HENRI  MATISSE   2/2

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1912 – LA PORTE DE LA CASBAH


Matisse s’intéresse aux violents contrastes d’ombre et de lumière sur un espace architectural

Le bleu du ciel se confond avec celui de la voûte tandis que les bleus à gauche et à droite sont un peu plus soutenus pour résister au rose intense du sol


1913 – PORTRAIT DE MADAME MATISSE


Deux portraits de Madame Cézanne sont à la source de ce tableau

Matisse insiste sur la construction par les lignes et les schématisations autant que par le travail de la couleur

A cette époque Matisse se sent questionné par le cubisme et par le système de signes mis au point par Picasso et Braque dés 1910

L’épaulemen de l’élégant tailleur occupe toute la largeur du dossier à claire voie du fauteuil

Le bras droit exagérément aminci introduit une dissonance

La circulation du ruban ocre qui sert d’écharpe allège la construction symétrique

Le visage d’Amélie et ses cheveux couleur craie, de même que la tonalité générale de l’oeuvre, faite de bleus et de verts froids, donnent une impression de mélancolie presque funèbre

C’est le dernier tableau posé par Amélie pour son mari, à la veille de nombreuses années de maladie et de dépression plus ou moins chronique qui très progressivement les éloigneront l’un de l’autre

C’est par le truchement  du masque, de sa pure convention géométrique, comme de la  convention du blanc couleur de mort, que Matisse suscite intensément une présence


1913 – LE RIFAIN ASSIS


Ce guerrier donne l’impression d’être d’autant plus grand qu’il ne tient pas en entier sur la toile

La pointe de sa babouche et le sommet de son turban sont coupés par le cadre, ce qui confère une impression de monumentalité à cette figure déja grande

Une sauvage force virile se dégage de ce tableau

Couleur basée sur les jaunes et les verts

Fond constitué de rideaux rayés vert et jaune

Manteau vert foncé brodé de motifs jaunes et rouges


1914 – TÊTE BLANCHE ET ROSE


Tableau peint mi-octobre 1914 quand Matisse dialoguait avec Gris sur les travaux de Picasso, Braque et autres peintres cubistes

L’imposition d’une grille orthogonale, le découpage du visage et du buste en bandes parallèles, la correspondance des bandes de construction avec les rayures alternées du corsage rappellent les oeuvres des cubistes

Matisse qui avait abandonné la tyrannie du système divisionniste ne concédera que très peu à la tyrannie des grilles cubistes

Figure en blouse rayée avec un ruban noir et un pendentif

Formes plates et simplifiées auxquelles se superpose une grille de lignes noires qui géométrisent la figure et étendent sa surface dans l’espace

Mais le regard, les sourcils et la bouche imposent la grâce du modèle


1914 – PORTE FENÊTRE À COLLIOURE


Matisse passe l’été 14 à Paris

Le 10 septembre il arrive à Collioure où il reste jusqu’en octobre

Sa mère et son frère sont au Cateau en zone occupée

Ses amis Braque et Derain sont sur le front

Matisse a cherché à s’engager mais il a 45 ans et trois enfants


Pour Matisse la fenêtre découpée dans le mur ne sépare pas un dedans et un dehors

Elle est le lieur où est rendue visible la continuité du tissu de l’espace

“L’espace ne fait qu’un depuis l’horizon jusqu’à l’intérieur de ma chambre-atelier et le bateau qui passe vit dans le même espace que les objets familiers autour de moi, et le mur de la fenêtre ne crée pas deux mondes différents”

La couleur noire recouvre la surface principale du tableau, ne laissant de chaque côté qu’une bande verte, une bande bleue, les deux couleurs favorites de Matisse

“L’ouverture de la porte-fenêtre est faite sur un espace ténébreux, sur l’évènement qui va bouleverser dans l’obscurité la vie des hommes et des femmes invisibles, l’avenir noir, le silence habité de l’avenir” Aragon


C’est avec cette porte-fenêtre que Matisse s’approchera au plus près de l’abstraction puisque les formes géométriques coïncident presque avec le plan du tableau

Mais tout en tendant vers l’abstraction le tableau continue néanmoins à représenter bel et bien une véritable porte-fenêtre


1914 – PORTRAIT  D’YVONNE LANDSBERG


Matisse subit passagèrement les influences cubistes ou plutôt futuristes, théories qu’il traduit en grandes lignes courbes comme pour entourer la femme de pétales dont elle serait le pistil

La mère du modèle n’approuvait pas le portrait qu’elle jugeait peu ressemblant

Matisse a dit “L’exactitude n’est pas la vérité”

Le frère du modèle était enthousiaste; il trouve la couleur superbe : bleu acier, noir, blanc et orange

Avec le manche de sa brosse Matisse dessine de longs traits dans la pâte fraîche afin d’y laisser ça et là des traînées claires, montrant l’enduit de la toile

Yvonne Landsberg avait des yeux énormes qui remplissait tout le visage, le bas du visage était fuyant, absence de menton

Matisse aimait son modèle. Elle était timide mais intelligente et parlait avec le peintre pendant les séances

Matisse : “ Les lignes sont des lignes de construction que j’ai mises autour de la figure de façon à lui donner plus d’ampleur dans l’espace “


1914 – INTERIEUR BOCAL DE POISSONS ROUGES


Tableau peint juste après l’emménagement de Matisse dans l’appartement du quai Saint Michel

