VIE  DE  COROT

Jean-Baptiste Camille Corot est né rue du Bac à Paris[3].

Corot est issu d’une famille de commerçants aisés : sa mère, d’origine suisse, et son père, d'origine bourguignonne, gèrent un magasin de mode réputé situé à l’angle de la rue du Bac et du quai Voltaire à Paris. Les Corot ont deux autres enfants, Annette Octavie (morte en 1874, trois ans avant Corot) et Victoire Anne (morte de chagrin en 1821 à 24 ans suite à la perte d'un enfant).

Jean-Baptiste fait des études sans éclat au collège de Rouen (1807-1812).

Il ne fut jamais ami de l'orthographe et de la grammaire.

Le dimanche il est accueilli par des amis de ses parents, les Sennegon, auprès desquels il apprendra à aimer la nature. Au sortir du lycée en 1815, il est placé par son père chez deux marchands de drap successivement à Paris .

Mais le jeune homme n’a guère de goût pour le commerce, et suit des cours de dessin à l'Académie de Charles Suisse le soir[3], et en 1822 il finit par convaincre ses parents, à l’âge de 26 ans, de l’autoriser à poursuivre une carrière de peintre, en obtenant d’eux une rente annuelle importante. L’aisance de ses parents le met à l’abri du besoin, mais en contrepartie il restera dépendant d’eux jusqu’à leur mort.

Au printemps de cette même année, il entre dans l’atelier du peintre  Michallon, guère plus âgé que lui et qui rentre de Rome où l’a conduit le Grand Prix du paysage historique obtenu en 1817.

Michallon inculque à Corot les principes du néoclassicisme et l’encourage à travailler en plein air. Mais il meurt quelques mois plus tard, et Corot poursuit sa formation avec  Bertin, qui a eu Michallon comme élève et qui comme lui enseigne à Corot la science des compositions néoclassiques et du paysage historique.

Bertin l’incite à aller travailler en forêt de Fontainebleau. Corot sera ainsi l’un des premiers peintres à travailler dans le village de Barbizon. Il ira également peindre dans la vallée de la Seine, et sur les bords de la Manche[3].

Depuis le XVIIIe siècle le voyage en Italie fait partie de la formation de tout jeune artiste. Corot est déjà familier des paysages italiens qu’il a copiés sur les toiles rapportées d’Italie par son maître Michallon. C’est donc tout naturellement qu’il demande à ses parents de financer son premier voyage. Il séjournera, entre 1825 et 1828, à Rome, Naples et Venise.

Il se rend une seconde fois en Italie en 1834 (Toscane, Venise) et à nouveau en 1843.

Corot parcourt aussi sans relâche les provinces françaises à la recherche de paysages qu’il peint pour le plaisir et pour l’enrichissement visuel qu’ils lui apportent: s’il a commencé à exercer ses talents de jeune peintre à Ville-d'Avray, près de Paris, il se rend fréquemment, entre 1830 et 1845, en Normandie chez ses amis les Sennegon, mais aussi en Auvergne, en Provence, en Limousin, en Bourgogne, en Bretagne, en Charente, dans le Morvan ainsi qu’en Suisse. Le plus souvent il séjourne chez des amis, peintres ou drapiers.

Il peint surtout des paysages mais s’intéresse aussi aux architectures Sans idéaliser son modèle, il s’efforce, d’une touche épaisse et rapide, d’en capturer l’atmosphère, de saisir les jeux de lumière. Mais ces toiles ne sont pour lui que des études, qu’il ne songe jamais à exposer. Elles sont en effet destinées à être réemployées dans des compositions plus ambitieuses, à caractère historique, mythologique ou religieux, seules dignes selon l’idéal néoclassique d’être présentées au public.

Corot participera régulièrement au Salon, alternant thèmes religieux et mythologiques.

Pourtant Corot s’avère difficile à classer et échappe aux écoles : si les « modernes », séduits par son traitement du paysage, regrettent son attachement obstiné aux thèmes néoclassiques, les néoclassiques pour leur part regimbent devant le traitement réaliste de ses arbres et de ses rochers.

