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VERS 1ère Page  de PICASSO

PABLO  PICASSO  2 / 6

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Garçon nu

Ce tableau appartient à la préparation du « Meneur de cheval nu »

Travail sur le modelé des formes par la couleur

Insistance sur le contour pour faire tourner le volume

La présence d’un volume géométrique esquissé à droite fait de lui un préliminaire aux « Deux adolescents »


Meneur de cheval nu

Cette toile n’a en fait que deux couleurs : le corps du garçon est du rose de la terre comme le gris du cheval est, légèrement rosi, le gris bleuté du ciel

Le modelé est à peine marqué ; il suffit du noir du contour

Le paysage désertique du fond : plus aucun élément extérieur entre la scène peinte et le spectateur

Picasso s’est laissé allé au plaisir des rythmes plastiques naturels, du mouvement des corps dans leur équilibre


La mort d’Arlequin

Cette gouache marque l’abandon du thème des Arlequins

C’est l’époque de l’installation de Fernande chez Picasso

Arlequin avait servi à Picasso à s’inventer un autre monde permettant de s’évader du malheur et de la misère de la période bleue

Gertrude Stein persuade Picasso que la tâche d’un artiste était de dire le XXème siècle dans ce qu’il avait de différent avec le passé

Elle affirme à Picasso que l’évasion n’est pas une solution

Les visages sont devenus plus que jamais des masques

Le blanc n’était pas considéré comme une couleur mais comme la négation de la couleur

Le blanc est la couleur des extrêmes : l’érotisme ou la mort

Le visage enfariné des deux Arlequins penchés sur le cadavre  expriment cet extrême de la mort


Le harem

Ce tableau est une parodie du Bain Turc de Ingres

Les corps déliés sont saisis dans l’intimité triviale de la toilette

Ils sont collés bout à bout sans réelle cohérence

La maquerelle ratatinée au fond de la pièce

Le colosse étalé aussi impudiquement que la grasse odalisque à droite du tondo de Ingres

Le solide casse croûte de paysan qui insulte la délicatesse du thé servi sur la table basse du Bain Turc

Tout cela confirme qu’il s’agit d’une parodie du Bain Turc


Deux adolescents

Toile représentative du classicisme

Monochromie ocre de Gosol qui prend la place du rose

Contours affinés et sans recherche de modelé par la couleur

Blocs de pierre géométriques qui servent de support notamment à des poteries en arrière plan

C’est le dessin au trait des contours qui construit les volumes en les faisant tourner comme Picasso a appris à le faire avec sa première série de gravures en 1905

Pureté des proportions avec la frontalité du garçon debout


Le grand nu rose

Ici l’arrêt du temps est complet

Nous plongeons dans une éternité dépouillée et claire

La couleur, variant de l’ocre rouge à l’ocre et au rose est posée très légèrement et très fluide sur la toile

Les contours sont marqués par un trait de pinceau plus brun d’une extrême finesse

Absence presque totale de modelé sinon par de subtils renforcements et éclaircissements par la couleur

Attitude hiératique et sereine qui fait songer aux statues grecques, à Gauguin ou au Grand Baigneur de Cézanne

Dans ce nu de Fernande Picasso vise à la monumentalité d’un archétype anatomique plutôt qu’à la ressemblance

Il réduit le visage à un masque totalement inexpressif mais rigoureux dans ses volumes et son architecture


La porteuse de pain

La Porteuse de pain est un exemple de la façon dont Picasso s’empare de ce que lui apporte la réalité de Gosol

Ce qui l’intéresse, c’est la dignité du port de la paysanne portant les miches de pain en équilibre sur la tête

Picasso simplifie le visage en son masque

Réceptivité de Picasso à l’aspect monacal du vêtement, à l’équilibre naturel de la femme, à la manière dont la coiffe met en valeur le visage

Au sortir d’une période d’idéalisation Picasso semble éprouver le besoin de remettre les pieds sur terre


Nature morte au porron

Picasso supprime l’espace entre la table et la paroi

Ce sont les objets qui créent la profondeur, des objets traditionnels typiques de cet endroit isolé de toute industrie qu’est Gosol

Deux objets en verre, deux objets en céramique

- élégante burette à huile

- porron triangulaire

- petit pot trapu avec couvercle

- simple cruche de terre

Jeu dynamique des contrastes (verre et terre, les couleurs) et des similitudes (rond massif, burette et porron plus élancé)


Les adolescents

En été 1906 Picasso séjourne à Gosol dans les Pyrénées espagnoles

Cette visite en Espagne dans ce hameau proche d’Andorre nous révèle l’engouement de Picasso pour la civilisation ibère archaïque

Ce classicisme méditerranéen est souligné par les corps sveltes et la jarre que le personnage féminin (androgyne) porte sur la tête

La sveltesse de leur âge est compensée par une certaine lourdeur

Le coloris terreux tend à évoquer la boue


Les deux frères

Si ce jeune garçon nu qui porte son frère sur le dos rappelle les Saltimbanques de 1905 (le tambour au sol) on est loin des êtres accablés et faméliques de la période bleue

Le corps du jeune homme affirme sa santé : courbe de l’épaule, rondeur de la cuisse, fermeté du mollet

Le volume s’exprime par le modelé des tonalités roses, couleur d’une chair bien portante

La position du personnage qui rappelle la statuaire archaïque concourt à l’impression de stabilité

Teinte de la terre ocre du village de Gosol

Picasso s’entête à pratiquer la monochromie au moment où la tendance dominante, le fauvisme, est à l’usage de la couleur