Une petite table soutient le bocal en forme de colonne

Plante en pot devant la porte-fenêtre et son balcon en fer forgé

L’eau du bocal apporte la lumière extérieure dans la pièce ombreuse et réunit les bleus de la Seine et du ciel

Accents lumineux des façades de l’île de la Cité

Ce tableau traduit la méditation de Matisse sur l’espace, l’intérieur et l’extérieur, sur le repli et l’ouverture

Le bleu unifie les deux espaces


1914 – POISSONS ROUGES ET PALETTE


Après le début de la guerre Matisse est psychologiquement dans une période sombre

Les bandes verticales ont été souvent associées au travail de Gris

Matisse supprime toute distance entre lui et son sujet ( à droite la palette du peintre )

A la droite du tableau le rectangle du mur et une partie du parquet semble se prolonger

A cette structure angulaire s’oppose la calligraphie du balcon

Brillant rouge des poissons


1914 – VUE DE NOTRE DAME


Superposition des géométries angulaires du cadre de la fenêtre et des lignes de force du paysage

Les traits qui structurent sont marqués en noir sur le tableau monochrome

Brossé à grands coups le bleu laisse transparaître le fond laissé en réserve

Le carré de la cathédrale semble projeter le tableau vers l’avant


Simplification géométrique des plus poussée

Par la géométrie de l’église le peintre s’isole du monde réel : les diagonales créent la profondeur, les verticales et les horizontales créent une structure abstraite sur fond bleu, bleu accentué par le bouquet vert (souvent chez Matisse jeu du bleu et du vert)

Matisse habite 19, quai St Michel tout en conservant sa maison d’Issy


1909/13/16/30 – NUS DE DOS


Chacun des quatre nus a été travaillé à partir d’une épreuve en plâtre de l’état précédent, d’où la dimension constante du rectangle où s’inscrit la figure de dos


Nu 1 – Le mouvement du bras gauche au-dessus de la tête soulève du même coup l’épaule droite

La jambe gauche raidie supporte le poids du corps et la droite est légèrement fléchie

Figure sans pieds


Nu 2 – La colonne vertébrale redressée dessine un axe plus stable

Les différents éléments du corps qui ressemble à un tronc ont tendance à fusionner : épaule droite arrondie, nuque prolongée par une forme triangulaire qui la relie à la colonne vertébrale, jambes épaissies semblables à des piliers

Le mur du fond devient un espace abstrait


Nu 3 – La colonne vertébrale confondue avec une chevelure partage l’espace rectangulaire en deux parties presque égales comme un mince pilier

Relation rendue étroite entre la figure et le fond

Les articulations (épaule et genoux) sont réduites au minimum

La figure toute entière devient un mur


Nu 4 – Bandes parallèles d’inégales largeur

L’axe central (colonne ou chevelure) opère avec simplicité le passage du creux au relief, la fusion de la figure et du fond


1916 – L’ITALIENNE


Un premier état de ce tableau donnait une image plus ressemblante, plus enveloppée du modèle

Progressivement amaigrie, réduite à une mince silhouette, la figure se construit par retranchements successifs, comme s’il s’agissait d’une sculpture taillée dans la masse

Le dépouillement de la couleur (une gamme de gris et d’ocre) fait écho à la désincarnation du modèle

L’amputation de l’épaule droite remplacée par une nappe de peinture prolongeant le fond jusqu’à l’épanchement noir et rigide de la chevelure renforce l’impact du visage modelé par la lumière

Le visage est cerné par deux flots de cheveux  qui sont eux-mêmes sur deux plans différents


1916 – LORETTE SUR FOND NOIR, ROBE VERTE


La femme est perçue à plat, comme une tache de couleur sur une autre

Ce tableau illustre les réflexions de Matisse sur la figure et le fond, le rôle de la couleur et l’insistance sur le noir

Simplicité de l’arabesque dessinée par le noir

Choc des deux couleurs complémentaires : vert et rose

Justesse des touches d’ocre ou de jaune (visage, bouche, bras, babouches)

Éclat du noir qui absorbe et renvoie la lumière comme un miroir


1916 – PORTRAIT DE SARAH STEIN


Portrait d’une des plus sincères admiratrices de Matisse

Avec son mari Michel, ses beau-frère et belle-soeur Leo et Gertrude Stein elle fut parmi les tout premiers défenseurs de Matisse

En faisant abstraction de l’épaisseur charnelle de son modèle, à l’époque déja corpulente, Matisse met à nu la spiritualité intense qui est précisément sa caractéristique individuelle


1916 – LES COLOQUINTES


La dispersion  matérielle apparente des objets est compensée par les accords des couleurs qui constituent une profonde harmonie

Les objets se rejoignent dans cette harmonie

Matisse “Dans cette oeuvre j’ai commencé à  me servir du noir pris comme couleur de lumière et non comme couleur d’ombre”


1916 – PORTRAIT DE GRETA PROZOR


L’actrice Greta Prozor disait des poèmes de Pierre Reverdy dont Matisse illustra un ouvrage

Gamme sombre – gris, noir, bleu -  qui est la marque des années de la guerre et qui correspond à l’austérité de la tenue du modèle : robe bleue à col montant, capeline sombre, coiffure sévère

L’ocre doré module l’ensemble et sacralise cette haute et mince figure comme le fond d’or des icônes

Le rôle des lignes noires n’est pas de cerner des compartiments de couleur; elles courent à travers la couleur pour exprimer la tension intérieure du modèle

Asymétrie des yeux qui observent

Inclinaison du cou semblable à un socle sur lequel la tête se tient en équilibre précaire

