PABLO PICASSO 6 / 6
1955
La coiffure
Tableau unique en son genre par ses tons de rose et de vert tendre et par son thème qui rappelle le « Harem » de 1906
Torsion du nu qui présente à la fois sa face, son dos et son profil
La liberté du pinceau, les empâtements de la matière font de ce tableau un précurseur du style tardif
Claude dessinant, Françoise et Paloma
Dans un style décoratif et matissien il peint ses enfants Claude et Paloma
En quelques traits noirs ou blancs d’une grande justesse, sur des aplats contrastés de couleur, cette toile célèbre la famille reconstituée le temps des vacances
Les femmes d’Alger
Cette œuvre est inspirée par le tableau de Delacroix « Les femmes d’Alger »
Matisse est mort le 3 novembre 1954 et Picasso a le sentiment d’être le seul désormais à assurer la responsabilité de la peinture moderne
L’insurrection en Algérie a débuté en novembre 1954
Picasso a réalisé quinze versions des « Femmes d’Alger »
Dans cette dernière version l’espace fortement géométrisé exalte les contrastes de rythmes
Picasso cadre simultanément plusieurs plans différenciés selon plusieurs angles
La femme de gauche aux seins nus (Jacqueline) contraste avec sa compagne étendu sur la droite, la servante emportant le plateau et la figure dans l’encadrement de la porte ou du miroir ; toutes trois entièrement nues et pareillement construites sur des plans et sous des angles différents
Jacqueline en costume turc (20 novembre)
Picasso acheta et occupa de 1955 à 1961 la villa « La Californie » au bout de la baie de Cannes
Avec Jacqueline c’est leur première maison commune
C’est une villa de style mauresque
Il offrit donc à Jacqueline un costume turc aux broderies vivement colorées
acqueline en costume turc (29 novembre)
Jacqueline en buste, le visage parfaitement rond
Les broderies du costume sont symétriques
Les yeux très inégaux, dont l’un est venu sur le nez, restituent le regard droit du modèle
Femme nue au bonnet turc (1er décembre)
Jacqueline nue ne porte plus que la calotte et le décor brodé qui l’accompagne
Regard très droit dans un visage de face et de profil
L’atelier de La Californie
Picasso a aménagé la vaste salle de séjour de La Californie en atelier
Les objets présentés sont aisément reconnaissables :
le petit tabouret escalier, l’armoire brune, le plat africain, la toile de Jacqueline en costume turc, la découpe Art Nouveau des fenêtres, motif très plastique et source de variations infinies
On aperçoit les arbres du splendide jardin exotique qui entourait la villa
Jacqueline dans l’atelier
Jacqueline est représentée devant une composition de l’atelier de La Californie dont on reconnaît la grande fenêtre aux contours baroques ouvrant sur le jardin
C’est comme un jeu de miroirs auquel la jeune femme ne participe pas, impassible dans le rocking chair familier, le visage grave, la poitrine saillante, véritable sphinx en attente devant le mystère du tableau
L’atelier de La Californie
Picasso fait allusion en forme d’hommage à Matisse en dessinant une arabesque florale qui anime les grandes fenêtres à la manière des papiers découpés et cloisonne les palmiers du jardin
Picasso réserve des blancs dans la couleur et s’en sert pour détourer à contre-
Picasso quittera La Californie qui sera entourée de hauts immeubles par les promoteurs
Ces immeubles couperont la vue de la mer
1957
1956
Les Ménimes
Picasso était fasciné depuis l’enfance par Velasquez
Il a repris le célèbre tableau « Les Ménines » et en a réalisé 44 variations
Picasso montre le peintre dans sa fonction de peintre, palette et pinceaux en mains, devant son chevalet et face à son sujet, le couple royal, qui est à la place du spectateur mais se réfléchit dans le miroir sur le mur du fond
La situation du peintre est inversée par rapport au modèle devenu accessoire
Autour de lui interfèrent, tout autour de l’Infante, les ménines, les pages et les animaux familiers
Les ménines sont les dames attachées au service d’une princesse espagnole
Imbrication des plans successifs et emboîtement des espaces continus et discontinus
L’Infante