Un des tableaux culminants de la période classique où Picasso rivalise avec Ingres


La toilette

Une des rares toiles de cette époque à n’être pas exclusivement monochrome

Œuvre du classicisme du début  de séjour à Gosol

Grande délicatesse de la mise au point du contour de la jeune fille nue qui se coiffe, image idéalisée de Fernande

La couleur éclaire la fluidité des contours de la jeune femme et l’harmonieux mouvement de ses bras relevés

La couleur profile la servante drapée construite dans des vêtements traités par des hachures

Simplicité sereine des deux attitudes

Par delà la référence au classicisme de la Grèce archaïque c’est l’élan primitif de l’art ibérique que Picasso redécouvre


La coiffure

Thème déclenché par la découverte du Bain Turc d’Ingres au Salon d’Automne de 1905 avec le groupe à droite des deux femmes nues se coiffant

La beauté féminine et la sensualité s’exprime dans les cheveux longs

Le miroir réfléchit le thème de la fragilité de la beauté

Le petit garçon nu évoque Cupidon

Concentration à sa tâche de la femme qui tient les cheveux

Palette presque monochrome ocre, interrompue au centre par la chemise bleue

Impression d’une composition extérieure (femme assise sur un bloc de pierre et enfant sortant du bain)

Certains critiques décèlent une influence de l’art japonais (attitude penchée de la femme qui coiffe, jeune fille assise qui tourne le dos au spectateur)

Manet avait été fasciné par l’art japonais


Nu féminin sur fond rouge

Nous retrouvons le thème sensuel de la chevelure tenue par une main

Ce tableau illustre une recherche de Picasso donnant lieu à une technique qui est à l’opposé du trait net et précis de la majorité des œuvres de cette période


Autoportrait puéril

Image austère privée de tout caractère individuel : le peintre s’est fait les traits de ses lointains ancêtres ibères

Le visage devenu masque abrite des yeux soulignés par l’immense arc des sourcils, un nez anguleux et une oreille démesurée

Cou cylindrique, buste solidement charpenté

Picasso jamais ne voulut se défaire de ce portrait


Femme nue se coiffant

Picasso sensible au thème de la chevelure flottante ou retenue par une main dont la sensualité le fascine

Le personnage porte son bras droit aussi haut que possible vers la gauche, position qui a pour conséquence la prépondérance apportée au volume

Les hanches de la femme sont élargies et Picasso apporte moins d’intérêt au bas du corps


Autoportrait

Le peintre semble surgir du néant d’un fond uni

Rude simplification mise en œuvre  par Picasso

Influence de l’art ibérique conduisant à cette figuration distanciée par rapport au réel

Mise en valeur de l’essentiel : ténacité du regard et solidité du corps

Le visage est devenu un masque : sa forme est réduite à un ovale, les yeux ourlés sont habités d’une noire prunelle (influence de la peinture romane catalane), l’oreille est très agrandie

La tête est posée sur un cou cylindrique qui se place lui-même sur un buste large

Anatomie fortement charpentée par l’horizontalité des clavicules et les verticales qui définissent le torse


Autoportrait à la palette

Il réduit la tête à l’ovale du masque, il accuse les traits et géométrise la configuration pour décupler la puissance du « regard aux trois épées croisées » (Eluard)

Craignant la typhoïde, Picasso a quitté Gosol précipitamment et revient à Paris les cheveux coupés court

Le regard de ce peintre au torse et bras pleins de force ne fixe rien : il est tourné au-dedans de lui-même

La plus grande partie de la palette est encore vide ; le gros du travail est à faire

Picasso qui a 25 ans se peint en adolescent car il se sent nouveau et c’est maintenant qu’il va commencer le grand ouvrage de sa vie

Il a donné à son buste un côté conquérant pour marquer la création d’une nouvelle peinture


Deux femmes nues

C’est une des œuvres de la préparation des « Demoiselles d’Avignon »

Convergence avec la solidité massive des tahitiennes de Gauguin (que Picasso venait de découvrir au Salon d’Automne) et avec les Baigneuses se Cézanne

Visage de la femme de gauche réduit à son masque

L’autre femme est réduite à son  profil

L’attention portée aux oreilles révèle la réflexion sur la sculpture ibérique

Assise solide des pieds

Grossissement des bras et des mains le plus proches du spectateur


Femme nue assise les jambes croisées

Cette toile marque le moment où après la découverte de Gauguin c’est l’insertion des volumes du corps dans l’espace qui devient le sujet du tableau

Le masque avec les yeux vides est à mettre en rapport avec la découverte par Picasso d’une sculpture nègre achetée par Matisse

Max Jacob écrit : « Nous dinâmes un soir chez Matisse, Apollinaire, Picasso et moi. Matisse prit sur un meuble une statuette de bois nègre. Picasso la tint à la main toute la soirée »

Il s’agit d’une petite statuette Vili, un homme assis remarquable par ses très grands yeux vides

Picasso portait une extrême attention à la forme de l’œil


Portrait de Gertrude Stein

Ecrivain américain, Gertrude Stein, fit sortir Picasso du cercle étroit de Montparnasse et lui fit rencontrer Matisse

Elle et son frère Léo par leurs achats assurèrent à Picasso un revenu qui le sortait de la misère

Homosexuelle, elle avait pour compagne Alice Toklas

Ce tableau nécessita 90 séances de pose

Il y avait chez Picasso beaucoup de désordre, de poêles chauffés au rouge, de cuisine impromptue