Le climat de tristesse né de la guerre explique que soient réprimées la sensualité et la vitalité suggérées par les jambes minces esquissées sous l’ample jupe transparente


Pose qui joue sur l’ambiguïté d’une figure présentée comme assise mais qui apparaît en suspension dans un espace vertical qu’elle emplit totalement


1916 – LA FENÊTRE


Le 1er juin, Matisse “J’ai terminé une toile : par la fenêtre du salon on aperçoit le jardin vert et un tronc d’arbre noir; sur une table une corbeille de myosotis; un fauteuil de jardin; un tapis

Le tableau est vert blanc avec quelques accents bleus pour les myosotis et rouges pour le zigzag du tapis et la table est rouge

Voila l’important de ma vie

C’est avec un respect tout spécial que je pense aux poilus qui s’excusent en disant “nous y sommes bien forcés” “


Les objets deviennent des ombres dans la profusion et l’intensité de la lumière

Plutôt que les choses soient révélées par la lumière, ce sont les choses qui révèlent la lumière


1916 – L’ATELIER QUAI SAINT MICHEL


Matisse a temporairement quitté la pièce

Tableau entre naturalisme et abstraction picturale

Le soleil est pâle mais le tableau vibre de lumière

Le modèle semble être vu de très loin alors qu’il ne pouvait se trouver à plus de quelques pas de Matisse

Toute sa vie Matisse aima travailler à portée de main de son sujet

La toile est grande (116*148) pour la petite pièce

Matisse accorde au petit salon d’appartement la même amplitude qu’au paysage urbain extérieur

Aperçu du clocher de la Sainte Chapelle en haut à droite

A droite les formes incurvées ocres suggèrent un rideau improvisé pour contrôler la lumière


1916 – LES DEMOISELLES À LA RIVIERE


Matisse et son ami Marquet souffraient de ne pas être au front comme Derain, Braque et d’autres

Ils ont demandé au leader socialiste, Marcel Sembat, comment ils pouvaient se rendre utiles au pays “En continuant comme vous le faites à bien peindre”

Dans ce tableau on sent l’angoisse du peintre

Quatre nus de couleur ocre se détachent sur un fond divisé verticalement en quatre rectangles

Celui de gauche est orné de feuillages vert, celui de droite est gris alors que les deux rectangles centraux sont l’un blanc, l’autre noir

Aucun lien ne semble unir ces personnages si ce n’est l’attention qu’ils portent à un serpent qui se dresse au premier plan de la composition

Cette toile traduit l’impression de malaise et d’inquiétude ressentie par l’artiste à cette époque


1916 – LA LECON DE PIANO


Nous nous sentons dans un monde abstrait

De la fenêtre ouverte la vue plonge dans un jardin exprimé par un grand triangle vert sans modulation

Une figure de femme écoute les gammes du jeune Pierre Matisse

Elle est juchée sur un tabouret d’atelier et pour remplir le grand rectangle qui lui sert de fond Matisse a étiré son modèle dans le sens de la hauteur comme les imagiers de l’art roman qui décoraient le piedroit d’un portail d’une figure humaine

La lumière éclairant la tempe du garçonnet est exprimée par un triangle noir pur, noir qui se retrouve dans le pupitre à musique et dans le fer forgé de l’appui de la fenêtre

Le piano est couvert au premier plan d’un tapis rose qui est très présent dans tout ce gris dépourvu de modulations

Grand dépouillement géométrique et austérité réfléchie et sereine

Harmonie générale d’un rare et froid raffinement

La diagonale verte fait pendant à la forme pyramidale du métronome


1917 – LA LECON DE MUSIQUE


Ce tableau est une variante réaliste de la leçon de piano

Le jeune pianiste est accompagnée de sa soeur aînée qui tourne les pages ou critique son jeu

Le rectangle de droite est un tableau, “La femme au tabouret”

A gauche, Jean Matisse, fils aîné du peintre et non plus un buste

Madame Matisse coud dans un rocking chair

Le peintre se plaît à représenter des lignes courbes : végétaux, statue du jardin, pupître à musique, violon, rocking chair

Quelques lignes brutalement horizontales et verticales rompent ces lignes courbes avec austérité


1916 – LES POMMES SUR LA TABLE, FOND VERT


Tandis que pour les cubistes la géométrie est une fin en soi à laquelle tout le reste doit être subordonné, y compris les couleurs, pour Matisse au contraire, la géométrie exprime l’émotion, elle n’est qu’un moyen de libérer cette émotion

On peut être à la fois le maître de l’arabesque et tirer du fil à plomb un bénéfice constant


1916 – AUGUSTE PELLERIN II


Auguste Pellerin (1852-1929), riche industriel, commande à Matisse son portrait

Pellerin avait en France la plus grande collection de Cézanne; il posséda jusqu’à 80 Cézanne

Cadrage resserré qui élimine tout ce qui est anecdotique

Les éléments du visage sont simplifiés, durcis, réduits à des formes semi-abstraites : un visage rigide aussi immobile qu’un masque, les mains croisées dans l’axe du nez

Seul le tableau décalé vers la gauche rompt la symétrie frontale

Une large zone brune et courbe, non identifiable, relie le tableau au visage, assurant une continuité spatiale entre figure et fond

Le noir dépeint à la fois la figure et le fond

Du noir n’émergent que le visage, les mains, le col et les poignets de la chemise blanche et le petit point rouge de la légion d’honneur