L’Infante est une petite reine corsetée dans ses vêtements rigides mais aussi par les traits nerveux du peintre qui emprisonnent les taches de couleur
La robe est d’une couleur chaude de soleil espagnol mais le visage vert et bleu nous dit que dans ses vêtements anguleux la petite princesse est aussi une petite fille qui ne s’amuse pas
Jacqueline dans l’atelier
Picasso a peint Jacqueline endormie dans son fauteuil avec toute la tendresse dont il était capable
1958
Baie de Cannes
Picasso porte son regard sur la baie de Cannes avec les grands immeubles, les voiliers, les îles de Lérins, la mer et la lumière méditerranéenne
On trouve peu de paysages dans son œuvre et presque tous sont des paysages urbains dans lesquels l’architecture des maisons joue un rôle essentiel laissant peu de place à la nature
Dans cette toile les immeubles-
Menacé par ces très grandes constructions qui troublaient son intimité et bouchaient sa vue il quitta en septembre La Californie
Les volutes des collines et les ondes de la mer sont soulignées avec insistance
Picasso dira « Ce n’est pas le sujet, c’est le blanc qui m’intéresse »
Nature morte à la tête de taureau
Cette toile a été réalisée fin mai 1958 quand la France connaissait un climat d’inquiétude et de violence en raison de la crise en Algérie et en France
Le contraste entre la mort et la vie est ici saisissant et tragique comme un coup de tonnerre dans le ciel bleu
La présence insolite de cette tête décapitée, les orbites des yeux et la mâchoire ont une connotation morbide, alors que les autres composantes de la toile – le bouquet de fleurs, les motifs étoilés, les tons vifs, le soleil – sont éclatantes de lumière et de vie
La chute d’Icare
Décoration réalisée par Picasso pour le palais de l’Unesco alors en construction à Paris
Picasso prépare son travail à l’aide d’éléments prédécoupés
Il a éliminé tout accessoire pour focaliser la composition sur le contraste entre :
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1959
Composition à la mandoline
En 1958 Picasso a acheté le château de Vauvenargues près d’Aix en Provence, au pied de la montagne Sainte Victoire
L’auteur de « Maximes et réflexions » y avait vécu
Il sera enterré dans le jardin du château. En fait il ne s’est jamais senti à l’aise en ce lieu
L’instrument de musique rouge avec son manche compliqué et démesuré fait face à une grande cafetière en terre cuite et à une bouteille
Sur la cafetière Picasso dessine un modèle qui l’obsède à l’époque : les os en croix et la tête de mort au visage enfantin
Dans la bouteille on voit une forme qui fait penser à une cigale
Eclat du rouge de la mandoline
La cafetière jaune clair et la bouteille décorée se découpent nettement sur le fond vert émeraude éclairé par la gauche
La mandoline ressemble à un poisson tropical
Picasso qui a 78 ans pense à la mort
La corde qui tient la mandoline pendue à un clou et les grosses chevilles qui font saillie sous le manche évoquent les instruments de la Passion
Nu accroupi
Nu de Jacqueline, où, accroupie, elle occupe totalement le large rectangle de la toile
Monumentalité d’autant plus affirmée que chaque élément de son corps est traité avec une puissance telle qu’il en semble autonome
Les seins, le ventre rond, le sexe mais aussi les mains jointes disproportionnées, chaque jambe, la lourde chevelure noire et le visage aux profils mariés
Nature morte à la dame Jeanne
Œuvre abstraite et énigmatique
Mur vert et cigale colorée dans la bouteille
L’impressionnante dame Jeanne est nettement séparée de la bouteille et du verre succinctement dessiné
La dame Jeanne domine la composition par sa taille, le motif de son clissage et la surface rouge brique sur laquelle elle repose
Le goulot semble une bouche qui hurle comme si elle appartenait à un humain prisonnier de l’enfer
Le tressage large de la jarre accroît l’impression d’impuissance pathétique, peut-
Femme nue sous un pin
La monumentalité est signifiée par les dimensions plus grandes que nature et par l’ampleur des formes violemment simplifiées
En fond le profil de la montagne Sainte Victoire, si chère à Cézanne, qui faisait partie des terres du château acheté par Picasso
1960
Le buffet de Vauvenargues