Picasso pour peindre s’asseyait sur une petite chaise de cuisine. Fernande pour distraire Gertrude lui lisait les Fables de la Fontaine

Picasso voulait donner à Gertrude la pose de Monsieur Bertin d’Ingres

Un jour Picasso effaça la tête et ce fut la fin des séances de pose

Au retour de Gosol en août 1906, Picasso peignit très vite la tête sans revoir Gertrude. Il avait réduit le visage à son masque

Dans son livre de Souvenirs, Fernande a noté qu’à Gosol la peinture de Picasso était devenue la peinture d’un homme adulte

Il fêtait ses 25 ans le 25 octobre 1906


Buste de femme

Volonté de primitivisme qui caractérise plusieurs bustes et têtes de femme de la même période

Construction par hachures péremptoires

Autorité du masque aux traits puissants

Yeux globuleux cernés de noir

Indication sommaire de la base du nez triangulaire et de la bouche

Géométrisation angulaire du buste


Un personnage douteux, secrétaire périodique d’Apollinaire, avait volé deux têtes ibériques au Louvre et les avait vendues en mars 1907 à Picasso qui ignorait leur provenance, ce qui lui valut des ennuis

Leur présence dans son atelier l’incite à accentuer le caractère archaïque de ses figures


Max Jacob

Max Jacob fut le premier ami français de Picasso qui le rencontra lors de son exposition chez Vollard en 1901

Le regard du poète, intense, triste et  pénétrant fixe le spectateur

Les larges yeux surplombent le centre du tableau

Les arcades sourcilières, telles des voûtes, soutiennent son grand front d’où semble jaillir la lumière

Nez taillé comme un roc

Bouche sensuelle et sérieuse

Couleurs de Picasso : bleus, terre orangée et blanc

Portrait primitiviste par sa puissant stylisation et ses tons terriens

Jalon de l’évolution de Picasso vers la nouvelle notion de l’espace cubiste


Buste de femme nue

Le visage de cette femme est impersonnel et schématique comme un masque

Mais la tête légèrement inclinée et les paupières baissées rendent le profond recueillement et la quiétude somnolente du modèle

Le chromatisme harmonieux et calme des tons chauds et l’épaisseur unie de la matière colorante est en parfait accord avec l’agencement clair et géométrique du tableau


Autoportrait

Dans sa facture primitiviste Picasso remplace les formes arrondies par des volumes qui semblent coupés à la hache

Il expérimente la nouveauté sur son propre visage

Accroissement des yeux et de l’oreille

Traits du visage taillés à  coup de serpe

Passage de la violence exprimée par la peinture à la violence infligée à la peinture

Relief des traits de peinture dans la chevelure

Epaisseur de la pâte qui permet de creuser avec le manche de la brosse

Cette facture grossière se retrouve dans les bustes de femme qui sont des études pour les Demoiselles d’Avignon


Mère et enfant

On est agressé par les couleurs très vives et le contraste violent du rouge et du vert

Les surfaces planes qui semblent découpées dans la couleur créent une image très sommaire, étrangement sauvage

Yeux inégaux, nez réduit à un simple trait  bordé de hachures comme pour marquer le relief

Influence de l’art Nègre découvert par Picasso au Trocadéro

Les hachures renforcent l’impression de déséquilibre

Picasso veut exprimer l’impression de barbarie inquiétante et sacrée qu’i a ressentie face aux masques nègres


Nu à la draperie, Danse aux voiles

Nu inscrit dans la verticalité de la toile, fait pour être lu couché

Contraste de plans géométriques hachurés

La facture énergique du graphisme polychrome fait penser à la technique picturale expressive de Van Gogh

En dépit du caractère statique et de la pose un peu langoureuse du modèle tout le tableau exprime un fort dynamisme

Un triangle renversé à peine mis en équilibre sur un arc concave

Les rythmes des lignes et les coloris sont entraînés dans un dynamisme de l’équilibre


Buste de femme (Etude pour les Demoiselles)

Picasso a réalisé de nombreuses études pour prépare les Demoiselles

Ce buste illustre ces travaux par :

-simplification des formes (sein volumineux partant du cou)

-stylisation qui met en valeur certains détails par des exagérations formelles (yeux vides, oreille forte, réduction du visage à un ovale)

-le nez en « quart de Brie »


Les Demoiselles d’Avignon

Picasso travaillé plus de neuf mois à cette œuvre manifeste

Ses amis exprimèrent leur regret et leur consternation

Picasso roula la toile et la garda neuf ans dans son atelier

Il s’agit de la  présentation d’un bordel de Barcelone situé rue d’Avinyo

Mais il fallait à l’époque un titre plus pudique

Présentation de cinq prostituées

L’humanité des femmes a été supprimée ainsi que toute trace de sentiment

Les corps roses et ocres presque dépourvus de formes sont disposés en une diagonale basse de gauche à droite que retient une silhouette accroupie à droite

Les trois femmes à gauche ont le visage rigide des masques de Gosol

Une tête de profil montre un œil de face

Deux têtes de face ont le nez de profil

Les corps sont constitués de lignes droites et de plans angulaires

Ils se détachent sur un fond d’un bleu changeant

La seule suggestion de profondeur est un rideau brun que pousse une main levée

A droite, sur le visage de la silhouette accroupie, faisant face par-dessus son dos, les traits sont sauvagement entremêlés

La tête de cette femme accroupie est figurée simultanément selon une pluralité d’angles de vue