1917 – INTERIEUR ET VIOLON


Ici encore nous voyons une fenêtre ouverte sur un paysage ensoleillé

Un volet fermé laisse passer à travers ses lattes une lumière aveuglante, l’autre volet soulevé à la mode méridionale montre un ciel méditerranéen, du sable et un aloes

Le contre-jour est obtenu à l’aide d’un ton plat noir

Le violon brun prend toute sa valeur, tel un bijou dans un écrin, car la boîte à violon doublé d’un bleu vif donne vie à ce tableau d’une paisible et estivale chaleur


1918 – LE VIOLONISTE À LA FENÊTRE


Maintenant (printemps 1918) le peintre cherche à rendre la référence au réel plus immédiatement visible

A l’austérité géométrique de “La leçon de piano” répond une fluidité nouvelle de la ligne et de la couleur

A la concentration répond l’assouplissement

La famille de Matisse est sur le point de se disperser

Jean Matisse va s’engager comme mécanicien d’aviation

De santé fragile Madame Matisse sera moins présente

Matisse établit une relation amicale avec Renoir à Cagnes

Fin octobre 1917 il décide de quitter Paris pour le Midi où il passera la moitié froide de l’année

Il est proche de la cinquantaine, considéré comme un des deux grands maîtres du XXème siècle, a une grande aisance matérielle, une grande maison et un atelier à Paris

Il s’installe seul dans une modeste chambre d’hôtel


La fenêtre ouverte sur un ciel triste tient la majeure partie de la peinture

La figure est vue de dos, elle regarde et joue du violon (le regard et le peintre)

Implication de Matisse dans la silhouette sans regard dont la tête ronde est transparente

Importance du noir et composition dépouillée par bandes parallèles

Couleur fluide et brossée avec légèreté : des gris argent, des bleus pâles et des roses lilas


Éloignée du langage, du raisonnement et de la représentation, la musique sert de modèle à la peinture qui ne veut plus imiter le réel

La musique est chère à Matisse qui joue régulièrement du violon

Ce tableau peut être interprété comme un autoportrait : l’artiste joue pour une fenêtre qui représente pour lui la peinture


1918 – AUTOPORTRAIT


Matisse peint toujours d’après nature

Les meubles, les objets, la disposition de la pièce sont toujours réels

C’est ainsi qu’il a peint l’intérieur où apparaît au fond un broc dans une cuvette sur le lavabo

C’est pourquoi Madame Duthuit ( sa fille Marguerite ) et le modèle ont décidé de débarrasser la pièce des objets trop familiers quand le peintre se mettait au travail


1919 – L’ARTISTE ET SON MODÈLE


Composition complexe mais ordonnée de cette toile aux couleurs souples et onctueuses

Matisse trouve un équilibre entre la surface réelle et l’illusion d’espace

Matisse présente différemment le corps de la femme

Les formes séduisantes du modèle sont très différentes de celles de Carmelina

Il abandonne la raideur arbitraire des poses en studio


1919 – LES PERSIENNES


Matisse vit et travaille à Nice dans cette chambre d’hotel exigüe, agrémentée d’une porte fenêtre et de lourds voilages

Deux sujets:

1- la lumière et la couleur avec des contrastes entre le dedans et le dehors

2 – la sensualité de la femme, vêtue d’un corsage blanc transparent et d’un pantalon bouffant telle une odalisque

Contraste entre la banalité de l’environnement et la magnificence de la conception

Matisse gardera un souvenir ému de cet hôtel “J’y suis resté quatre ans pour le plaisir de peindre des nus et des figures dans un vieux style rococo”

Le personnage n’occupe qu’une petite partie du tableau : on peut considérer la fenêtre comme le sujet véritable

La disproportion entre le minuscule personnage curviligne et l’architecture aux rythmes grandioses souligne l’atmosphère immobile, intemporelle du tableau

Subtile observation de la transparence de la partie supérieure des voilages

La représentation de la demie rosace au sommet de la fenêtre entre les deux courbes des voilages confère une sorte de splendeur gothique à cette architecture


1919 – ODALISQUE DEBOUT


Le modèle est Antoinette Arnoux qui pose pour Matisse en 1919 et 1920

Sous la blouse transparente festonnée et brodée d’or Antoinette a pris la pose, bras croisés derrière la nuque, mettant en valeur les seins sous la gaze transparente

Turban et jupe drapée sur les hanches transforment Antoinette en véritable odalisque

Figure cadrée de près, simplement et largement peinte sur fond neutre

Nul fond décoratif en concurrence avec le modèle du nu

Le motif de l’odalisque va occuper Matisse pendant une décennie


1919 – LES PLUMES BLANCHES


Matisse était très fier d’avoir fait lui-même ce chapeau à plumes qu’il a tant de fois représenté

Il aurait acheté une forme en paille et les plumes d’autruche blanches et du ruban noir

L’amour du peintre pour la ligne courbe se donne libre cours dans les volutes de cette plume d’autruche

La belle jeune femme brune est Antoinette

La ligne du décolleté de la robe est sinueuse comme celle d’un coeur de jeu de cartes

Sinueux aussi les plis du corsage

Toutes ces courbes servent à accompagner celles des plumes blanches du grand chapeau


1921 – ODALISQUE À LA CULOTTE ROUGE


C’est le premier tableau de Matisse officiellement acheté pour figurer dans un musée parisien, le musée du Luxembourg

En septembre 1921 Matisse quitte l’hôtel pour un appartement à Nice, place Charles Felix, où il restera jusqu’à la fin de 1926

Dans la grande pièce donnant sur la mer qui lui servait d’atelier il disposait les étoffes décoratives qu’il choisissait pour ses fonds

