La sieste à Saint Tropez, Kisling avec Renée 1916
Kisling ne cesse de dire son bonheur de peindre au sein de son jardin « Dans mon jardin de Provence je n’ai qu’à me baisser pour ramasser des perles, des rubis, des émeraudes pour les incorporer ensuite directement dans mes tableaux »
A propos de Renée « Elle me plut tout de suite étrangement, avec ses cheveux d’un blond violent, coiffés à la chien, son visage au menton pointu, au grand nez, visage irrégulier mais animé d’un regard quêteur »
Son père était commandant de la Garde républicaine
Ils se marièrent à la mairie du 5ème avec pour témoins André Salmon et Max Jacob
Il note la lumière qui filtre à travers les frondaisons et éclaire le premier plan
André Derain "La seule matière de la peinture c'est la lumière"
L'éclairage intense atténue l'échelonnement des plans dans l'espace
Cézanne à propos du soleil de la Méditerranée "Le soleil y est si effrayant que les objets s'enlèvent en silhouettes ... Il me semble que c'est l'antipode du modelé"
Nous avons le sentiment d'une certaine contraction de la perspective
Les arrière-
La montagne en haut à gauche est moins un paysage qu'un tableau dans le tableau
Le fauteuil, ainsi que la table, sont comme en lévitation dans l'espace
Le plateau de la table semble se relever vers le spectateur
Portrait de Jean Cocteau 1916
Ce dessin est préalable au portrait que Kisling fit du poète la même année
Kisling concentre son étude sur la figure du poète
Il l'inscrit dans le décor d'un intérieur, esquissant rapidement les angles des murs ainsi qu'une table dans la partie supérieure droite
Netteté du trait
Dans la version peinte Cocteau sera assis dans un fauteuil et non sur une chaise et retirera les mains de ses poches pour les croiser avec élégance sur ses genoux
Cocteau assis dans son atelier 1916
Jean Cocteau est une personnalité centrale du Tout-
En 1916 Diaghilev fait appel à lui pour découvrir de nouveaux talents pour travailler aux décors des Ballets Russes
Jean Cocteau recrutera Picasso pour être le décorateur du futur ballet Parade
Kisling après sa blessure se retire dans le Midi de la France à Sanary
Ce portrait témoigne d'une réintroduction de la perspective. Il a été peint à Paris
si l'on se réfère au parquet à larges planches de l'atelier de la rue Bara ainsi
qu'à l'immeuble au-
Kisling joue à la fois d'un effet d'emboîtement des plans les uns dans les autres et de la profondeur de champ
La fenêtre de l'atelier est grande ouverte
La lumière naturelle et bleutée baigne les quelques meubles et s'accorde avec la tenue très soignée du modèle
Aux côtés de Kisling, Modigliani exécute également un portrait de Cocteau
Paysage de Sagunto 1916
Sagunto est une petite ville de la province de Valence
La ville compte un important site romain avec un amphithéâtre, une église et des fortifications médiévales
Mais Kisling préfère les éléments de la présence humaine, maisons et champs cultivés
Il réduit les bâtisses à de simples pans de murs blancs surmontés de toits aux rouges éclatants
Il imbrique les jardins et les parcelles les uns dans les autres
Mais il se refuse à déformer par plaisir l'espace et le volume des objets
Les plans s'échelonnent vers le lointain, l'oeil du spectateur étant guidé par l'alternance des zones claires et sombres et par les diagonales formées par les murs de séparation entre les parcelles cultivées
Jardiniers en Provence 1917
Depuis son installation en Provence Kisling ne cesse de peindre la campagne environnante
Vue soigneusement construite : encadré par deux bouquets d'arbres au verts profonds, le regard du spectateur glisse vers le lointain, guidé par l'ouverture ménagée dans un muret de pierre
L'alternance des plans fait succéder la terre, l'eau et le ciel
Espace régulé par une série de verticales et d'horizontales
Deux jardiniers travaillent dans des directions opposées et animent ainsi la toile d'un mouvement diagonal
Influence de Pissarro dont l'influence a été forte à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème
Comme chez Pissarro le paysage est à la fois réaliste et paysage-
Saint Tropez 1917
Après deux voyages en Espagne en 1915 et 1917 il effectue un premier séjour à Saint Tropez en 1917
Il propose une interprétation simultanée d'une nature morte et d'un paysage
L'univers clos de la pièce réduit à un plan de couleur animé sur la droite d'une
tenture est percé d'une fenêtre articulant l'espace en un dialogue intérieur-
Grand dépouillement de la nature morte dont les formes synthétisées à l'extrême par de larges aplats de couleurs sont proches d'une peinture naïve
Au dépouillement s'oppose le fouillis végétal du paysage souligné par une touche distincte multidirectionnelle
Une approche en surplomb de la scène intérieure redresse verticalement le dessus de la table
Une vue frontale sur l'extérieur crée un étagement de plans qui suggère la perspective
Kisling marque avec ce tableau son éloignement du cubisme
Environs de Saint Tropez 1917
A la fin du 19ème siècle Saint Tropez devient un lieu privilégié des artistes
Signac y élit domicile dès 1894
Durant l'été 1904 Matisse vient apprendre le néo-
La vision de Kisling n'est pas celle des vues de ports de Signac. Il s'attache à évoquer la présence des travaux agrestes
Le premier plan est occupé par des plantations de vignes et d'arbres fruitiers. C'est seulement au second plan que nous retrouvons la mer qui moutonne au loin
Avant 1950 la navigation de plaisance n'était pas démocratisée et la mer restait une affaire de marins professionnels
Kisling demeure un terrien et un rural
Il préfère la solidité des arrière-
Le port 1917
Cette vue du port pourrait s'apparenter à un paysage urbain tant l'eau est absente
C'est l'imbrication des bâtisses et des bateaux à quai qui intéresse l'artiste, la mer étant à peine suggérée sur l'extrême droite par un aplat bleu que l'on peut d'ailleurs confondre avec le mur d'une maison
Jeu de verticalités particulièrement soigné
Un haut mur aveugle au premier plan bloque la composition sur la gauche et ménage un effet de profondeur
Elancement des mâts qui scandent toute la hauteur de la toile
Obliques fines des haubans mêlés aux masses des voiles repliées
Le dépouillement du premier plan contraste avec le foisonnement des volumes qui lui succèdent
Au premier plan la luminosité est ponctuée de deux petites silhouettes noires rapidement esquissées et d'une cargaison de bateaux réduite à un empilement de formes épurées
La palette de Kisling s'éclairait au contact de la Méditerranée, libérant des tonalités franches accentuées par le blanc pur du mur d'une maison
Autoportrait avec Renée et le chien Kouski 1917
1917 est l'année du mariage de Renée Gros et de Moïse Kisling. L'orgie de la noce dura trois jours et trois nuits
Kisling "Je conserve une lettre de Max Jacob où il m'écrit "La nuit a été horrible. J'ai bien prié Dieu qu'il me pardonne d'avoir assisté à ce mariage"
La fête des fleurs à Saint Tropez 1917
Chaque année, en mai, le buste de Saint Tropez sort rituellement de l'église en procession au son des fifres, des tambourins et des clairons, donnant l'aubade aux autorités civiles et religieuses
Kisling représente avec force, couleur et lumière, un moment de cette Bravade où, sur le port, la population en plein effervescence acclame et suit en costumes traditionnels la procession abondamment fleurie