un équilibre soigneusement maintenu entre les bâtiments et le plan d’eau.  Elle devint le premier tableau de Turner à entrer à la National Gallery en 1847


1842  LAC DE LUCERNE : LA BAIE D’URI  


Turner séjourna chaque été en Suisse de 1841 à 1844. Il fit d’innombrables croquis et lavis légers dont certains servirent de base à des créations plus achevées, comme celle-ci.

Turner aimait le lac des Quatre-Cantons dont nous voyons ici un point situé au-dessus de la petite ville de Brunnen.

Dans le lointain sur la gauche et en avançant dans le lac  se trouve le promontoire de sur lequel est édifiée la chapelle de Guillaume Tell. Devant lui les pics dorés de l’Oberbauenstock brillent au-dessus de la masse du promontoire de Seelisberg et de la prairie de Grütli, lieu célèbre de l’histoire suisse.

Les réminiscences historiques ne semblent pas avoir intéressé le peintre. Dans ce décor Turner ne s’intéressait qu’aux modestes faits et gestes de l’humanité présente et seulement pour mieux faire ressortir l’immensité de son environnement .

La composition est unifiée par un grand mouvement ascendant s’emparant des nuages qui se lèvent au-dessus du promontoire de Tellsplatte et par la ligne d’ombre traversant l’Oberbauenstock sur la rive opposée.

Cette composition fait ressortir les formes des montagnes plus lointaines qui semblent flotter dans la lumière et la brume matinale.

Sur les montagnes et le lac nous remarquons une large utilisation des pointillés qui traduisent la multitude des arbres et leur reflet ajoute à toute la scène une sorte de vibration.

Bien que les couleurs soient douces et nacrées la tangibilité des montagnes est indubitable.

Dans les aquarelles suisses de cette période il crée des visions de montagnes et de lacs définis par des espaces elliptiques et tourbillonnants qui les séparent


1843   LA VIA MALA


C’est sur un feuillet de ses carnets roulés en couverture souple que se trouve la vue vertigineuse des ruines de Hohenrätien qui surplombent l’entrée de la Via Mala



1843    LE COL DE FAIDO

Ruskin « Les montagnes ne sont ni très hautes, ni spécialement belles … mais dans la réalité le voyageur  y parvient par l’un des ravins les plus étroits et les plus sublimes des Alpes … dés lors l’endroit lui parle un autre langage que celui qu’il aurait tenu à un observateur non préparé … Le grand paysagiste inventif doit avoir pour objectif d’offrir, au lieu de la simple vérité des faits physiques, celle de sa vision mentale, infiniment plus profonde et plus noble … »


1843  LE PONT DU DIABLE, SAINT-GOTHARD  

Le col du Saint-Gothard est un des principaux passages des Alpes de la Suisse vers l’Italie. Le peintre a représenté le Pont du Diable à plusieurs reprises après son premier voyage en Italie en 1802.

Il a situé le pont loin car face à la grandeur sauvage de la scène les créations de l’homme paraissent dérisoires.

Une énergie parcourt la masse inerte des roches donnant l’impression que tout domaine visible est possédé par le mouvement

Ce sens du mouvement n’est pas seulement un artifice pictural de la part de Turner. L’artiste voulait transmettre la perception qu’il avait de la pulsation à travers toute chose du continuum divin. Il croyait en une réalité métaphysique sous-tendant les apparences.

Turner croyait en la « vérité » des formes géologiques comme reconnaissance des énergies naturelles tourbillonnant sur l’alpe, comme représentation des formes primitives qui ont créé les rochers.




1844   PLUIE, VAPEUR ET VITESSE  


Quand le tableau fut exposé au Salon de 1844 un critique pressa ses lecteurs d’aller voir l’œuvre avant que le train « jaillisse de la peinture et s’élance dans Charing Cross à travers le mur d’en face ». Le train communique une intense impression de vitesse. Le mouvement est donné par l’accentuation de la perspective de la ligne de chemin de fer et du pont  qui se dégagent de lointaines vapeurs de pluie.

Turner souligne l’importance de la vapeur. Il a enlevé tout le devant de la locomotive pour exposer la machinerie de la chaudière, c’est la masse incandescente visible à l’avant du train. Turner aime révéler les « causes » cachées des choses, ouvertement et non indirectement

Peut-être fait-il aussi l’apologie de la compagnie de chemin de fer car il en possédait des actions. Il avait célébré l’avènement de la vapeur dans le Château de Douvres en 1822.