À partir des années 1850 la notoriété de Corot grandit, et le public et les marchands commencent à s’intéresser à lui. Ses parents disparus (sa mère en 1851, son père dès 1847), il se trouve à la fois plus indépendant financièrement et libéré des contraintes familiales.

Il continue à voyager, parcourt le Dauphiné en compagnie du peintre et ami Daubigny avec qui il va peindre à Auvers-sur-Oise. Corot se rend régulièrement à Arras et Douai, chez Alfred Robaut avec qui il s’est lié d’amitié.

Il est par ailleurs de plus en plus attiré, à partir de 1850, par une peinture dans laquelle il laisse libre cours à son imagination, délaissant l’exactitude du paysage peint « sur le motif », qu’il remodèle à son gré, et renonçant aux récits historiques, qui ne sont plus qu’un prétexte à des paysages rêvés.

Le thème du « souvenir » devient prépondérant dans son œuvre, mêlant les réminiscences d’un site et les émotions qui lui restent associées dans la mémoire du peintre.

Pendant les dernières années de sa vie Corot gagna de fortes sommes d’argent grâce à ses toiles, qui étaient très demandées. Sa générosité était proverbiale : en 1871, il donna 20 000 francs aux pauvres de Paris, qui subissaient le siège des Prussiens. En 1872, il acheta une maison à Auvers-sur-Oise qu’il offrit à Honoré Daumier, devenu aveugle et sans ressources. En 1875, il donna 10 000 francs à la veuve de Jean-François Millet pour l’aider avec ses enfants. Sa générosité n’était donc pas une légende.

Atteint d'un cancer à l'estomac, Corot mourut à Ville d'Avray  le 22 février 1875


CAMILLE  COROT  

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Nous allons redécouvrir

l'oeuvre

De Camille COROT


À partir de tableaux commentés


La note ci-dessous vous présente un résumé de sa vie

Rome vue des jardins Farnèse, le Matin - mars 1826


C'est des jardins Farnèse aménagés au 16ème siècle sur l'antique palais de Tibère que l'on a la plus belle vue sur le site du Forum romain et des ruines qui l'entourent

Le site était apprécié des artistes séjournant à Rome

En ce mois de mars 1826 Corot n'était pas original lorsque, quittant le quartier de la Piazza di Spagna où il résidait il allait travailler devant le Forum ou le Colisée à partir du haut des jardins du Palatin

Ce qui est original c'est la décision de Corot de mettre en chantier en même temps trois études de plein air sous trois angles différents à trois heures différentes du jour

Le thème des heures du jour était devenu à la mode comme celui des quatre saisons

Corot veut exprimer l'éclairage humide et frais du matin quand le soleil donne le sentiment de la vie par la graduation de sa chaleur

Avec ce tableau il exalte la vibration de la lumière du matin comme pure énergie

L'orientation suivie pour chacune des ses trois études suit fidèlement le cours du soleil : le matin il regarde l'église San Sebastiano.

Corot a combiné la spontanéité d'une observation en plein air et la rigueur du travail en atelier

Dans sa carrière Corot alterne sans cesse plein air et atelier


Vue de Rome, le Colisée, le Midi - mars 1826


Arrivé à Rome au début de l'hiver 1825 Corot s'y sent tout de suite à l'aise

Devant la pierre de Rome, buveuse de soleil, et les taches des arbres qui ombrent les jardins il trouve sur sa palette la tonalité qui établit la juste distance entre les éléments de la nature, les arbres au ciel et les architectures puissantes des bâtiments

Corot doutait de lui

Aligny un paysagiste réputé qui séjournait à Rome à la même période regardant sur le mont Palatin l'étude avancée de Corot lui exprima son admiration

Corot peu habitué aux compliments se demandait si Aligny ne se moquait pas de lui

Corot dut à Aligny cette confiance en lui-même sans laquelle nul talent ne peut se développer

Aligny le poussa à soigner le dessin d'après nature. Il lui recommandait une exécution serrée où rien ne fût laissé au hasard ou à la fantaisie