Le modèle est Henriette Darricarrère, ballerine

Elle pose pour Matisse de 1920 à1927

Elle a une capacité théâtrale à s’adapter à toutes sortes de rôles (voluptueuse, rêveuse ou jeune fille sage)

L’espace ici est entièrement rempli par la densité de l’ornementation et de la couleur

Pas de fenêtre, pas d’illusion d’une lumière venant de l’extérieur

C’est le bariolage des couleurs qui produit la lumière, une lumière sans air

Le rouge uni du tapis met en valeur la chair nacrée de l’odalisque


1922 – LE GENOU LEVE


Ce tableau transforme le thème mauresque de l’odalisque dans un décor français

Le modèle français est assis dans un décor occidental et porte le costume provocant d’une femme de harem sans oublier le tatouage sur le front

La sensualité capiteuse du tableau est renforcée par l’espèce d’énergie que le violet foncé de l’arrière plan confère aux ocres rosés de la chair et par les accents verts sur les tons assourdis qu’ils rehaussent

La plante décorative et abstraite du fond contraste avec la présence charnelle palpable de la femme

La matérialité tangible des seins et la transparence culotte diaphane sont restituées avec virtuosité

D’avril à novembre 1922 une gigantesque exposition coloniale est présentée à Marseille

Matisse est conscient du caractère « vendeur » de ces images


1925 – FIGURE DECORATIVE SUR FOND ORNEMENTAL


Une figure aux volumes fortement simplifiés et accentués par des ombres et des lumières tranchées

Fond excessivement aplati et excessivement décoré

Volume du corps très marqué, structuré par des lignes très fermes (la ligne presque droite du dos, notamment)

Au fond tenture à grands motifs bleus au milieu desquels se tient le grand miroir vénitien enfermant le même bleu

Porcelaine du pot chinois

Tapis à bandes

En bas à droite rectangle d’un siège couvert de tapisserie

Abandon des lignes douces et sensuelles des nus du début des années vingt

Le drapé autour des reins fait le lien avec les motifs du décor floral


1925 – GRAND NU ASSIS, BRONZE


Cette sculpture trouva son origine dans des tableaux d’Henriette à califourchon sur un fauteuil drapé

La sculpture conserve une sensation résiduelle de délassement voluptueux

Matisse a utilisé un couteau pour accentuer les angles des bras pliés, pour éliminer la plénitude des hanches et des cuisses et pour créer un buste à facettes

L’effet est brutal, rugueux, plus masculin


1927 – HENRIETTE  II ET III


Ces deux sculptures se situent vers la fin de la période où Henriette a posé de façon intensive et exclusive pour le maître


La version II accentue le caractère monumental et statique de la tête et les masses arrondies et symétriques de la chevelure, des joues et du menton

Le fini lisse et régulier évoque la froideur lourde du marbre


La version III réaffirme des volumes rugueux

Les sourcils sont violemment arqués et surplombent les yeux alors que dans la version II ils sont intégrés dans l’inflexion du front

Travail sur la fragmentation des volumes et la modulation de la lumière


1927 – PORTRAIT DE MADEMOISELLE H.D.


Pose du modèle un peu raide

Son corps semble enveloppé dans une immense écharpe quadrillée

Le rouge, le vert et le jaune rappellent les couleurs des compositions fauves de Matisse

La pose de la tête appuyée sur la main suggère la technique d’Ingres qui commence à influencer Matisse


1928 – NATURE MORTE AU BUFFET VERT


Un buffet de cuisine vert d’eau dont les portes entrouvertes délivrent une raie noire qui cerne le ton

A gauche une nappe quadrillée de bleu

Un pichet blanc orné de motifs bleus

Une assiette de fruits, un verre d’eau et un couteau dont la noirceur du manche équilibre la composition

Influence de Cézanne

« Si vous saviez toute la force morale, tout l’encouragement que me donna pendant toute la vie son merveilleux exemple »

Les objets et ustensiles sont dépourvus de toute connotation exotique ou théâtrale

Dépouillement des objets ordinaires clairement séparés les uns des autres

Accords de bleu et de vert ; la dissonance étant obtenue par les cinq oranges au centre de la composition

Le meuble le plus banal, une serviette et quelques fruits lui suffisent pour créer un chef d’œuvre de « poésie du réel »


1931 – LA DANSE  1ère VERSION


Cette peinture murale d’environ 52m2 a été commandée par M. Barnes

Il s’agissait de décorer trois arcades placées au-dessus de verrières

Matisse rejette la technique de la maquette, mise au carreau, agrandie et peinte par des aides

Il étudie longuement des danseuses

Il entreprend directement la composition constituée de figures deux fois grandeur nature

Monté sur un banc il dessine avec un fusain fixé à un porte-fusain de trois mètres de long

Pour chercher les tons Matisse fit des essais à l’aide de papier de couleur, technique qu’il reprendra plus tard

La Danse I suggère un mouvement de saut de bas en haut

Les figures gris pierre se détachent sur des formes abstraites très simples bleues et roses

Pour conférer la notion de bond en hauteur Matisse présente, 1ère figure à droite, une danseuse dont la tête et les épaules sont coupées par l’arcade soutenant le plafond

Par suite d’une erreur de plan, la Danse I ne cadrait pas avec l’emplacement qui lui était réservé

Matisse refusa de rectifier la composition et entreprit la Danse II


1932 – LA DANSE 2ème VERSION


La danse I n’ayant pas été exécutée selon les mesures exactes de l’emplacement auquel elle était destinée Matisse se remet au travail et compose la Danse II