Un critique «  Il a composé son tableau de vraie pluie, derrière laquelle se cache un vrai soleil, et l’on s’attend à voir un arc-en-ciel d’une minute à  l’autre… Un train arrive droit sur vous… La pluie est composée de touches de mastic sale jetées dur la toile avec une truelle… Le soleil scintille à travers des amas de jaune et de chrome, pâteux, très épais »

L’union de l’Art et de l’Industrie fut l’une des aspirations de l’ère victorienne. Elle ne se fit jamais car la majeure partie des artistes méprisaient la révolution industrielle et les industriels n’aimaient que la peinture du passé.

Turner fut une exception. Il admirait la modernité.

Avec ce tableau il nous prouve qu’un train passant sur un pont peut être beau. La locomotive était le modèle le plus perfectionné qui existait alors, connue sous le nom de « Firefly Class » et le pont de Maidenhead était un chef-d’œuvre de la technique

Turner qui avait fait le tour de l’Angleterre, de l’Ecosse et d’une grande partie de l’Europe en diligence fut parmi les premiers à apprécier ce moyen de transport rapide et confortable.

Un jour qu’il voyageait sur la ligne Bristol-Exeter en 1844, il se pencha à la fenêtre et photographia mentalement la scène qu’il peignit ensuite en l’adaptant à ses exigences. Comme il voulait que le train soit au centre du pont il supprima une voie

Pour montrer au spectateur que le train vient bien vers lui, Turner a peint trois bouffées de fumée mais la première bouffée seule est bien distincte

Jusqu’aux Impressionnistes c’est le seul tableau d’importance qui célèbre le chemin de fer

La composition d’une grande netteté géométrique tient de Poussin tandis que la pâte crémeuse semble rappeler Rembrandt même si elle annonce l’impressionnisme

Turner était émerveillé devant un monde en perpétuelle évolution où l’homme et la nature ont chacun leur place


1844    LE RIGI AU CREPUSCULE

Cette large ébauche presque expressionniste du Rigi au crépuscule vu de l’hôtel préféré de Turner, le Cygne, provient  d’un des rares carnets suisses encore intact


1845   NUAGES MENACANTS SUR  LA MER   

Un critique a vu dans cette aquarelle « les ailes d’un aigle planant sur la mer … qui évoque la faiblesse de l’homme face aux forces de la nature »

On peut voir dans le ciel sur la gauche un drôle d’animal portant de nombreuses pattes ; on distingue le nez, la bouche, les yeux et les oreilles de lapin

Ces images étaient-elles voulues par Turner ou ne sont-elles que le fruit de notre imagination ?

Dans l’œuvre de Turner ces pointes de surréalisme, si elles existent, sont soit accidentelles soit  l’expression de son curieux sens de l’humour. Il aimait les plaisanteries et quand il en racontait une, il riait à gorge déployée en se pinçant le nez, ce qui le faisait ressembler à un polichinelle



1845   MER DEMONTEE

Cette toile fait partie d’un ensemble où sont étudiées les conditions climatiques de la côte anglaise, probablement observées à Margate

La coque du navire qui surgit à travers l’amas nuageux traduit le péril de ceux qui vivent de et sur la mer


1845    VENISE AVEC LA SALUTE


La conception du sujet était complète dans l’esprit de l’artiste en dépit du manque de finition. Les bâtiments isolés sont déjà en place



1845    EN ALLANT AU BAL SAN MARTINO


Au fur et à mesure que l’on avançait dans la décennie de 1840 les sujets vénitiens de Turner étaient de plus en plus dominés  par la brume enveloppant la ville plutôt que par ses édifices


1846   LES CHUTES DE LA CLYDE  


Cette chute est une des trois cascades de la Clyde au sud de Glasgow. Les femmes du premier plan ne sont pas des dames ordinaires peu susceptibles de se baigner nues dans les eaux froides de la Clyde. Pour lui les forces cachées de la nature sont personnifiées par les naïades, nymphes des cours d’eau.

Au milieu des années 1840 il avait acquis une telle maîtrise de la forme et de la couleur que pour exprimer les énergies primitives autrefois symbolisées par les nymphes des déesses qui sont à peine visibles, les énergies qu’elles personnifient imprégnant la totalité du paysage

Ce tableau est une étude de la déformation prismatique de la lumière quand elle traverse les brouillards émis par une chute d’eau.

En 1848 il précisa dans son testament que tous ses tableaux achevés devaient revenir à la National Gallery et être exposés dans des salles spécialement construites pour elles.