Le visage de la femme au-dessus semble une longue arrête, un groin rudement hachuré ; on dirait un masque venu du Congo

A droite aucune des têtes n’est de la même nature que les trois autres

Dans cette moitié du tableau les plans angulaires sont plus aigus et plus nets

Ce tableau est la première manifestation du cubisme

Une telle peinture ne relève plus de la représentation plus ou moins transposée de la réalité mais de sa reconstruction à partir d’un nouveau langage plastique

Influence de Cézanne des Baigneuses cherchant à articuler ensemble des corps nus

Cette géométrisation implique une nouvelle conception de l’espace : l’espace n’est plus simulé ; il constitue un ensemble de structures à mettre en œuvre

Les deux filles centrales dérivent des simplifications de 1906 ; celles de droite avec leurs formes plus anguleuses engagent dans des voies nouvelles

L’achèvement de ce tableau correspond à :

- crise avec Fernande qui ne pouvant avoir d’enfant avait adopté une jeune fille de treize ans, Raymonde, qu’elle renvoya à l’orphelinat

- séparation provisoire avec Fernande en août

- violence en relation avec la misogynie de la Belle Epoque où la femme est vue comme dangereuse pour les hommes

- violence politique en France depuis l’arrivée au pouvoir de Clémenceau ; les vignerons du Midi, proches de la Catalogne, se mettent en grève et la troupe envoyée contre eux fraternise

- rupture totale avec tout le réseau de conventions de la peinture occidentale depuis la Renaissance

Composition à la tête de mort

Un peintre ami, Wiegels, s’est suicidé suite à la consommation de drogue

Fernande écrit « Nous décidâmes de ne jamais plus toucher à la drogue »

La présence de la palette avec cinq pinceaux pour rappeler la main dit bien que ce « memento mori » s’adresse à un peintre

Picasso peint son atelier comme après sa propre mort, laissant ses objets familiers entourer le crâne sur la table, la pipe s’y appuyant sans complexe

Le crâne, comme ceux peints par Cézanne, est sans machoîre


Femme nue assise

Picasso veut souligner le principe passif de la femme par l’asymétrie et les brisures

La géométrisation brutale donne à la femme l’allure d’une statue mécanique, d’un robot taillé dans du bois

Picasso veut exprimer la souffrance qui est selon lui l’essence éternelle de la femme

Cette souffrance s’exprime par l’accablant coloris brun, le dramatisme du contraste des tons, les déformations corporelles et la mimique

Elle paraît assise par le décalage de la jambe droite et l’esquisse d’un bloc

C’est le désaxement latéral du visage et des bras qui la donne à voir assise

Femme à l’éventail

Picasso poursuit l’élaboration de structures mises au point dans les Demoiselles et développées dans le Nu à la draperie et qui annoncent le cubisme

Le corps féminin déploie sa robuste architecture dans le plan de la toile et est soumis à une réduction géométrique rigoureuse et systématique

Masses abruptes contrastées par des bruns cuivrés, des noirs et un blanc éclatant

Frontalité nègre du visage-masque

Conçu comme un portrait de Fernande Olivier ce tableau révèle les traits propres à la nature du modèle : calme, sérénité classique et caractère statique majestueux.

Les proportions monumentales de ce tableau font pressentir « l’ordre colossal » du Picasso de l’année 1920



Fermière en pied

Madame Putman, la fermière voisine de Picasso cet été l’a fasciné par sa solidité

Il reprend avec cette peinture l’expression de la monumentalité géométrique

Il développe l’aspect primitiviste simplifiant au maximum les formes de façon à augmenter l’expressivité des volumes et de leurs contrastes

Volumes puissamment taillés et masse chargée d’énergie


Carafon et bols

Le problème de l’espace est résolu par des moyens plastiques et non pas selon les lois de la perspective visant à créer l’illusion

Manière monumentale de grouper les formes en les concentrant en spirale autour de l’espace unique

Ostensible répétition rythmée des arcs et de ovales

Energie de la touche et perfection de l’exécution


Maisonnette dans un jardin

Picasso passe quelques semaines à la fin de l’été 1908 dans le calme petit bourg de « La rue des bois », près de Paris

Picasso y retrouve son équilibre et une simplicité presque ingénue

Dans ce tableau une maison est une maison et un arbre est un arbre

Picasso rend l’espace de son paysage par une juxtaposition de larges plans inclinés les uns par rapport aux autres

Il fait sentir la profondeur par la hauteur différente des arbres qui reculent dans un rythme mesuré

Palette de couleurs naturelles

On a l’impression d’une vision du monde objective : un chemin et une maison derrière une clôture, un champ labouré derrière l’arbre de droite et au loin une petite colline sous un ciel couvert


Pot, verre et livre

Sentiment de contemplation sereine

L’œil lit facilement les formes, lignes et surfaces qui tracées d’une main sûre ne sont pas pour autant trop accusées

La composition lie trois objets et trois surfaces

La réfraction prismatique de la paroi du pot par le verre apporte une note de merveilleux dans ce monde inanimé


Compotier, fruits et verre

Au début de 1909 Picasso exécute toute une suite de natures mortes, proches par le choix des objets et leur place dans l’espace des recherches de Cézanne

Les touches légères et fondues, les stries de la brosse sur les fruits et l’harmonie froide des couleurs expriment la volonté de recherche de Picasso

Cette nature morte est construite comme une vue panoramique, prise du « haut d’une colline » d’un groupe d’objets se trouvant dans la plaine désertique d’une table