La Danse I comportait 5 figures ; la Danse II en compte 8

L’harmonie de couleur est semblable

Deux figures sont accroupies et semblent soutenir les pendentifs entre deux des trois arcades

L’arcade centrale est décorée de deux figures évoquant un mouvement rotatif

Cette sorte de roue humaine forme un contraste avec les formes bondissantes des deux autres arcades

Contours très purs

Fond constitué de formes abstraites bleues et roses


1935 – LE REVE


C’est en 1935  que Lydia Delectorskaya commence à poser quotidiennement pour Matisse

Le rapport au modèle a toujours été important pour Matisse « Je dépends absolument de mon modèle que j’observe en liberté, et c’est ensuite que je me décide pour lui fixer la pose qui correspond le plus à son naturel. Quand je prends un nouveau modèle, c’est dans son abandon au repos que je devine la pose qui lui convient et dont je me rends esclave »

Les bras du modèle semblent simuler un cadre pour son visage

Matisse a fait de nombreux dessins pour trouver l’équilibre des bras enlacés formant le bas du visage

Tonalité rose du corps, le bleu du fond rappelle le bleu des yeux du modèle


1935 – LE GRAND NU ROSE


Ce nu rose n’est parvenu à son étonnante simplification qu’après de multiples transformations

Œuvre volontaire et intellectuelle

Un nu allongé sur un divan qui se retourne vers le spectateur pour lui rendre son regard et dont le corps est l’objet d’une torsion provocante destinée à montrer à la fois ses fesses, ses seins et son visage

Matisse est entrée sur le territoire de Picasso pour proposer une simultanéité d’aspects

En dotant sa figure d’une tête si petite par rapport au reste du corps Matisse a voulu donner toute l’importance à la ligne horizontale que forme le torse très long

Pour mettre en valeur le rose sans nuances ni modelé de la chair, il a imaginé la stricte régularité du quadrillage du divan, que répète dans un autre ton celui de la fenêtre


1938 – NU ALLONGE DE DOS, NU ALLONGE DE FACE


Vu de dos

Les grandes courbes se déploient au-delà du cadre de la feuille et suggèrent la combinaison d’un vaste espace

Vu de face

Dans une pose identique le nu est traité tout en angles, décomposé en éléments géométriques (un sein circulaire, l’autre triangulaire)

Autorité du grand zigzag qui sabre l’espace rectangulaire de la feuille blanche


1939 – LISEUSE SUR UN FOND NOIR


On saisit la capacité de synthèse de Matisse, son pouvoir d’invention d’un espace qui dans la réalité est morcelé et diffus

Cet espace est bâti sur une combinaison de rectangles horizontaux et verticaux, combinaison animée par les courbes du bouquet et de la femme

Seuls les feuillets losanges posés sur la table suggèrent une profondeur

L’élément important de l’œuvre est le fond noir inventé par Matisse

Matisse « Le noir prend une place de plus en plus grande dans l’orchestration colorée, comparable à celle de la contrebasse dont on est arrivé à faire des soli »

Il ne s’agit pas d’un miroir opaque fermant l’espace mais d’un noir générateur de lumière et de profondeur

Matisse construit un jeu de répétitions et de reflets qui constitue une réflexion sur sa peinture : trois dessins au mur, trois papiers sur la table, image dans le miroir de la tête et du bras du modèle


1939 – LA MUSIQUE


L’hiver 38/ 39, son mariage de près de 40 ans s’était finalement écroulé et en mars 1939 sa femme quittait Nice, début de leur véritable séparation

La cause de cette séparation fut l’attachement très fort de Matisse pour son modèle Lydia Delectorskaya

En janvier 1940, la famille Matisse, renommée pour sa discrétion, reconnaissait la séparation

Matisse devait partir pour un mois avec Lydia au Brésil mais il renonça à quitter la France «  Il me semble que j’aurais déserté. Si tout ce qui a une valeur file de France, qu’en restera-t-il de la France ? »


On retrouve, traité avec ampleur, le motif de la musique, source de calme

Parallélisme de pose entre les deux modèles aux contours marqués

Le choc du rouge tient le spectateur à distance

Le tableau inclut des lieux distincts, chacun représenté à une échelle légèrement différente

La partie supérieure organique est un de ces lieux

Quart médian droit qui inclut le personnage principal

Zone couverte d’une grille à gauche avec le petit personnage

Partie réservée à la nature morte

Le dispositif stabilisateur est quasiment caché : l’alignement vertical du trou de la guitare et du cercle du fruit rouge


1940 – LA BLOUSE ROUMAINE

La Blouse roumaine est le fruit d’un long mûrissement

Tableau travaillé et repris pendant six mois

Le visage surgit comme une fleur de l’épanouissement des larges manches

Les courbes magnifient la ligne des épaules et donnent de la vitalité au personnage


1943 – JAZZ


Le livre « Jazz » publié en septembre 1947 est le laboratoire qui a permis à Matisse de passer de la peinture à la pratique du papier découpé

Matisse « J’ai rempli les pages séparant mes pages de couleurs par des choses sans importance »



Le livre comprend 18 planches, dont :

Le Clown, au départ le livre devait s’appeler Le Cirque


Le Cirque, avec la banderole, le tapis rouge et l’équilibriste


Monsieur Loyal, dont le profil se détache sur le bleu de son habit traditionnel aux boutons d’or