En été 1845 il rendit visite à Louis Philippe à Eu dans le nord de la France qu’il avait rencontré en exil en 1815 à Twickenham  près de Sandycombe Lodge. « Le roi avait appris que M. Turner se trouvait en ville et sollicitait sa compagnie pour le dîner. Turne s’efforça de décline l’invitation en prétextant son manque d’habit … La femme du pêcheur chez lequel il résidait prépara une cravate blanche en découpant un linge… Turner déclara qu’il avait passé l’une des plus agréables soirées de sa vie à bavarder avec sa vieille connaissance de Twickenham »

En 1845 sa santé commença à décliner. Il dut remplacer le président de l’Académie « Les arides et fastidieux devoirs de cette charge ont détruit ma joie de vivre et mon appétit ». Plus jeune il aurait aimé être Président mais son excentricité et ses  apparences un peu frustes avaient toujours fait obstacle à la réalisation de son ambition.


1845   EU AU CLAIR DE LUNE


Durant son dernier voyage à l’étranger Turner, trop malade pour dépasser la côte normande remplit des carnets entiers d’études de couleur

Il fait la synthèse d’un thème favori : le moyen de transport par lequel il s’était rendu dans tant de lieux passionnants


1850   YACTHT APPROCHANT DE LA CÔTE

  

La situation  centrale du soleil caractérise les ultimes œuvres de Turner. Ce tableau n’est pas seulement un yacht approchant de la côte : c’est l’hymne de Turner au soleil, cet astre qu’il a, dit-on, affirmé être Dieu

Turner était constamment préoccupé par l’essentiel : processus naturels, comportement humain, mécanismes de la lumière et de la forme. Pour lui le soleil n’était pas seulement un objet physique.

Le soleil de Turner brûle dans le ciel comme la source ultime de la vie sur la Terre et la clé de cette esssence que, toute sa vie, il a cherchée et célébrée.


1850   LA VISITE A LA TOMBE  


Le sujet est tiré du livre IV de l’Enéide de Virgile

Il composa un vers pour accompagner ce tableau « Le soleil déclina avec courroux face à une telle duplicité

A la fin de sa vie il passait beaucoup de temps à observer la nature et contempler les effets changeants de la Manche, de la Tamise, du ciel et des nuages, soit sur le front de mer à Margate, soit sur la plateforme qu’il avait fait construire sur le toit de la maison de Chelsea

Il ne dit jamais son vrai nom. Il se faisait appeler « Amiral Booth ». Il aimait beaucoup fumer et ne voulait pas que cela se sache. Même son médecin qui le soigna durant sa dernière maladie restait dans l’ignorance de sa véritable identité. Il se nourrissait principalement de rhum et de lait, parfois deux litres par jour de lait et de rhum.


1842   LE  RIGI BLEU

Turner pouvait étudier à  loisir le Rigi de la fenêtre de son hôtel, le Cygne, sur la rive opposée du lac.

Le silence sans souffle de l’aube n’est rompu que par les aboiements des chiens qui sautent dans l’eau à la poursuite de canards



1843   LUMIERE ET COULEUR (LA THEORIE DE GOETHE) -- LE MATIN APRES LE DELUGE

Turner a utilisé les couleurs « positives » de Goethe, peut-être pour prouver que les tons chauds (le rouge et le jaune) n’expriment pas nécessairement la gaité, le bonheur et la joie, comme le pensait Goethe.

Ce tourbillon nous entraîne vers la figure de Moïse.

Noé qui aurait été, ne serait-ce que par son ivresse une apparition plus sympathique, n’est pas le personnage principal et n’est même pas représenté.

Au centre de la composition on voit le bâton de Moïse transformé en Serpent d’airain. Ce bâton est le sujet principal de la composition.

Les bulles de la terre qui ont une figure humaine sont une allusion à la théorie de Goethe qui disait que l’on peut voir l’origine des couleurs prismatiques sur la surface d’une bulle.

Elles indiquent aussi la nature transitoire de l’existence comme le montrent les vers que Turner publia dans le catalogue de l’Académie :

« L’arche tenait bon sur l’Ararat ; le soleil de retour exhalait les bulles humides de la terre, et émule de la lumière,

Réfléchissait ses formes perdues, sous le masque prismatique »

Ce tableau illustre la tristesse fondamentale de Turner, car comme l’écrivit Ruskin « Sans maison accueillante dans son enfance, sans ami dans sa jeunesse, sans amour dans l’âge d’homme et sans espoir dans la mort » Turner fut presque contraint de devenir pessimiste.