Picasso laisse le tableau inachevé pour maintenir l’impression trompeuse de « nature morte-paysage »


La reine Isabeau

Le tableau est ainsi intitulé à cause de la ressemblance de la coiffe avec celles du temps d’Isabeau de Bavière

C’est une nature morte de femme qui se trouve en fait devant une table portant un compotier

Le visage est réduit à ses volumes courbes et est très stylisé, tout comme la main

Toile pleine de rythme et d’élan gracieux


Pains et compotier aux fruits sur une table

Début 1909 Picasso a voulu peindre un carnaval au bistrot, projet qu’il a abandonné

Il a remplacé les  personnages réunis autour d’une table par des objets pratiquement disposés de la même manière

Les pains à droite et au centre se substituent aux bras ; la tasse renversée et la pomme remplacent les mains posées sur la table ; les deux diagonales sous la table évoquent les jambes

Influencé par Cézanne, Picasso veut donner à cette toile un caractère classique par :

- simplicité et immobilité des volumes

- appréhension de l’espace

- choix des couleurs

Picasso a  peint l’abattant à grands coups de pinceau en lui donnant assez de luminosité  pour dominer la composition

Objets disposés aussi solennellement que pour l’Eucharistie

Grande dignité du compotier et de la serviette d’un blanc froid

L’arrière plan ressemble aux tissus somptueux de Cézanne, aux jungles du Douanier Rousseau ou aux forêts de La Rue des Bois


Dame à l’éventail

Ce tableau a quelque chose d’un portrait mondain

Installée dans un fauteuil cette élégante à la coiffe pointue, au grand jabot tuyauté, tient un éventail dans une main et un parapluie dans l’autre

Couleurs froides vert malachite et gris argenté

Le regard scrutateur hypnotise froidement le spectateur

Le visage est traité comme un masque taillé et poli par la lumière

Le geste anguleux de la main est d’une grâce affectée

Cette femme ne semble exister que par son apparence extérieure

C’est d’ailleurs un vase vide aux contours brisés qui la caractérise


Fernande aux fleurs

Le découpage en facettes courbes s’oppose au découpage géométrique du bouquet de fleurs en fond

Un double menton semble être apparu que  l’intéressée n’avait pas encore à ce moment même si elle tendait à s’épaissir

Le portrait devient ce que l’imagination plastique de Picasso tire du modèle en le transformant

Ni agressivité, ni sensualité dans ce tableau

Picasso n’a rien contre Fernande, il ne la désire plus non plus : il la peint à partir de ses préoccupations de peintre cubiste et cela sufffit


Fernande aux poires

Un des ultimes portraits de Fernande

Il a été peint à Horta de Ebro où Picasso est allé passer l’été et retrouver les lieux où il avait vécu en 1598 avec son ami Manuel Pallares

Le découpage en facettes permet de modeler par plans géométriques superposés ou imbriqués les uns dans les autres

La reconstruction géométrique s’étend aux tentures et crée la monumentalité

Picasso a créé le contraste avec les courbes des poires placées sur la table à gauche

La palette s’éclaire des couleurs vives de la lumière méditerranéenne qui invite Picasso à clarifier ses formes


L’Usine à Horta de Ebro

Le motif est parfaitement réel et concret ; seulement il apparaît épuré par l’imagination de Picasso et embelli par son rêve

Les palmiers verts qui atténuent l’austérité du paysage sont inventés

Le groupe de bâtiments géométriques irradie en profondeur et en hauteur ses rythmes angulaires et fractionnés

Jeu envoûtant de ces facettes polies, gris argenté et ocreuses

Un paysage d’usine se métamorphose en un mirage prismatique qui surgit de l’air pur et de la lumière crue des montagnes catalanes

Opposition entre les formes droites des bâtiments et les palmiers imaginaires

Le découpage géométrique du paysage se poursuit dans le ciel et prend un éclat presque métallique


Le bock

Première des natures mortes qui pose la relation entre les objets et la pièce où ils se trouvent

La table projetée vers nous est lourde, rustique comme la cheminée en arrière plan et comme le miroir posé sur elle dont on distingue le bas du cadre

Ces prosaïsmes jurent avec le cristal de la carafe et les idées de luxe de Fernande

Mais les vraies facettes de la carafe de cristal rejoignent les facettes inventées des découpages cubistes

Picasso oppose les découpages des objets en facettes à gauche (facettes réelles de la carafe, facettes peintes de la pomme au premier plan et du pain entre la carafe et le bock) avec des objets laissés dans leur masse et rotondité intacte (bock central, pomme de droite,torsades de la nappe)

Picasso aime confronter le découpage en facettes et la figuration classique


Jeune fille à la mandoline

Picasso a utilisé un jeune modèle professionnel, Fanny Tellier

La fragmentation des formes laisse apparaître la grâce du modèle, l’onde de sa chevelure, l’élégance d’un sein et quelque chose du regard

Picasso a rabattu le profil caché du visage sur le plan de la toile ce qui offrait un passage avec le fond du tableau découpé également en facettes


Portrait de Wilhelm Uhde

Wilhelm Uhde était un collectionneur et écrivain d’art allemand

Picasso construit la composition par plans géométriques à facettes d’où émerge le personnage dont la lisibilité reste pourtant entière, le découpage restituant l’expression du visage et la ressemblance

La construction est fondée sur un découpage uniforme en facettes fondues les unes dans les autres par des passages mettant à plat les volumes aux contours dissous