Picasso a voulu se rendre maître de ce buffet de Vauvenargues de style Henri II, monumental et rococo
Présence de la jeune fille et du chien dalmatien qui s’approprient le buffet
Le ripolin a été utilisé ici pour sa fluidité
Femme couchée sur un divan bleu
Ce n’est plus Jacqueline nue, accroupie ; c’est Jacqueline nue en morceaux couchée
Même avec les jambes repliées et les bras au-
Alors que l’on demandait à Picasso quelle différence il établissait entre l’art et la sexualité il répondit « C’est la même chose car l’art ne peut être qu’érotique »
Le déjeuner d’après Manet (5 mars)
Picasso a ressenti le besoin de se confronter à ses devanciers
Picasso a respecté :
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Accent mis sur la relation entre le causeur à droite et la femme assise, monumentale à gauche
Il retrouve le dialogue, pour lui essentiel, entre le peintre et son modèle
Ecriture serrée en festons qui lui permet d’intégrer les personnages au fond décoratif
A Vauvenargues Picasso se met au vert en peignant des paysages
Cette scène de nu répond aussi aux « Grandes Baigneuses » de Cézanne qui voulait intégrer les corps au paysage
1961
Déjeuner sur l’herbe d’après Manet (17 juin)
Dans cette version du « Déjeuner » le vert est noyé d’ombre et le bleu domine
Le maniement convulsif de la pâte, les coups de pinceau pressés, la manière hâtive et confuse dont il plante les figures et le décor indiquent la fébrilité du peintre pour approfondir son dialogue avec le chef d’œuvre de Manet
Le déjeuner sur l’herbe d’après Manet (12 juillet)
Cette version unifie le vert, le bleu et le blanc, gommant tout contraste
Le parleur qui a pris l’apparence du vieux Picasso domine la scène tandis que son compagnon nu est couché et lit
La baigneuse assise et celle qui est penchée en avant sont devenues, elles aussi, des doubles de Picasso
Tête de femme, Jacqueline
Picasso n’utilise pratiquement que deux couleurs
Le graphisme enferme dans ses circonvolutions les éléments du visage et lui fait subir d’expressives déformations
Un profil apparaît dans la joue droite
On peut y voir le désir exacerbé de fixer le modèle dans tous ses aspects
Picasso a 80 ans
1962
L’enlèvement des Sabines
Cette toile est inspirée du célèbre tableau de David
Tableau réalisé en octobre 1962 au moment de la crise de Cuba et de la tension qui fait craindre un conflit mondial
C’est un cri d’horreur contre la guerre, l’image d’une panique collective en présence du crime aveugle et généralisé
L’allégresse de l’impérialisme romain révèle l’image de notre époque
Sur fond de ville antique, un cavalier porteur d’un bonnet phrygien rouge semble soustraire une femme au grand guerrier menaçant à droite
Picasso insiste sur les bébés piétinés ou tués
Entre les jambes du guerrier on retrouve la mère de Guernica qui hurle avec son enfant mort
Nature morte chat et homard
Le homard domine l’ensemble avec ses longues antennes, ses yeux hagards, une patte dressée dans un geste implorant et un peu agressif, une queue d’un rouge éclatant
Nous assistons à la rencontre des vivants (le chat) et des morts (les créatures de la mer)
Chatte sauvage qui vient de mettre bas et doit allaiter ses petits
Une bête hirsute, efflanquée, gigantesque mais embellie par l’admiration de Picasso pour la sauvagerie
La chatte s’est arrêtée dans son élan comme pour réfléchir
Buste de femme au chapeau jaune
Jacqueline appuie la tête sur la main droite et non sur la main gauche comme dans de nombreux autres portraits
Le traitement du chapeau en perspective a pour effet de repousser le personnage dans un espace plus profond
Picasso nous présente une vue de face et un profil
Buste de femme au chapeau
Dans le cadre austère et baroque du château de Vauvenargues Picasso a la nostalgie de l’Espagne
Il appelait Jacqueline qui est devenue sa femme « Jacqueline de Vauvenargues »
Il a vu aussi Jacqueline comme une reine d’Espagne d’où ce portrait en jaune et rouge
L’Espagne voulait le récupérer pour bénéficier de sa notoriété mais il refusa toute festivité pour marquer son 80ème anniversaire
1963
1964
1965
1966
1967
1968
1969
1970
1971
1972
1973
L’enlèvement des Sabines