Ruskin « Il  n’y eut jamais solitude plus terrible que celle de ce grand  homme … Turner n’était pas sûr qu’après sa mort il serait mieux compris que de son vivant … Les louanges qu’il reçut furent pauvres et superficielles »



LE SOIR : NUAGE SUR LE MONT RIGI    1841

Turner fit de nombreux voyages en Suisse et de 1841 à 1844 il y passa tous ses étés.

Il guettait les orages et les tourbillons de vent sur les sommets et les gouffres alpins, emmagasinant tout ce qu’il voyait dans sa formidable mémoire visuelle

Turner a peint le mont Rigi à plusieurs reprises : au crépuscule, à l’aube, sur découpant sur un ciel clair ou couronné de nuages et sous tous les éclairages possibles et imaginables

Turner peignit cette aquarelle pour son plaisir, de la fenêtre de son auberge où il était confortablement installé

Cette aquarelle est un exemple d’aquarelle pure, exécutée très rapidement et sans dessin préliminaire au crayon

Vision mystérieuse de la gigantesque silhouete d’une montagne surgissant du brouillard


1843   LA DOGANA ET SANTA MARIA  DELLA SALUTE

Vers la fin de sa vie Turner fut obsédé par la beauté de Venise. Il était fasciné par les palais et les églises gris perle qui se reflètent dans les canaux, qui se dissolvent dans l’atmosphère brumeuse ou se découpe sur le ciel dans la lumière intense

A chaque voyage il faisait provision de dessins et d’aquarelles et de retour à Londres il peignait des huiles qui rendaient avec une extraordinaire précision la lumière et l’atmosphère de ce monde demi aquatique

Ses couleurs opalescentes, posées avec finesse, semblent avoir été soufflées sur la toile

On a l’impression que la Douane et la Salute se dissolvent dans la lumière chatoyante et noyée d’eau

Cette vue enchantait Turner et il la peignit souvent

Cette toile fut la toile de Turner qui atteignit le plus haut prix dans une vente aux enchères

On s’est interrogé sur la richesse de Turner car il ne vendit pas ses œuvres majeures et les légua à la nation

Mais ses innombrables aquarelles furent achetées par des collectionneurs passionnés



OMBRE ET OBSCURITÉ

LE SOIR DU DELUGE   1843


Turner venait de lire « Farbenlehre » (La Théorie des couleurs) de Goethe et ses annotations sur le livre montrent qu’il fit un gros effort pour la comprendre.

Il était sceptique sur de nombreuses affirmations de Goethe et ne pouvait admettre que les préjugés contre toute théorie, très répandus chez les artistes, soient nuisibles à la pratique. Mais plus tard il reconnut que Goethe « laisse faire le génie dans ce livre ».

Turner est tout à fait content quand Goethe donne au jaune, la couleur préférée de Turner, une place prédominante démontrant que c’est la première dérivation de la lumière la plus intense et qu’il a un effet tranquilisant et légèrement excitant.

L’analyse de Goethe est basée sur un cercle chromatique qui comprend des couleurs «positives » et des couleurs « négatives ». Les rouges, les jaunes et les verts sont des couleurs positives qui s’identifient avec le bonheur, la gaité et la joie et expriment la chaleur. Bleu, couleur froide, exprime l’obscurité. Bleu et ses dérivés, les pourpres et les violets suggèrent le chagrin et la tristesse.

Il se dégage de ce tableau une atmosphère lugubre.

Le dessin en tourbillon exprime le profond pessimisme de Turner. La sensation d’une catastrophe imminente est donnée par le ciel arqué chargé d’eau et le rideau de pluie balayant le paysage.

Les animaux en cortège cherchent le chemin de leur refuge.

Un vol d’oiseaux formant aussi un arc s’éloigne dans le lointain, augmentant l’impression d’abandon et de désolation.


1843     GOLDAU


Ruskin « Le lac de Zoug dans le lointain apparaît comme une lave sous le soleil brûlant. Sous les sombres masses rocheuses au premier plan gît, enterré, l’ancien village de Goldau. Le clocher du village d’Arth apparaît  ici comme une pointe embrasée au bord du lac »


1844    HEIDELBERG

Turner visita Heidelberg en 1833 mais y retourna en 1844.

La ville se trouve à l’ouest du Neckar tout contre une arête montagneuse.  Les vues obtenues sur la rivière se dissolvent dans la lumière du soleil que l’on a  toujours dans les yeux


GEORGE JONES  LE CERCUEIL DE  TURNER


Turner mourut le 19 décembre 1851. A sa requête il fut enterré dans la crypte de la cathédrale St Paul près de la tombe de Reynolds.


WILLIAM  TURNER


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