Le Cauchemar de l’éléphant blanc

L’éléphant blanc exécute son numéro debout sur une boule dans la lumière éclatante du cirque tandis que les souvenirs de sa forêt natale noire le harcèlent comme des langues de feu rouges, avec la violence des flèches


Le Cheval, l’Ecuyère et le Clown

L’écuyère est évoquée par sa jupe qui s’étale sur le dos du cheval, le clown par son costume vert, noir et jaune. La lanière jaune est celle du fouet de M. Loyal


Le Loup à l’œil sanguinaire, la gueule prête à mordre


Icare, au cœur passionné retombe du ciel étoilé


Les Codomas sont les frères trapézistes du début du siècle, qu’observe le clown violet, exécutant leur saut périlleux au-dessus du filet tendu

La Nageuse dans l’aquarium et la face rubiconde du spectateur fasciné


L’Avaleur de sabres

Le Lanceur de couteaux

Pour lui un dessin dynamique de couleur violente et une couleur douce pour la femme cible au cœur fleuri et confiant


Le Lagon avec des formes animales évoluant dans l’eau verte

1946 – POLYNESIE, LE CIEL – POLYNESIE, LA MER


Cette grande composition est inspirée par le souvenir du voyage à Tahïti

Les motifs blancs, oiseaux, fleurs ou poissons ont été découpés en plusieurs morceaux dans du papier à lettres et appliqués sur un fond carrelé régulièrement composé de feuilles de papier d’emballage colorées industriellement en bleu et vert

Le tout a été rehaussé de gouache et le papier découpé est devenu une gouache découpée


1946 – INTERIEUR JAUNE EN BLEU


En 1943 à la suite d’un raid aérien sur Nice, Matisse s’installe sur la colline de Vence dans la villa « Le Rêve »

On retrouve le désordre familier et voluptueux des objets, des fruits et des bouquets posés sur le guéridon de marbre

On retrouve aussi le fauteuil « rocaille » entré en 1942 dans l’univers de Matisse « Quand je l’ai rencontré chez un antiquaire j’ai été complètement retourné. Il est splendide. J’en suis habité »

Les lignes noires du dessin définissent nettement des zones : le fond jaune ocre, les deux rectangles bleus affrontés, ne note verte

« Je me trouve à présent à représenter des objets dépourvus de lignes fuyantes. Je veux dire vus de face, presque les uns près des autres, rattachés entre eux par mon sentiment, dans une atmosphère créée par les rapports magiques de la couleur »



1947 – INTERIEUR ROUGE, NATURE MORTE SUR TABLE BLEUE


Surprenant fond rouge intense  et strié de zébrures noires traitées en zigzag, comme des éclairs couvrant le sol et les murs et le chemin du jardin menant vers un parterre fleuri

Ces stries sont rares chez Matisse pour qui les couleurs sont des forces qu’il faut organiser en vue de créer un assemblage expressif

Le contraste du rouge et du noir avec le bleu luisant de la table stimule

Le tableau évoque l’harmonie et la gaîté

Pourtant à cette période il souffre d’infirmités et d’insomnies

Il a 77 ans et ses forces limitées le rendent d’humeur changeante

Le profil de Caroline Joublaud, mère de sa fille Marguerite, évoque le rôle de la femme en tant que compagne et modèle dans la vie de l’artiste


1947 – NATURE MORTE AUX GRENADES


Le premier plan est occupé dans toute sa largeur par des grenades disposées sur une table et sur une assiette

Quatre se détachent sur un rouge grenat

Sur l’assiette une grenade dévoile ses graines entourées d’une pulpe rouge

L’ensemble est placé devant une des fenêtres de la villa ouverte sur le jardin et envahie par les feuilles d’un palmier

Un volet, un rideau, un dossier de fauteuil et un médaillon complètent l’ensemble

Organisation symétrique des fruits et des objets

Equilibre des surfaces verticales et horizontales

La verticale du volet est placée au centre de la toile

Matisse aime représenter des  intérieurs dont l’atmosphère est modulée par la lumière vive ou diffuse qui pénètre par des fenêtres plus ou moins closes par des persiennes

Ce côtoiement chromatique des surfaces établit les divers plans sans l’intervention des ombres

Le bord de la table est le seul élément qui relève d’un effet graphique de perspective

Réserve de la toile blanche sur laquelle se détachent les motifs du rideau, du dossier du fauteuil et du palmier ainsi que le profil du médaillon


1948 – INTERIEUR AU RIDEAU EGYPTIEN


Une nature morte (fruits ocre) assez neutre est posée sur une table devant une fenêtre par laquelle nous apercevons le bouquet (genre feu d’artifice) d’un palmier

A droite un rideau égyptien à fond noir aux grands dessins géométriques

Composition chaude

Matisse a 79 ans

Le noir, l’ocre jaune et l’ocre rouge sont les dominantes de cette harmonie d’une grande valeur décorative


1948 – GRAND INTERIEUR ROUGE


Matisse multiplie les appariements et les contrastes (deux rectangles en haut, deux tables, deux tapis, oppositions de droites et de courbes, de vides et de pleins)

Ambiguïté de deux fausses fenêtres découpées par un dessin et un tableau accrochés côte à côte sur le mur de l’atelier

Le rouge est le rappel de tous les rouges de Matisse


1947-1951   -   CHAPELLE DE VENCE


L’idée d’entreprendre la décoration d’une chapelle est venue à Matisse dès son séjour en 1941 à la clinique du Parc à Lyon où il fut soigné par une jeune religieuse dominicaine, sœur Jacques-Marie