Le col cassé s’accorde à la raideur toute prussienne de l’expression


Portrait de Kahnweiler

Kahnweiler devint le marchand de Picasso en 1908. Il a posé une vingtaine de fois pour ce tableau

Picasso renonce à la construction géométrisée pour faire éclater la structure unitaire du sujet et diversifier les angles de vue

Notre lecture ne se situe plus au niveau des apparences imitées, des contours qui les enferment mais des structures qui sous-tendent la figure et l’ordonnent dans son espace

Le volume est morcelé en de multiples plans découpés qui se déduisent et se superposent

La rigueur du portrait est accusée par l’austérité de la couleur

Quelques motifs identifiables : les cheveux, les yeux, le nez, la bouche, la chaîne de montre et les mains

A gauche nature morte d’une bouteille sur une table

Plus haut, sculptures de la Nouvelle Calédonie accrochées au mur de l’atelier

Cette décomposition des formes et des articulations du réel est le cubisme analytique

La réduction au signe des éléments du réel permet au peintre d’intégrer dans un même champ l’homme, les choses et l’espace


Portrait de Vollard

Vollard fut le marchand de Cézanne et de Gauguin : c’est un marchand puissant qu’il n’est pas mauvais de ménager

En 1910 il a 42 ans

Ce portrait est marquant par la ressemblance qu’il entretient avec son modèle

Picasso travaille plusieurs mois sur cette toile sans faire poser son marchand

Picasso voulait libérer ses portraits cubistes de l’obligation de ressemblance : ce tableau est donc une œuvre de transition qui trouve sa force dans l’équilibre entre éléments abstraits et motifs concrets, entre un espace proprement cubiste fait de multiples facettes et un visage qui en se fondant dans cet espace ne perd rien de sa lisibilité

Vollard dira avec satisfaction :

« le fils d’un de mes amis, un gosse de quatre ans, posa un doigt sur la toile et dit sans hésiter : « ça c’est Voyard »


Photo de Picasso en 1910


Homme à la pipe

C’est la première expérimentation de l’armature pyramidale dans la composition d’un personnage

Cet homme moustachu est en train d’écrire

A droite il y a un journal : on voit le bout du titre « AL »

Le volume de la tête, le traitement de l’œil, l’arrête du nez, l’inclinaison de la pipe suggèrent que le modèle était Apollinaire


L’accordéoniste

Le titre doit s’entendre au féminin

Picasso a écrit le 25 juillet «  je fais une jeune fille avec un accordéon »

Picasso crée une armature pyramidale pour que le sujet recomposé soit mieux identifiable, car l’armature pyramidale correspond à la géométrie d’un personnage assis

L’accordéoniste n’offre aucun repère, seulement la fragmentation de l’instrument

L’asymétrie de la composition recrée le mouvement de la musicienne


Le 21 août 1911 la Joconde a été volée

En 1907 Gery-Pieret avait volé trois statues au Louvre ; il en avait vendu deux à Picasso et il a porté la troisième à « Paris Journal » qui en fit grand cas pour montrer combien il était facile de voler au Louvre

Soupçonné de recel Picasso fut inquiété : il était étranger

Il a paniqué et quasiment renié Apollinaire


Bouteille de Pernod et verre

Les lettres traversant le fond font partie des inscriptions portées sur la vitrine invisible du café qui constitue l’arrière plan de la nature morte

Le tableau révèle le nouveau goût de Picasso pour le caractère concret et matériel du monde : bouteille de Pernod et verre à pied

Contraste entre les réfractions prismatiques des objets en verre et la texture fibreuse du bois d’un ton chaud

Les boissons spiritueuses évoquent la vie contemporaine

En 1912 Apollinaire prépare son recueil de poésie « Alcools »

Au cours de la première moitié de 1912 le cubisme de Picasso évolua de l’analytique vers le synthétique

L’introduction dans les tableaux des lettres ouvrit la voie à la technique du collage

Durant un an et demi Picasso travailla en étroite relation avec Braque. Il est difficile de distinguer leurs tableaux de cette époque


Nature morte à la chaise cannée

Œuvre charnière autour de laquelle s’articule l’histoire du cubisme

En introduisant un morceau de toile cirée dans un tableau pour signifier une chaise Picasso révolutionne l’acte de peindre

Il pose la question du conflit entre l’art et la réalité. Pourquoi l’illusion du pinceau alors qu’on peut représenter en vrai avec un objet réel ?

Dans la partie peinte on reconnaît des signes déjà codifiés : citron, verre, pipe qui sont le quotidien des tables de bistrot

La forme ovale pour éviter les fuites orthogonales des angles est soulignée par un faux cadre en corde qui évoque le pourtour de la table

L’introduction d’un matériau de rebut dans une œuvre d’art ouvre la voie à l’art de l’assemblage et au collage


Femme nue « J’aime Eva »

Le visage éclaté en diverses projections, comme le corps, retrouve une féminité marquée

Effet renforcée par les couleurs acides et très légères en contraste avec les plages sablées

Picasso a rencontré Eva Gouel à l’automne 1909. Elle était l’antithèse de Fernande, au physique comme dans la vie

Elle n’aimait ni la bohème ni les fantaisies financières

Elle apporte à Picasso des habitudes familières, un talent de cuisinière et la tranquillité d’esprit dont il avait besoin

Picasso fut très discret pour cacher cette liaison

Il lui avait donné un nom de code « Ma Jolie », titre d’une chanson en vogue

Elle mourut en décembre 1915 de la tuberculose ce qui bouleversa Picasso


Homme à la guitare

On retrouve les caractéristiques du cubisme analytique : camaïeux de gris, brun, ocre, légers frottis transparents, fragmentation des volumes en facettes et géométrisation des plans

Le personnage est impliqué dans l’armature spatiale

Introduction de lettres d’imprimerie ( KOU) et d’un détail réaliste (la volute du fauteuil)

Personnage en pied. Picasso a ajouté une bande du tiers de la toile en bas.