Picasso suite à l’affaire de Cuba craignait une agression américaine
Comme tous les espagnols il ne pardonnait pas aux américains d’avoir pris Cuba à l’Espagne en 1898 (il avait 17 ans) et de plus il était communiste
Ce tableau est son dernier engagement politique
Le guerrier qui piétine la femme allongée ne règne plus en maître
Il doit affronter un cavalier porteur de lance qui arrive au galop
Portrait de Jacqueline
Depuis 1961 Picasso est établi au mas Notre Dame de Vie à Mougins
Jacqueline est un modèle qui se plie à toutes ses fantaisies
Ici, elle arbore un visage serein, émerveillé avec ses grands yeux et ses longs cheveux noirs
Harmonie de verts rehaussés de blancs qui évoque Matisse
Traits d’une pureté toute classique
Le buste est esquissé à larges paraphes noirs
Le peintre et son modèle
Picasso était fasciné par le thème du peintre et son modèle
Il nous montre le peintre armé de ses attributs, palette et pinceaux, la toile sur le chevalet, le modèle nu assis
Ce n’est pas la situation réelle de Picasso qui peint sans palette et sans chevalet sur une toile posée à plat
Plus qu’une évocation de son propre travail il s’agit d’un résumé de la profession
Ici, on voit le peintre de profil, en gros plan, avec son regard scrutateur
Du regard qui scrute au regard qui convoite la distance est peu mesurable
Femme couchée au chat
Picasso se passe du décor et des détails superflus qui encombrent ce qu’il voit
Le lieu c’est le lit et les coussins
Pour tromper son attente de l’homme qui doit lui rendre visite elle joue avec une fleur ou avec un chat
Ses gestes ne trahissent ni l’impatience, ni l’angoisse, ni la résignation
Tracé de Picasso ample et ferme
Jacqueline nue dans un fauteuil
Jacqueline aimait ce portrait qui la présente en visage de profil, corps de trois quarts et appuyant sa tête sur sa main gauche
Le portrait et son modèle
Ce tableau a été peint le 25 octobre 1964, jour des 83 ans de Picasso
Le peintre peint directement sur le modèle nu
Les dormeurs
A cette époque Picasso exprime son goût du banal et du quotidien
Ce tableau présente un bourgeois endimanché faisant la sieste affalé aux côtés d’une femme nue
L’écriture picturale est naïve et simplifiée
Le style anguleux pousse à la dislocation des membres et enchevêtre les corps l’un dans l’autre
Le grand nu
Picasso nous présente un corps disloqué, malmené, dans lequel toutes les parties sont sens dessus dessous, mais qui reste cependant intact
Maintenant Picasso cherche à garder l’unité du corps, sa cohésion
Malgré les simplifications « Tout y est »
A la fin de sa vie sa fascination pour le mythe féminin tourne à la hantise
Les femmes de ses dernières années ont des formes massives et rebondies, des proportions colossales
Carnets
Picasso ne se séparait jamais de ses carnets
Toute sa vie il dessinait à tout moment ; une courbe lui inspirant une femme, un drapé, un personnage en costume …
A sa mort on découvrit 175 carnets de tailles différentes (7.000 dessins) qui étaient autant de journaux intimes
Ce dessin réalisé en 1966 prépare la série des Mousquetaires
Les personnages du 16ème ou 17ème siècle inspirés par Velasquez ou Rembrandt sont avant tout des espagnols
Dans ces années où culmine sa vie il crée tout un monde étrange d’espagnols
Picasso revient à sa terre d’origine
Nu couché
La stature monumentale de ce corps de femme exposé frontalement montre à quel point, pour Picasso, la peinture c’est le corps de la femme
La véhémence du pinceau dit bien la vitalité de la peinture de Picasso dans ses années tardives. Il a 86 ans
Le gentilhomme à la pipe
Fougue baroque et éclat de la couleur dans la dernière période de sa vie
Tumulte des formes signifiant en fanfare le refus de la vieillesse et de la mort
Peints à coups de pinceaux brutaux aux larges traînées nourris de pâte, soulignés d’aplats de couleurs vives ces personnages sont des compagnons de la solitude qu’il s’est imposé dans son mas de Notre Dame de Vie à Mougins
Nu et fumeur
A la fin de sa vie Picasso peignait plusieurs toiles par jour
« Je suis comme un fleuve qui continue à rouler » dit-
Les personnages sont monumentaux
C’est la linéarité de la forme qui domine