Le Père Couturier qui lui a demandé de prendre en charge la décoration de la chapelle a écrit :

« Matisse disait « Je veux que ceux qui entrent dans ma chapelle se sentent purifiés et déchargés de leurs fardeaux »

Picasso reprochait à Matisse de ne pas avoir fait un marché plutôt qu’une église

Matisse rétorqua « Pour moi tout cela est essentiellement une œuvre d’art. Je médite et me pénètre de ce que j’entreprends. Je ne sais pas si j’ai ou non la foi. L’essentiel est de travailler dans un état d’esprit proche de la prière … Je lui ai dit à Picasso : Oui, je fais ma prière, et vous aussi, et vous le savez très bien ; quand tout va mal, nous nous jetons dans la prière pour retrouver le climat de notre première communion. Et vous le faites vous aussi. Il n’a pas dit non »


VITRAIL BLEU PALE


Ce projet de vitrail marque l’irrésistible retour des souvenirs de Tahiti « des sortes d’esprits flottants, d’algues »

Les formes aux couleurs d’arc en ciel dérivent sur un fond bleu aérien

Matisse « Imaginez le soleil se déversant à travers le vitrail – il lancera des reflets colorés sur le sol et les murs blancs, tout un orchestre de couleurs »


L’ARBRE DE VIE

Matisse a réduit l’arc en ciel à un jaune citron, un bleu outremer et un vert bouteille


PROJETS DE CHASUBLES

Matisse a réalisé des projets de chasubles pour les officiants de la chapelle


PAPIER DECOUPE


Après l’importante opération chirurgicale de 1941 Matisse était devenu un semi invalide et le papier découpé devint pour lui un medium qui devait dominer les dix dernières années de sa vie

Des assistants coloraient pour lui des feuilles de papier à la gouache puis il les découpait avec de gros ciseaux

Ensuite les assistants plaçaient les formes ainsi découpées sur les surfaces qui attendaient de les recevoir, murs ou grandes feuilles de papier fixées au mur, tandis que Matisse dirigeait les opérations d’un fauteuil ou de son lit

Matisse s’en remit davantage à sa mémoire visuelle et adopta une approche plus conceptuelle dans la création de son art

Il vit les papiers découpés bleus et blancs comme des sculptures de remplacement


1947 – LES VOILES

Cette gouache découpée est peut-être un souvenir du Maroc

Les deux triangles blancs sur fond uniformément bleu rappellent les bateaux croqués sur une carte postale écrite par Matisse à sa fille le 30 janvier 1912 quand il faisait route vers Tanger

1950 – LA DANSEUSE CREOLE


Résurgence de l’image de la femme

La Danseuse créole dérègle la trame géométrique, soumettant la représentation de la figure à la logique rythmique de la découpe et ouvrant sur le flanc gauche du tableau une béance

Matisse avait besoin d’espace

A la question : « L’espace vous apparaît-il limité ou illimité ? » il répondait « L’espace a l’étendue de mon imagination »


1952 – NUS BLEUS  1 ET 2


Les Nus Bleus sont sculpturaux car les personnages sont assis ou accroupis dans des poses qui impliquent un raccourci

Nu Bleu 1 est plus lourd que Nu Bleu 2

Malgré la vitalité des contours du personnage on le lit comme une ligne

Ce sont les vides intervenants entre les morceaux découpés qui mettent l’accent sur les articulations

Ces vides figurent le gonflement des volumes, le « plus » d’une jambe pliée qui passe devant la cuisse

Les nus sont composés de morceaux mais pas désarticulés

La figure du nu bleu est parcourue d’espace, elle respire dans et par l’espace

Elle est lieu d’échange et de circulation de la lumière, comme les fenêtres si souvent présentes dans sa peinture

1952 – LA CHEVELURE


Cette œuvre accorde au corps une grande légèreté

Matisse a dit «  La sensation du vol qui se dégage en moi m’aide à mieux ajuste ma main quand elle conduit le trajet de mes ciseaux »


1952 – LA TRISTESSE DU ROI


Cette composition se rattache à un thème biblique, Salomé dansant devant Hérode

C’est surtout une réflexion sur la vieillesse et la mémoire, le dernier autoportrait du peintre en vieillard au milieu des voluptés calmes, de l’azur, des vagues et des splendeurs

En vert, le roi triste ; de la guitare s’échappe un vol de soucoupes volantes couleur d’or pour aboutir en masse autour de la danseuse en action

Ces pétales jaunes qui s’envolent ont la gaîté des notes de musique

A gauche du roi, une femme, une odalisque de couleur verte, symbole de l’Orient où le peinte a tant appris sur la couleur, se montre de profil

A la droite du roi, corps monochrome de la danseuse – sauf un ovale noir pour le visage et deux ronds noirs pour les seins

Corps rythmé par des lignes dentelées noires également qui traduisent sa danse tourbillonnante


1953 – L’ESCARGOT


Taches rectangulaires ou carrées qui s’enroulent comme un escargot

De la juxtaposition de ces formes naît une courbe qui contraste avec l’angularité de ces formes

Cette toile servit de modèle aux peintres abstraits des années 60


LA GERBE


Matisse à 83 ans écrit à un ami « Que la survie par mes œuvres dont tu me donnes l’assurance se réalise, je le souhaite … Je  n’y pense jamais, car ayant jeta ma balle de mon mieux, je ne puis certifier si elle tombera sur la terre ou à la mer ou bien dans les précipices d’où rien ne revient »


HENRI  MATISSE   2/2

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