Trois zones distinctes :

- tiers supérieur à dominante ocre-brun ; représente l’étape de la fragmentation du volume en facettes

- partie centrale traitée dans des beiges avec des frottis transparents et lumineux ; s’ordonne en plans géométriques autour d’un centre représenté par le trou de la guitare

- la partie inférieure la plus claire et la plus simplifiée fondée sur des plans rectilignes et une architecture de lignes

passage progressif du lourd et du plein au léger et au transparent


Nature morte au violon et aux fruits

Association du violon et du compotier sur une table derrière une chaise à barreaux

Il a découpé dans le papier la coupe du compotier, une jupe pour la table, un support pour la crosse du violon et un rectangle à droite pour servir d’arrière plan au verre

Un extrait de journal différent sous le verre pour souligner la réfraction du verre

Motif fortement affirmé du dossier de chaise gris

La table a deux dessus : un en faux bois et rectangulaire, et blanc et rond

Deux pieds au compotier, l’un semblable à une colonne, l’autre associant des angles et le galbe d’un violon en faux bois

Le violon est disloqué ; caisse de résonance en faux bois, papier bleu pour les ouïes, ferme dessin de la crosse du violon en paire d’yeux

Le violon penche à droite, le compotier à gauche ce qui donne un certain équilibre

Dans le compotier trois gravures botaniques : une pomme, une poire et un coing


Portrait de Guillaume Apollinaire

De leur rencontre fin 1904 à sa mort en 1918 Apollinaire fut l’ami le plus proche de Picasso. Le portrait a été réalisé pour la publication du recueil « Alcools »

Ce portrait aurait pu être en papiers collés comme on le voit par la composition en bandes verticales.

L’allure du poète est recréée par la décomposition en plans, la courbe du menton, le nœud de cravate et la forme du chapeau


Guitare et Diluvio

L’élément le plus frappant de cette guitare est la page du journal « El Diluvio » daté de Barcelone le 31 mars 1913 dont les deux morceaux déchirés constituent un ensemble par rapport aux autres éléments de la composition

Bandes de tapisseries damassées et papiers unis rehaussés d’encre et de fusain

Les bandes de papier jouent de l’opposition du clair et du foncé pour animer l’espace


Bouteille de vieux Marc

Le journal date du 15 mars 1913

Le guéridon est figuré par un contour qui lui donne son relief et par un morceau de galon

Ces fragments de journaux et de papier peint sont des références directes aux réalités de la vie

Il s’agit de citations brutes du réel qui n’ont besoin que de quelques raccords au fusain pour exprimer la modernité quotidienne

Un poète a dit que « les papiers collés sont les proverbes de la peinture »


Violon et verres sur une table

Le principe dominant de ce tableau est la structuration au moyen de plans simples disposés de front


Instruments de musique

Les structures paraissent être suspendues ou flotter dans l’espace limité par la forme ovale de la toile

Une cascade de formes différentes de contour et de couleur est solidement fixée au croisement de deux larges bandes noires

Violon rose blanc, guitare jaune brun et mandoline vert sombre

Les instruments sont représentés par des signes qui sont une sorte de hiéroglyphes et qui sont colorés de façon subjective (rose vif, bleu et vert velouté, brun foncé et jaune stable)


Femme en chemise dans un fauteuil ( Etude )

Cette étude est une des nombreuses études préparatoires à la toile qu’il n’a pas exécuté sous le coup d’une intuition brutale

Picasso éprouve le besoin de réintroduire une présence féminine dans la peinture

Dans l’étude le visage est dessiné comme tel ainsi que la chevelure

Le fauteuil aussi est vrai

Le seins sont doublés mais on ne comprend pas bien pourquoi

Le portrait est inspiré d’Eva avec laquelle il  partage discrètement sa vie


Femme en chemise dans fauteuil

Avec cette toile s’achève la période orthodoxe du cubisme

Picasso aborde une réalité moins austère pour enrichir son œuvre d’éléments du réel proches de la vie

La rigueur cubiste s’associe à la réalité la plus familière dans un climat fantastique

Elle devint une œuvre de référence des surréalistes

Selon eux Picasso a affranchi la peinture de ses contraintes imitatives et a rejoint les mutations poétiques de Breton et de ses amis

Picasso place une femme abstraite reconstruite conceptuellement dans un vrai fauteuil

La couleur réapparaît dans les tableaux

La rigueur cubiste s’y associe à la réalité la plus familière

Les seins sont doublés : modèle européen et modèle nègre

Les plis souples de la chemise sont décorés d’un ourlet festonné

Le triangle du visage est adouci par le motif ondulé des cheveux


Violon

Œuvre réalisée avec de moyens réduits : deux morceaux de papier journal, quelques lignes et hachures au fusain

Picasso découpe une forme irrégulière dans du papier journal et y ajoute un manche de violon surmonté de sa crosse

Il trace sur le papier journal quelques lignes qui composent une partie du violon

Il place dans la partie supérieure droite la découpe restreinte du journal qui joue le rôle de fond et entre en concurrence avec le morceau de journal employé comme motif

