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L'énigme du désir - Ma mère, ma mère, ma mère    1929


Tableau d'une ruine polymorphe échouée sur la plage et laissée là par quelque rêve

Les inscriptions (dans les alvéoles) sont un hommage à une mère qui n'apparut jamais dans les tableaux du fils

Cette tête qui apparaît si souvent dans son oeuvre mais qui ne nous regarde pas est celle de Dali qui recherche et craint le néant, l'oubli et l'abandon

Profil endormi en terminaison d'un fantastique rocher informe

On reconnaît dans ce rocher les structures géologiques de la région du cap Creus érodées par le vent et qui évoquent l'influence de l'architecture fantastique d'Antonio Gaudi, "ce gothique méditerranéen" vue par Dali enfant à Barcelone

Le grand masturbateur   1929


Ce tableau propose un exposé complet des associations symboliques se rapportant aux angoisses et aux obsessions de Dali

La grande figure centrale est probablement un autoportrait faisant allusion à l'activité onirique de l'auteur

Une figure féminine associée à un lys mime une fellation devant les hanches engainées d'un homme, la jambe posée sur les volutes d'un meuble moderniste

Evocation de la présence de Gala qui "libéra" la sexualité infantile du peintre

D'autres détails représentent des souvenirs d'enfance : l'embrassade avec la femme pétrifiée au premier plan, la sauterelle, les coquillages, les plumes colorées

C'est le visage qui frappe :

les yeux entrouverts avec de grands cils déployés

la raie régulière des cheveux sur la peau harponnée par un hameçon

la sculpture de pierre et de coquillages à la hauteur de la  nuque

la figure du lion avec sa longue langue rouge, emblème du complexe de castration

les blessures sur lesquelles apparaissent des pustules habitées par des insectes

Ce visage est une condensation visuelle du rapport conflictuel avec la figure féminine

La figure massive et envahissante du grand visage pétrifié devient encore plus monumentale et étrange lorsqu'elle est mise en rapport avec l'horizon très bas et la simulation d'une profondeur infinie et insondable

L'installation précise du visage dans cette sorte de désert froid et inhospitalier permettait à Dali de fournir une forme et un espace organisant visuellement les souvenirs d'enfance qui étaient en train de refaire surface au cours de ce crucial été 1929



Plaisirs illuminés   1929


Influence de Chirico dans les boîtes contenant des images

A gauche sur l'horizon un crâne qui ressemble à un cerveau

Influence de René Magritte qui séjourna à Cadaques durant l'été 1929 dans les insertions contenant la sauterelle et d'autres objets dans la boîte centrale et dans les cyclistes qui portent des amandes sucrées sur leur tête dans la boîte à droite

Influence de Max Ernst dans la série d'oiseaux totémique qui apparaît dans l'espace etroit entre les deux boîtes centrales

Autoportrait caractéristique de Dali endormi dans la boîte centrale. Du sang coule du nez et de  la bouche de Dali

Sur la boîte deux cruches avec des visages de femmes jetant des regards sournois. Un lion libidineux regarde la plus grande des deux cruches

Sur la gauche de la boîte un homme avec des mollusques sur son épaule regarde par une fêlure

En dessous l'eau coule de la boîte et forme une grande vague qui balaie une femme étreinte par un homme

A proximité deux mains se battent avec un couteau ensanglanté

Dans la boîte à gauche un homme tire sur une forme qui ressemble à un rocher

"Plaisirs illuminés" car si dans la période gothique les plaisirs civilisés ou criminels ne pouvaient être entrevus que dans la demi-lumière des lampes à pétrole ils peuvent maintenant être "mis sens dessus dessous comme une chaussette et affichés en plein jour"




Lion, cheval, dormeuse invisibles


Femme, cheval paranoïaques   1930

Dali a créé plusieurs versions sur ce sujet

Devant la base d'une colonne gigantesque se trouve un grand bateau avec deux personnages faisant un gros effort à gauche à sa proue

Devant eux sont des formes qui ressemblent à un bras et à une main plus un autre personnage faisant un gros effort

Devant la partie centrale du bateau est une forme douce et amorphe

A droite vers l'arrière du vaisseau se trouve une autre forme qui ressemble au tronc et aux jambes supérieures d'une femme

Ses jambes sont reflétées par la surface d'une plate-forme

De chaque côté du vaisseau se situent des cordons complexes qui peuvent être interprétés comme une accumulation de cheveux, surtout à gauche où les formes sont très fluides et rondes

La forme dans son ensemble peut également être interprétée comme un animal avec sa queue et ses pattes arrières à gauche, son corps immédiatement sur le devant du bateau et sa pattes de devant et sa tête léonine à droite

Il est aussi possible de discerner dans l'intégralité de la forme le corps et la tête d'un cheval faisant face sur la gauche avec sa tête touchant la fondation de la plate-forme

L'ouverture formée par le pouce et les doigts d'une main se transforme en narine sur le cheval et la forme au-dessus devient le visage

La crinière léonine à droite devient la queue du cheval et la forme féminine se transforme en partie supérieure des pattes arrières





Guillaume Tell   1930


Guillaume Tell est supposé avoir gagné un pari en perçant une pomme sur la tête de son fils avec une flèche

En 1930 le propre père de Dali avait rompu avec lui

Sur la droite le père jetant des regards sournois tient une paire de ciseaux qui par leur alignement horizontal avec le pénis exposé de l'homme suggèrent clairement une castration imminente d'autant plus que les ciseaux se trouvent au-dessus d'une fontaine d'où l'eau gicle