Le Forum vu des jardins Farnèse, le Soir - mars 1826


A Rome où il arrive à la fin de novembre 1825 Corot partage les habitudes de ses confrères plus chevronnés. Les apéritifs se prennent au café Greco ( qui hélas vient de fermer )

Dans l'esprit des maîtres de Corot comme Valenciennes la peinture d'après nature ne devait servir qu'à produire des esquisses à retravailler en atelier pour produire un "vrai" tableau

Mais pour Corot "Il faut être sévère d'après nature et ne pas se contenter d'un croquis fait à la hâte"

Sur l'armature d'un dessin solide il fixe les taches de couleur comme des vitraux entre les baguettes de plomb

Les couleurs sont étalées en gradations modérées à partir d'une palette relativement "pauvre" où triomphent les ocres, les bruns et les bleus délavés

Corot opère une fusion : à la rigueur classique qui anime les compositions ordonnées et les contours précis il allie le goût de la lumière et la sensualité de la couleur

Corot rentre en France à la fin de l'année 1828 avec 150 dessins et 200 huiles sur toile

Il retournera deux fois en Italie pour des périodes plus brèves en 1834 et 1843

Rentré en France il préféra porter son attention sur les paysages saturés de vert de son pays natal


Le pont de Narni - septembre 1826


A la mi-septembre 1826 Corot séjourne plusieurs fois à Narni, cité qui avait retenu l'attention à cause des ruines romaines d'un pont construit sur la Nera par l'empereur Auguste, pont de 30 m de haut et 128 m de long

Corot fut frappé par la beauté du site et réalisa cette étude dès son arrivée à Narni.

Corot a laissé le premier plan au stade d'esquisse à peine ébauchée tandis que toute son attention s'est concentrée sur les jeux de lumière avec le pont, l'eau et la végétation environnante

Corot a solidement construit son étude prise sur  le vif afin d'équilibrer les masses

L'horizon occupe le tiers supérieur de l'oeuvre, la rivière et les montagnes les deux tiers restant

La partie inférieur de l'étude est divisée en trois : à gauche, un versant de la montagne; à droite, une autre pente; entre les deux, la rivière qui coule du centre du tableau vers le coin inférieur droit

La ligne des montagnes dans le lointain et les piles du pont, bien qu'en ruine, assurent une synthèse entre les différentes parties du tableau

Etude exécutée le matin puisque la lumière rasante du soleil éclaire l'oeuvre de la droite, c'est à dire de l'est

Corot n'a jamais envisagé cette étude comme un tableau achevé mais l'oeil contemporain habitué à l'esthétique impressionniste et attiré par l'esquisse et l'inachevé a voulu voir dans cette oeuvre la manifestation d'une démarche d'avant-garde

Cette étude a été citée pour présenter Corot comme un précurseur de l'impressionnisme


Le pont de Narni - 1826/1827


Ce tableau fut exposé au Salon de 1827. Les historiens de l'art privilégient l'étude par rapport au tableau du Salon

Le tableau composé en atelier était considéré comme artificiel, froid, coupé du réel, académique

Le motif du pont qui s'offrait en surplomb et de près recule et disparaît au sein d'un décor pastoral imité de Claude Lorrain

Les maîtres de Corot insistaient sur la nécessité pour le peintre de faire appel à son imagination pour recréer la nature une fois acquise une expérience solide de ses formes étudiées en plein air

En exposant ce tableau au Salon Corot voulait montrer qu'il était capable de réinventer la  nature et "qu'il était du métier"

Cette manière de boucher totalement un des deux côtés de la composition, ici la partie gauche au moyen du rideau d'arbres, et d'ouvrir l'autre moitié largement sur le ciel provient de la tradition classique (influence de Claude Le Lorrain)

Corot utilisa ensuite ce procédé durant toute sa carrière (Souvenir de Mortefontaine)

Corot garda ce tableau dans sa chambre à coucher jusqu'à sa mort


Civita Castellana - 1826/1827


En automne 1826 Corot découvre les superbes roches rouges de Civita Castellana

Il ne se lasse pas d'en étudier les structures et les couleurs

Son traitement de la masse minérale et de la lumière en fait un précurseur de Cézanne : il construit les formes par la lumière

