Vache spectrale, dit aussi Le Bélier 1928
Sur fond de plaine de l'Ampurdan cette composition très simple figue un oiseau dont la tête se métamorphose en deux visages de profil. A l'arrière plan se trouve un mouton tête baissée avec un cercle vide en guise d'oeil, tout comme l'oiseau au premier plan
C'est la pleine lune et le ciel semble s'obscurcir. Il règne un air de désolation
Dali produisit cette année là un certain nombre d'images d'oiseaux (Picasso et Matisse aussi ont utilisé le motif de l'oiseau)
"Toute la journée, assis devant mon chevalet, je fixais ma toile comme un médium pour en voir surgir les éléments de ma propre imagination... Il m'arrivait de violents coups de bec sur le front... Lorsque les coups de bec avaient cessé, je sentais à nouveau la gravité calme de Minerve et la main froide de l'intelligence me passer sur le front"
Les désirs inassouvis 1928
Tableau peint à Cadaquès pendant l'été 1928 en envoyé au Salon d'Automne. Devant les évidentes allusions sexuelles les organisateurs préférèrent le retirer
Sur une plaine on aperçoit deux petites aires de sable. Sur un de ces espaces se trouve une main avec son petit doigt prolongé comme un phallus
Le pouce et l'index évoquent un sexe féminin
Le doigt pointe vers la forme divisée en face dont on ne sait si elle est masculine ou féminine. Au bout d'une des ces formes jaillit une petite ouverture de sang
Dali fit une conférence pour protester, conférence qui provoqua un scandale car il insulta tous les peintres qui faisaient des arbres tordus
"C'est un des premiers tableaux de l'époque où j'ai collé des graviers ..."
Dali considérait la série de tableaux peints avec des graviers comme la plus importante avant le surréalisme
Dali aimait le scandale : au cours d'une conférence organisée par une personnalité de Catalogne il appela l'organisateur "grand pédéraste et grand putréfacteur poilu". Il n'a pu continuer car tout le monde a jeté des chaises, a tout cassé
L'âne pourri 1928
Repérant dans l'ordure la furie d'une beauté non encore révélée Dali son essai de 1930 intitulé "L'âne pourri" "Rien ne peut me convaincre que cette cruelle putréfaction de l'âne soit autre chose que le reflet aveuglant et dur de nouvelles pierres précieuses"
Un été ultra-
L'enthousiasme suscité par son second voyage à Paris en automne 1928, et le surréalisme qui était dans l'air ont restitué à Dali les figures de son passé le plus lointain
Ressurgissait chez lui une enfance attirée et terrifiée par la sexualité couplée à la mort, par la putréfaction qui transfigure la matière, la rend luisante et répugnante
Petites cendres 1928
Ce tableau peint par Dali pendant son service militaire rassemble un essaim de symboles,
de fragments qui sont autant de signes de peurs, de désirs, de prémonitions : la
tête tombée de Lorca, l'âne, l'oiseau-
"Une main qui n 'est pas amie, que je ne connais pas, que j'ai vue dans le "présommeil"
Dali exhibe sa virtuosité sur les plus infimes détails d'une surface petite (64*48)
Mais s'il "attend" que les images arrivent sur le tableau d'une source inconnue (il place la toile au pied de son lit pour que les images du rêve passent rapidement sur la toile), s'il est désormais complètement surréaliste et le proclame bien haut, il n'en estime pas moins que l'automatisme inconscient recommandé par les textes sacrés du mouvement doit passer par le fignolage et la fixation d'une technique de reproduction parfaite
Une vaste forme humanoïde sans sexe se dresse au-
La tête d'un oiseau y jette un coup d'œil, son aile est simplement indiquée par une ligne
De l'autre côté du torse un autre oiseau est suspendu par une griffe rouge
Une longue forme phallique s'allonge vers le corps
Un doigt point phalliquement vers deux seins
A l'horizon sur la gauche repose la tête de Lorca qui dort
Vers la droite la tête d'un Dali fringant
Deux torses féminins dont l'un déverse du lait du sein droit, une règle, un bras humain
Le Sacré-
(Parfois je crache par plaisir sur le portrait de ma mère) 1929
Encre de Chine sur toile de lin
Ce dessin a été exposé à la première exposition personnelle de Dali qui s'est tenue à Paris en 1929
Influence de Francis Picabia (1879-
Représentation de Jésus avec la main levée
Au lieu d'annoncer la Trinité au moyen d'un pouce et de deux autres doigts levés comme c'est la tradition les doigts sont croisés comme pour souhaiter "bonne chance"
Nous pourrions aussi croiser nos doigts en guise de prière pour obtenir une intervention divine car tout cela serait balivernes superstitieuses
Le père du peintre interpréta la référence maternelle comme allusion à sa femme et à la mère du peintre
Il mit son "cochon de fils" à la porte de la maison de Figueres où Dali séjournait alors avec Bunuel et il a quasiment déshérité son fils
Ils restèrent cinq ans sans se parler et leurs rapports ne furent jamais les mêmes