Le geste de l'homme vers l'autre homme plus jeune à gauche dont les organes génitaux sont masqués indique clairement qui il veut émasculer tout comme la dissimulation du visage dans sa main  et le geste accusatif avec son autre bras

Une image d'un nid d'oiseau contenant quelques œufs associe la puissance sexuelle et les organses génitaux qui sont masqués par une feuille à côté et ce masque représente la notion de castration

Au-dessus de l'homme barbu un personnage identique placé à un piano est confronté à une tête de lion : les têtes de lion pour Dali représentent la sauvagerie sexuelle et la libidinosité

Du piano un cheval vivant avec des organes génitaux proéminents monte sur la carcasse d'un âne mort mangé par les fourmis

L'amalgame des deux animaux est un lien avec la relation père/fils  et puissance sexuelle/émasculation

La sculpture du bas-relief à la fin du petit mur en bas est une association entre la femme et le rôle du phallus

Les mains étendues des deux hommes proviennent de la fresque de la création de Michel-Ange sur le plafond de la chapelle Sixtine à Rome

Ossification prématurée d'une gare   1930


A travers une vaste plaine plate mène une piste de chemin de fer vers l'horizon qui va être bloquée par une grande botte féminine

De telles chaussures ont procuré beaucoup de plaisir fétichiste à Dali

L'ombre d'un bâtiment invisible tombe obliquement à travers la plaine juste au moment où l'ombre plus sombre d'une femme invisible traverse le mur de la station de chemin de fer

A côté de la femme un œuf jette une ombre phallique

Un personnage tout en muscles, certains relâchés, d'autres tendus

Deux gobelets sont attachés à son corps qui seraient remplis de lait chaud, un des penchants durables de Dali

Le sexe et le visage du personnage ne sont pas évidents car masqués par une horloge de gare molle


Dormeuse, cheval, lion invisibles   1930


A propos de ce tableau Dali a donné une définition "L'image-double (dont l'exemple peut être celui de l'image du seul cheval qui est en même temps l'image d'une femme) peut se prolonger, continuant le processus paranoïaque, l'existence d'une autre idée obsédante étant alors suffisante, pour qu'une troisième image apparaisse (l'image d'un lion par exemple) et ainsi de suite, jusqu'à concurrence d'un nombre d'images limité uniquement par le degré de capacité paranoïaque de la pensée"

Pour cet éternel insatisfait qu'est Salvador, chaque figure prend constamment congé d'elle même pour en rejoindre d'autres qui l'enrichissent en grappe

Chaque image en contient et peut en déployer une infinité d'autres, reliant des réalités différentes et initialement lointaines, en l'occurence celle du sommeil ou de l'abandon érotique d'une femme, et le monde animal

Tout cela plaisait aux surréalistes et surtout à Breton qui y voyait la démonstration de la toute puissance des rêveries associatives




Le bureaucrate moyen    1930


Ce tableau renvoie au père de l'artiste qui était notaire à Figueras et non employé de bureau mais Dali a trouvé dans le terme de "bureaucrate" le titre le plus dévalorisant

Il place cette figure étrange et assez sinistre au premier plan d'un paysage rocheux des environs de Cadaqués où enfant il venait en vacances avec sa famille

Penché en avant le crâne rasé révèle deux trous dont l'un renferme un amas de coquilles délicates

De ce tableau émane un étrange sentiment d'appréhension

Il fut peint durant l'année suivant le bannissement du domicile paternel de Dali et de sa compagne, qui s'étaient retrouvés à la rue et sans le sou

Son père avait été outré par sa liaison avec Gala, une femme mariée

Dali voulut faire un film qui ne fut jamais tourné pour "présenter  la famille comme le substrat historique et le bouillon de culture des névroses et conflits psychologiques"



Les roses sanglantes  1930


Vers l'été 1930 Gala souffrait beaucoup en raison d'un kyste gynécologique. Il lui sera enlevé l'année suivante durant une opération qui l'a rendue stérile. La façon de Dali de calmer l'inquiétude née par sa maladie était de créer cette peinture à l'huile

Une femme semble avoir été attachée à une colonne comme saint Sébastien sauf que des roses poussent à la place de son ventre et laissent tomber des gouttes de sang

Pour Dali les menstrues ont provoqué du dégoût et l'idée d'un problème gynécologique doit l'avoir terrifié et il a traité de ces deux peurs dans ce tableau

Le peintre a pu faire allusion à lui-même par l'intermédiaire des ombres qui traversent la terrasse à droite


VERS  1ère  PAGE  DALI

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VERS  1ère  PAGE  DALI

Remords ou sphinx enlisé   1931


Dans l'Egypte ancienne un sphinx était la combinaison d'un corps de lion avec la tête d'un être humain

Ici les seuls attributs de son sphinx sont deux de ses "fétiches les plus puissants" : une chaussure et un verre de lait chaud

Ceux-ci sont glissés sous la peau de son dos comme elle prend la pose pour montrer son chagrin, reposant sa tête sur une main

Dali a pu dessiner son sphinx plein de remords pour exprimer le sentiment de Gala d'avoir été rendue stérile pour des raisons gynécologiques

La longue ombre jetée par le sphinx mène l'œil vers les falaises rocheuses

Les fissures multiples et les rayures de ces roches traduisent les remords du sphinx