Un critique a écrit : "Corot recherche le style par de grandes lignes résolument écrites, par une sobriété voulue dans les détails. Il choisissait des arbres peu tourmentés, des rochers simples aux cassures continuées"


Château Saint Ange - 1826/1828


Construit par l'empereur romain Hadrien à partir de 135 ap JC, afin de devenir le mausolée impérial, le château Saint Ange devint une forteresse puis une prison. Les papes le restaurèrent et en firent leur refuge durant les temps de crise (Clément VII s'y réfugia six mois après le sac de Rome par Charles Quint en 1527)

Durant son séjour romain Corot le peignit plusieurs fois sous différents angless

Pour ce tableau Corot fit du château le centre de sa composition, le pont Saint Ange et quelques maisons de la rive gauche du Tibre apparaissant dans la partie droite

Composition dynamique par la variété des tons volontairement limitée, par la construction en touches colorées des maisons à droite qui annonce Cézanne et par la diagonale du pont qui relie les murs du château et le bloc des maisons

Corot expliquait "Je ne suis jamais pressé d'arriver au détail; les masses et le caractère d'un tableau m'intéressent avant tout"


Honfleur, Calvaire de la Côte de Grâce - été 1830


Ce tableau est de l'été 1830 alors que Corot s'était éloigné de Paris pour échapper aux évènements révolutionnaires

En 1830 Corot séjourna sur la côte normande en août et septembre. Il étudia durant ces journées de travail les phénomènes lumineux engendrés par la parfaite transparence de l'atmosphère des bords de mer

La Côte de Grâce surplombe l'estuaire de la Seine et la rade du Havre

La ferme Saint Simon, l'auberge de la mère Toutain qui accueillait tous les peintres de passage à Honfleur était située sur cette côte et Corot qui y logeait n'avait que quelques centaines de mètres à parcourir pour trouver au milieu des bois le célèbre calvaire

Cette oeuvre fut sans doute peinte pour l'essentiel en plein air

Grande luminosité et mise en page ingénieuse avec la mer et les falaises du Havre à l'arrière-plan et ce sous-bois qui occupe toute la partie gauche

Cette composition spontanée et réaliste, par le travail raffiné de la lumière, le thème marin et les larges touches est l'un des tableaux qui expliquent le rapprochement effectué entre Corot et les impressionnistes

Corot aime à meubler ses paysages de petits personnages qui semblent parfois plaqués comme des décalcomanies

Une ronde de religieuses et de paysannes au pied de la croix et quelques silhouettes semées ici et là accrochent le regard et donnent un sens à la scène

Jeux subtils et variés des reflets lumineux sur les troncs d'arbres


La Cathédrale de Chartres - 1830


La révolution des Trois Glorieuses qui avait éclaté le 27 juillet 1830 angoissait Corot. "Le sifflement des balles dérangeait sa quiétude. Il fit son paquet et profita de l'occasion pour esquisser son tour de France"

Il s'enthousiasmait pour les chefs d'oeuvres de l'architecture gothique

Le romantisme avait mis à la mode l'architecture du moyen-âge

La passion pour le moyen-âge s'était révélée sous l'Empire dans Le Génie du christianisme de Chateaubriand

Michelet ironisait sur "la curieuse maladie de notre temps, la manie du gothique"

La cathédrale fut construite de 1194 à 1260

Corot a choisi de représenter le site aux alentours de midi lorsque la lumière du soleil vient frapper la façade sud

Mise en page hardie puisque l'artiste a installé au centre de son oeuvre cette butte qui cache le reste de la ville et une partie de la cathédrale

Corot considérait cette toile comme une étude car elle ne fut jamais exposée de son vivant

Corot était préoccupé par l'utilisation de la lumière dans la description des volumes architecturaux

Il représente le monument avec minutie consacrant à sa façade un dessin scrupuleux

A la magistrale et puissante façade de la cathédrale répond la modestie des autres motifs : les pierres accumulées, la butte, le fragment de pilier et la charrette paysanne

L'âpre lumière rapportée d'Italie découpe et cisèle méticuleusement les arabesques de pierre et les contours du monument