Le jaunissement du papier évoque la couleur du bois du violon

Les feuilles de papier journal sont décalées de manière à dessiner une diagonale décalée vers le haut

Cette instabilité est compensée par des hachures au fusain à droite


Le joueur de cartes

Picasso s’attache à intégrer ensemble et simultanément des signes d’objets divers

On découvre le fauteuil et sur la table les cartes et le journal

L’environnement de la pièce est produit par le décalage des moulures


Nature morte sur fond vert

Explosion du vert saturé qui emplit la période heureuse du séjour à Avignon avec Eva avant la guerre

Baignée de vert cette composition se situe dans les expérimentations parodiques de cette époque pleine de liberté et d’humour

L’assemblage disloqué des objets aux formes baroques se pare d’un pointillisme décoratif qui a fait donner à cet œuvre le qualificatif de « cubisme roccoco »

Chaque élément est peint au comble du lyrisme décoratif du moment : la grappe de raisin à droite ; le verre baroque ; la bouteille ; le titre du journal en pointillé comme la nappe

Echappent à ce traitement pointillé : la composition à gauche et le paquet de tabac

Le fond est défini par une amorce de cadre


Portrait de jeune fille , Eva

La dominante de vert saturé ajoute à la joie de ce tableau qui date d’avant le commencement de la guerre

De fausses moulures, une ampoule électrique et un dessin de compotier coexistent avec des plages de pointillisme d’une grande virtuosité

C’est un hommage à tout ce qu’Eva avait apporté à sa vie de peintre


Le peintre et son modèle

Le thème du peintre et de son modèle a profondément retenu Picasso

Méditatif le peintre est assis perpendiculairement à sa chaise dont l’insertion sur le sol est masquée par les jambes

La main droite posée sur sa cuisse est grossie pour montrer qu’elle est en avant

La grâce délicate du modèle suggère Eva

La jeune femme est complètement peinte ainsi que derrière elle une partie de la toile représentant un paysage

Cette toile, autant peinture que dessin, a été réalisée sur la toile fine d’un torchon de cuisine ( rayure rouge dans le bas du tableau )

Curieuse anatomie du modèle : seins petits, jambes courtes

Tableau sans profondeur ; on a l’impression que le fond du tableau est la surface de la toile

Ce tableau n’a été révélé qu’après la mort de Picasso


Compotier avec grappe de raisin et poire

Ce tableau fut acquis par Chtchoukine, gros industriel moscovite et collectionneur passionné pour le nouvel art

Même quand il ne comprenait pas il disait que l’artiste aurait raison en fin de compte « Je renonce franchement à toute prétention à comprendre ou même à apprécier Picasso. Il me bouleverse. Ce qu’il fait n’est pas du bluff. Je sais trop pour blâmer et trop peu pour louer »


Nature morte au compotier

Impression d’abondance automnale

Des objets sur une table bien ferme

Bande de tissu turquoise ornée d’une fleur de lys noire qui ressemble à un trou de serrure

Peinture d’une baguette de bois moulurée placée sur du faux marbre

Robuste table en bois bourgeoise dont on voit les pieds tournés

Disposition des objets sur la table en trois sections

La partie centrale domine avec le compotier

A gauche

En oblique la partie noire gauche de la table dirige notre regard vers le centre

A gauche six roseaux garnissent une bouteille de vin dont on voit le bouchon rouge

Modelé sculptural de la serviette blanche

A droite

Pomme coupée en deux

Serviette qui défie les lois de la pesanteur

Elégant verre canelé

Au centre

Le blanc compotier a un air de fête et contient des gourmandises

Harmonie automnale très douce


Violon

Picasso fabrique son instrument à partir d’une seule plaque de tôle découpée et pliée qu’il peint

Le violon est la réduction de l’objet à des plans géométriques rectilignes qui rendent compte de la structure formelle de l’instrument

Le violon est identifiable à ses ouïes marquées par les deux rectangles bruns allongés et creux

Le métal plié est utilisé comme une forme plate dont les plans repliés intégrant l’espace réel suggèrent le relief

Dans le haut du violon c’est un pliage saillant qui désigne les cordes

Ces grands plans géométriques assemblés seraient une œuvre abstraite sans les repères (ouïes, cordes) qui la maintiennent dans un système figuratif


Bouteille d’anis

La couleur produit un effet saisissant

Sur un fond bleu dur Picasso a peint une forme rouge semblable à une grosse graine

Ce rouge orangé exprime la vie et la passion et le noir évoque la mort

Les pointillés sont espacés sur le robinet et serrés sur la bouteille et le verre

La bouteille d’anis penchée sur la droite évoque Arlequin et sa tête ronde percée d’un œil unique

La bouteille identifie Picasso comme le signifie la plaque nominative du bas

A gauche, sous le robinet, c’est la silhouette d’un oiseau qui est l’âme d’Eva

L’as de trèfle, heureux présage en temps normal, est entouré de noir

La mort est inéluctable mais il fait bon vivre


Nature morte dans un paysage

Les objets réduits à leur signe le plus élémentaire insèrent leurs plans dans celui du paysage

Juxtaposition des différentes surfaces : pointillisme vibratoire et coloré, faux bois, imitation de papiers  peints

Précieuse combinaison de formes et de couleurs

La guitare est réduite à sa plus simple expression

Pour concrétiser une surface rugueuse Picasso mélange à sa pâte de la sciure de bois ou du sable


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