Dali "J'avais toujours éprouvé la plus grande estime à l'égard de ma mère et mon père. J'ai voulu manifester la contradiction entre le conscient et le subconscient. Une telle rupture existe par le rêve dans lequel nous assassinons quelqu'un que nous aimons"
Les premiers jours du printemps 1929
L'année 1929 fut un tournant pour le jeune Dali
Il s'éprit de Gala Eluard, épouse du poète surréaliste ce qui mit fin à une hystérie nerveuse qui menaçait de verser dans la dépression totale
Il créa avec Bunuel le film "Le chien andalou" qui sortit à Paris et créa l'évènement. Dans ce film comme dans ce tableau la sexualité est représentée crûment
Dans ce paysage étrange et inquiétant, une série de personnages solitaires jouent des scènes de nature sexuelle, ouvertement ou non, de façon latente ou manifeste, pour utiliser un langage freudien
Dali renforce la nature sous-
Louis Aragon a décrit cette technique comme un double jeu entre peinture et collage, illusion et réalité organisée. Selon lui l'oeuvre de Dali est un roman dont le peintre serait le protagoniste principal
Deux canaux totalement dans l'ombre mènent vers l'horizon lointain. Un homme est
assis à mi-
Devant nous un homme et une femme devant un collage encadré représentant un paquebot de luxe
L'homme à genoux est baillonné et ses mains s'écoulent dans un seau vers lequel pointe un doigt phallique
Sous le doigt deux boules et un trou avancent un jeu de mots sexuel éviden
La femme à la place du visage à un orifice qui attire les mouches
Entre ses seins en guise de cravate une fissure sexuelle féminine
Dali a collé entre les deux canaux une photo de lui-
De ces formes s'échappe un bras dont la main frôle une tête sur la bouche de laquelle une sauterelle s'est posée
Cette tête représente l'artiste lui-
Au-
Une cruche en forme de tête de femme vers laquelle se lèvent des têtes d'oiseau
A droite une jeune fille offre un sac à un homme barbu
Plus loin un homme étendu tiré en arrière par un homme en chapeau melon
Plus loin un homme et un enfant viennent vers nous
Les accomodations du désir 1929
En 1929 Dali est tombé amoureux de Gala Eluard. Ce tableau porte sur les névroses sexuelles de l'artiste. Il est terrifié à l'idée de ne pouvoir consommer son histoire d'amour avec Gala
Les étranges formes ovoïdes placées dans ce paysage mental de la plaine de l'Ampurdan sont en rapport avec cette crise d'ordre sexuel
Ce n'est que tardivement qu'il admit que les angoisses nées de sa relation avec Gala étaient le sujet de ce tableau
Dans un premier temps il insista sur sa relation avec son père dominateur. En haut et à droite un homme nu, l'artiste, se cramponne désespérement à un homme plus âgé, sans doute son père. Chaque jour son père l'aurait fait marcher sept kilomètres pour aller à l'école à travers la plaine de l'Ampurdan. En réalité Dali n'avait que quelques mètres à parcourir pour aller à l'école
Il transforme la luxuriante vallée de l'Ampurdan en une sorte de désert saharien
En dessous l'homme qui se tient la tête de honte serait selon Dali un autre autoprotrait
Le jeu lugubre 1929
Dali peint ce tableau alors qu'il reçoit en été 1929 la visite d'Eluard et de sa femme Gala
Le tableau traite de la peur de la castration
Au centre : figuration du sujet au moment de l'émasculation. L'émasculation est exprimée par le déchirement de la partie supérieure du corps
A gauche :figuration du sujet contemplant avec complaisance sa propre émasculation et donnant l'amplification poétique
En haut : désirs du sujet exprimés par une ascension ailée des objets du désir. Le caractère burlesque et provoquant de cette expression marque la recherche volontaire de la punition
En bas à droite : figuration du sujet souillé échappant à l'émasculation par une attitude écoeurante
Au centre gauche une statue munie d'une main gigantesque cache son visage de honte. La honte et la main sont liées : cette statue exprime la honte que Dali éprouvait à l'égard de la masturbation
Un autre homme placé sur le socle soulève un objet ressemblant aux petites lèvres
Sous le socle un lion pour exprimer l'agression sexuelle
Monument impérial à la femme-
Ce tableau est le début de la divinisation de Gala, roc surgi pour protéger Salvador des vacillements du vide, de la solitude, des menaces de son adolescence
Portrait de Paul Eluard 1929
Ce portrait a été commencé pendant le séjour du poète à Cadaqués au cours duquel Gala et Dali firent le serment de ne plus jamais se quitter
Le langage dalinien venait juste de prendre une nouvelle tournure : les personnes se réifient et les objets prennent vie
Une main écrase la terrifiante sauterelle sur le front d'Eluard tandis que de sa tête surgit le lion, symbole d'un désir incontrôlable en direction d'un visage ayant la forme d'un vase, symbole de virginité
Le doigt d'une autre main s'enfonce dans une sauterelle gigantesque placé à côté du visage du Grand Masturbateur
Deux mains, celles de Gala et de Dali, s'entrelacent au niveau des parties génitales du poète