En donnant au monticule du premier plan une importance particulière, Corot veut affirmer la primauté de la nature par rapport à l'architecture mais aussi la coexistence du chaos et de l'ordre absolu

En 1830 Victor Hugo écrit "Notre Dame de Paris", preuve supplémentaire de cet air du temps


Louise Harduin - 1831


Louise Harduin est la nièce d'un ami de jeunesse de Corot, Théodore Scribe

Elle venait d'être frappée par un deuil cruel en la personne de ses parents

A son retour d'Italie, plus confiant dans sa technique, Corot avait accepté de peindre quelques portraits de ses proches

Théodore Scribe (1797-1873) provient du même milieu de drapiers que Corot. Il fonda une maison d'édition ce qui lui donna une position sociale lui permettant parfois d'aider Corot. Il n'était qu'un cousin éloigné du dramaturge Eugène Scribe

Lorsque Corot peignit Louise, elle venait d'avoir quinze ans. Sa mère était morte en mars 1830 et son père en mars 1831. C'est pourquoi elle porte un vêtement de deuil

Théodore Scribe avait demandé à Corot de la distraire et de lui communiquer cette joie de vivre dont il était naturellement porteur

Il a représenté la jeune fille étrangement sereine malgré son deuil récent

Elle est représentée sur une colline avec un paysage panoramique rapidement esquissé à l'arrière-plan

Ce portrait, où certains ont vu l'influence d'Ingres, est l'un des rares portraits de cette période peint dans un paysage, genre que Corot développa fréquemment après 1835

Louise Harduin épouse en 1835 Augustin Guillaumin, avocat, dont elle eut cinq enfants. Elle mourut en 1878


Ferme dans la Nièvre - 1831


En 1831 Corot travaillait pour la première fois dans le Morvan alors que cette région allait devenir un de ses lieux d'inspiration favoris

Corot renouait avec le thème de la ferme et de son environnement qu'il avait abordé dès ses premiers essais en peinture durant ses séjours en forêt de Fontainebleau

La pauvreté du lieu est décrite sans misérabilisme : les deux chevaux tirent une charrette de foin bien garnie

Corot voulait intégrer la figure humaine dans les paysages : il a animé le premier plan de plusieurs figures : deux paysannes au bord du ruisseau, l'une lavant le linge, l'autre tenant un enfant dans ses bras; les deux chevaux; la charrette et un paysan qui rapporte des fagots

Durant cette période l'artiste s'intéressait à la peinture nordique : influence du réalisme des peintures flamandes et hollandaises

Cette oeuvre fut entièrement exécutée en atelier  ce qui explique la parfaite intégration des figures, peintes en même temps que le paysage


Marie Louise Laure Sennegon - 1831


La soeur de Corot, Annette Octavie (1793-1874) épouse de Laurent Denis Sennegon eut sept enfants que Corot représenta dans de jolis portraits d'une grande sobriété de facture et de mise en page

Marie Louise Laure Sennegon, née en 1815, aînée de la famille épousa en 1833 Philibert Baudot

Tableau réussi par l'économie et la grâce des moyens mis en oeuvre

Brillante technique dont témoigne le foulard qui entoure le cou de la jeune femme et sa coiffure raffinée

L'absence de décor et le fond uni vert olive rappellent la technique néo-classique du portrait,  telle que David puis Ingres l'avaient pratiquée


Soissons, Fabrique de M. Henry - 1833


Au Salon de 1833 Corot avait reçu une médaille de deuxième classe.

Un commerçant actif dans le commerce du drap, ami de sa famille, lui fit peindre sa fabrique

Corot exécute l'image souhaitée avec une précision documentaire parfaite

Malgré la ressemblance exacte Corot ne fut pas payé car il passait pour un amateur

M. Henry avait su habilement utiliser la maison d'oeuvre d'une prison toute proche ce qui diminuait ses coûts de fabrication

M. Henry avait rencontré Corot alors qu'il travaillait dans la draperie et la confection et qu'il n'avait pas encore commencé sa carrière de peintre

Le tableau représente la maison de M. Henry ainsi que la manufacture de textiles qui occupait les restes des bâtiments d'une ancienne abbaye