Les plans de couleur sont remplis par des traits de pinceaux
Picasso a dit « C’est l’âge qui nous a forcé à arrêter, mais il reste l’envie de fumer. C’est la même chose pour l’amour. On ne le fait plus mais on en a encore envie »
Homme et femme
Nous sommes en 1968
Picasso dit « L’art est dangereux »
La chasteté dans l’art est en cela contradictoire que l’artiste est celui qui s’inscrit hors norme
Sa vision du monde est une transgression qui met en danger l’ordre établi
Sa capacité à transcender le réel le place au-
Il défie les pouvoirs
Il est l’homme à abattre
Toute sa vie Picasso s’est interrogé sur les mystères de l’amour physique
Femme à l’oreiller, Jacqueline
Nu peint entièrement de blanc et de noir
La position mi-
La force de l’expression du visage vient de l’incrustation presque naturelle du profil dans la face
Il disait « Jacqueline a le don de devenir peinture à un degré inimaginable »
Personnage rembranesque et amour
Tohu-
Déchaînement des rythmes colorés
Vase de fleurs sur une table
Superbes fleurs exotiques aux couleurs saturées
Le vase de fleurs est posé sur une table dont les pieds sont formés par des alignements de boules
Le vase contient des strelitzias sur leurs tiges épaisses qui se découpent comme des becs d’insectes stupides
Picasso nous offre une expression de la vie et de l’énergie alors qu’il a 88 ans
Baiser
Dans l’étreinte les deux visages affrontés sont emboutis l’un dans l’autre
Creux et bosses s’épousent étroitement
A la jonction des deux figures la chair semble pétrie en volumes pleins, narines dilatées, lèvres gonflées
Si leur visage est chaviré, l’homme et la femme gardent, lorsqu’ils s’embrassent, les yeux grands ouverts
Homme assis
Ce vieil homme assis qui nous dévisage d’un regard dilaté ne parle pas
Sa petite bouche est muette
Mais droit et stoïque sur son siège il nous crie par le vif de la couleur que la peinture c’est la vie mais aussi que vivre c’est regarder le destin en face comme un espagnol qui regarde la mort sans biaiser
Le matador
On reconnaît le matador à la résille qui retient sa chevelure
C’est un gentilhomme qui fume un gros cigare et porte jabot de dentelle
Vifs contrastes de couleur : orangé et bleu
La manière est rapide
En peignant Picasso murmurait « Je me dépêche … je me dépêche »
Vieil homme assis
C’est :
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Ce vieil homme est un hommage aux maîtres de l’art du 20ème siècle
La vie va se défaire : le moignon dit que le corps est atteint, la peinture qui dégouline brouille le visage, le regard éteint est bordé du cerne blanc des grands vieillards
Nu couché
Le corps de la femme étendue sur la plage est soumis à une sorte d’implosion ; ses membres dispersés éclatent dans toutes les directions
Le sexe est le foyer de flammes brunes d’où surgissent des petites figures noires fantomatiques
Le soleil blanc donne une impression de cauchemar éveillé
Le sable est rendu par des taches de peinture en relief, nouvelle technique de Picasso, (90 ans), pour accentuer la réalité de la peinture
Paysage, Mougins
L’écriture de ce dernier paysage est affirmée : points, taches noires et blanches, spirales, larges rayures en zigzag ou rayonnantes au centre, arête de poisson, trait vertical surmonté d’un rond, flèche oblique
Effet dramatiquement accentué par les tons verdâtres et opacifiés de l’ensemble
Les empâtements et les traces de brosse expriment la grande liberté de ce dernier paysage
Autoportrait (30 juin)
Grande crudité de cet autoportrait au visage ravagé, émacié, où les yeux et le nez prennent une place démesurée
Dans cette ultime effigie le peintre n’est qu’un regard
Regard angoissé « intensifié » par l’approche de la mort
Autoportrait (4 juillet)
Reprise de l’autoportrait du 30 juin par un découpage en facettes et un jeu de hachures violentes
Picasso a 91 ans
Lucide il regarde en face son avenir
Il n’adoucit pas, il n’arrange pas, il ne triche pas
Comment ne pas partager son angoisse ?
Femme nue couchée et tête
Le soir du 7 avril 1973, Picasso travaillait sur ce tableau
Le lendemain, 8 avril, à midi, son cœur cessait de battre.
PABLO PICASSO 6 / 6