La primauté du dessin des bâtiments, la construction solide, et le réalisme de la lumière ainsi que la touche fondue suggèrent une exécution en atelier

Tableau étonnant de réalisme, Corot ayant réussi l'effet de lumière grâce à une utilisation habile de l'ombre portée de mur d'enceinte de la propriété visible sur la droite, ombre qui accentue l'intensité du rayonnement solaire sur les façades

L'oeuvre paraît étrangement vide bien que Corot ait cherché à l'animer en montrant quelques ouvriers

Après trois années passées en Italie Corot était durant cette période influencé par la peinture nordique et il redécouvrait le réalisme et la précision de la peinture flamande et hollandaise

Saint Lô, vue générale de la ville - 1833


Durant l'été 1833 Corot séjourne à St Lô chez Isidore Elie, négociant en vins et spiritueux

Ce tableau est inachevé et le premier plan est indéfini

Jeu habile de la lumière qui modèles les architectures

La juxtaposition des touches créant l'espace et le modelé par la couleur seule évoque Cézanne

"Tout en cherchant l'imitation consciencieuse je ne perds pas un instant de vue l'émotion qui m'a saisi. Devant un lieu déterminé nous sommes saisis par une certaine grâce; ne la perdons jamais de vue et, en cherchant la vérité et l'exactitude, n'oublions jamais de revêtir cette apparence qui nous a touchés"

Cette toile rappelle l'aspect de la cité normande avant sa destruction totale par les bombardements anglo américains au cours de la Seconde guerre mondiale

Corot n'est pas retourné à St Lô entre 1837 et 1862 (25 ans) par honte du souvenir d'une soirée au cours de laquelle il s'était  "laissé entraîné à savourer trop longuement une eau de vie traîtresse" et "avait quelque peu perdu la notion des usages vis à vis d'une dame"


Octavie Sennegon - 1833


Sa nièce Octavie Sennegon est accoudée à la table d'acajou sur laquelle, souci du détail ou nécessité de couleur, est placée une montre en or

Elle ouvre de grands yeux étonnés sous sa coiffure accusant l'ovale du visage

Elle porte un fichu de  linon transparent, une robe gris bleu qu'avive le rouge de la cravate et de l'oeillet à sa ceinture


Trinité des Monts, vue prise de la Villa Medicis - 1830/1834


Ce tableau a été peint en atelier, ce qui conduit à le considérer non pas comme un témoignage direct des recherches picturales de Corot à Rome mais comme un exemple de ces tableaux "de souvenir" exécutés plus tard

Oeuvre inachevée : l'artiste avait l'habitude d'interrompre un travail qu'il comptait reprendre plus tard

Baudelaire avait écrit à propos d'un tableau de Corot " ... en général ce qui est bien fait n'est pas fini et ... une chose très finie peut ne pas être bien faite du tout"

C'était une pratique naturelle chez Corot que la reprise continuelle d'un tableau jusqu'à ce qu'il soit considéré comme achevé

"Je peins jusqu'à ce que je m'aperçoive de ce que j'ai fait. Je ne suis jamais pressé d'arriver au détail ... Je reviens sans cesse"


Notre Dame et le quai des Orfèvres - 1835


Le choix d'une palette presque monochrome et d'une perspective en plongée confèrent un cachet assez étrange à ce tableau qui restitue le souvenir plaisant du Paris disparu à la suite des transformations menées par Haussmann


Venise, la Piazzetta ou le quai des Esclavons - 1835


En octobre 1828 à la fin de son premier séjour en Italie Corot s'était déjà rendu à Venise où il n'était demeuré que quelques jours soucieux de retrouver sa famille après trois ans d'absence

Lors de son second voyage en 1834 il séjourna à Venise du 18 août au 9 septembre

Il admire la peinture vénitienne et particulièrement Titien. Il est frappé par la transparence de l'air salin et l'éclat de la lumière

Ce tableau a été peint par Corot dès son retour en France

Facture précise et minutieuse

A droite façade richement décorée du Palais des Doges et au fond la Libreria Vecchia

Au centre les deux colonnes de St Marc et St Théodore

A gauche Santa Maria della Salute

A gauche un bateau équilibre les architectures de la partie droite

Mais on ne voit pas l'île de San Giorgio Maggiore

Des groupes de personnages animent le tableau

Même si pour Corot ce tableau a un intérêt commercial, il a su conserver l'intensité de la lumière et les contrastes colorés


Florence, vue des jardins Boboli - 1834/1836


Corot demeure à Florence du 21 juillet au 10 août 1834

Corot a travaillé dans les jardins Boboli qui entourent le palais Pitti

A partir de ces jardins aménagés ver 1550 et dans lesquels eurent lieu les plus somptueuses fêtes des Medicis, Corot a peint plusieurs études

A partir de ces études il a réalisé cette huile. Par rapport aux études il a agrandi le premier plan pour en faire une vraie terrasse sur laquelle deux moines discutent

Le cyprès est un élément essentiel de la composition et il a ajouté un arbre à gauche afin de rétablir la symétrie

Belle luminosité de cette vue de Florence peinte en fin de journée alors que le soleil couchant frappe les clochers

Beau traitement des collines à l'horizon


Louise Claire Sennegon, future Madame Charmois - 1867


Cadette des quatre nièces de Corot, Louise Claire fut peinte l'année de ses seize ans et représentée en extérieur devant un paysage à la manière du portrait anglais

Référence à Ingres en raison de la description attentive du visage et de l'élégance du traitement des étoffes

La toilette est comparable à celles qui sont publiées dans  les gravures de mode de 1837

Le petit chapeau en forme de croissant était en vogue à ce moment-


Silène - 1838


Silène est un sujet mythologique d'un grand format (250*180) comportant de nombreuses figures que Corot réalisa afin de prouver sa capacité à traiter une composition complexe

La critique jugea le paysage presque parfait mais trouva que les personnages y étaient mal intégrés

Corot essayait d'égaler Poussin

La bacchanale parfaitement contrôlée manque de sensualité

Corot ne put jamais le vendre. La plupart de ses grandes oeuvres furent données par lui ou cédées à des prix dérisoires


Vue près de Volterra - 1838


Corot possède au plus haut point le sens de la lumière qui est l'âme du paysage, la clarté lucide et limpide qu'il admirait tant chez Giovanni Bellini

Il utilise une palette claire ennemie des rousseurs

Il incorpore un peu de blanc à tous ses tons, même dans l'ombre, pour les aérer, les alléger

"Je ne suis jamais pressé d'arriver au détail; les masses et le caractère d'un tableau m'intéressent avant tout ... Quand c'est bien vu alors je cherche les finesses de forme et de couleur"


Autoportrait - 1840


Corot était un homme traditionnellement décrit comme modeste, timide, peu sûr de lui

Corot offrit ce portrait au musées des Offices de Florence quelques jours avant sa mort, le musée lui ayant demandé un portrait de lui pour enrichir sa galerie des autoportraits

Corot s'est représenté vers l'âge de 40 ans

Il s'est observé dans une glace (il tient en effet son pinceau de la main gauche) devant un fond uni vierge de tout décor et a insisté sur le réalisme du traitement de son visage


La femme à la perle - 1842


La jeune femme qui servit de modèle s'appelait Berthe Goldschmidt

Ce n'est pas une perle qui orne le front de la jeune femme mais une petite feuille saillant d'une couronne qui produit l'effet d'ombre d'un bijou

Berthe a 16/17 ans. Ses parents vivaient d'un commerce d'étoffes anciennes

L'arête du nez s'épanouit pour former la double arcade sourcillière

Imperceptible sourire de la petite bouche

Corot a modifié le tableau original pour proposer une réponse moderne aux chefs d'oeuvres de la Renaissance

La pose trouve son origine dans la Joconde

Les femmes en costume sont représentées en buste et conçues comme des personnages allégoriques de la Renaissance

Elles sont vêtues de tenues régionales qui les  placent hors de la mode sans les enfermer dans un contexte historique


Bretonnes à la fontaine - 1842


Corot se rend en Bretagne pour la première fois au cours de l'été 1829

Le paysage représente Batz près du Croisic

Corot ne retient que l'essentiel du motif : la fontaine entourée de paysannes et les dunes vallonnées

Corot met en évidence le lavoir et le groupe de bretonnes revêtues du costume des paludières des salins voisins

En atténuant la caractérisation du site il confère à son oeuvre une sorte d'abstraction

Le  paysage épuré revêt une grandeur antique ou biblique évoquant les peintures classiques


L'avant-port de Rouen - 1842


Après son retour d'Italie en 1828 Corot s'était rendu plusieurs fois en Normandie

Il accumule des croquis et des études des quai, des mariniers et des déchargeurs

"J'ai mis en train une marine rouennaise. Si Ruysdael et Van de Velde pouvaient m'aider, cela ne me nuirait pas" écrit-il, revendiquant l'influence d'artistes hollandais

Ce tableau fut critiqué pour sa dette à l'égard de la peinture nordique


Tivoli, les jardins de la villa d'Este - 1843


Cette vue de Tivoli peinte dans les jardins de la villa d'Este lors du troisième voyage en Italie en 1843 résume l'art de Corot fondé sur les équilibres de la composition, des formes et de l'espace tout entier immergé dans une lumière douce et argentée, faite de particules en suspension

Cette lumière sert à unifier le paysage

La figure de l'enfant assis négligemment sur la balustrade précipite le regard à l'intérieur du cadre et fait ressentir la familiarité de l'espace

En intégrant avec tant de naturel dans sa toile le jeune portefaix qui l'accompagnait au cours de ses déplacements hors de Rome, Corot rend à son siècle la peinture de paysage


L'odalisque romaine ou Marietta - 1843


Cette oeuvre est le seul nu de Corot représenté en intérieur et le seul tableau de ce type hors de tout contexte mythologique ou allégorique

La peinture fut ébauchée sur un lavis rose recouvrant des traits légers à la mine de plomb

La pose du modèle qui évoque les odalisques d'Ingres dans la torsion du corps a déterminé le format de l'oeuvre

Variations sur les roses, les tons de chair et les ocres

Alternance des surfaces plates et modelées

Contours délicatement suggérés

Tête ostensiblement accentuée faisant face au spectateur de manière caractéristique

La banalité du visage proclame le refus de l'idéalisation

Manet se souviendra du contraste entre l'ombre du corps et la blancheur du drap

L'harmonie des ocres, des crèmes et des terres annonce Cézanne


Un moulin à Montmartre - 1840/1845


Le vieux moulin du Radet qui s'appela Moulin de la Galette à partir de 1834 devint plus tard célèbre grâce au tableau de Renoir

Cette étude fut remarquée pour sa luminosité exceptionnelle

Elle est la vue la plus aboutie de Paris que Corot ait peinte


Homère et les bergers, paysage - 1845


Homère ayant atterri dans l'île de Syros rencontre à trois bergers rencontrés les infortunes de sa propre Odyssée " Je  ne suis qu'un mortel et des plus malheureux ! Mais les dieux tout puissants gardaient à mon déclin les ténèbres, l'exil, l'indigence et la faim "



Le sujet s'inspirait du poème d'André Chénier "L'aveugle"

"L'aveugle ... près des bois marchait, faible et sur une pierre s'asseyait

Trois pasteurs, enfants de cette terre ... le suivaient et ... l'écoutaient de loin en s'approchant de lui"

Il n'y a pas de tension dramatique parce qu'Homère, séparé du monde par sa cécité, a trouvé une sorte de paix

La critique actuelle considère que ce tableau est le plus réussi des paysages historiques de Corot

Grande luminosité et sobriété de l'organisation des éléments

L'influence de Poussin est évidente car Corot a repris l'Orphée d'Orphée et Eurydice par Poussin

La  toile fut alors reçue par la critique avec sévérité. Seul Baudelaire le défendit : "Tout est bien vu, bien observé, bien compris, bien imaginé.

M. Corot sait être coloriste avec une gamme de tons peu variés.

Les trois petits bergers avec leur chien sont ravissants comme ces bas-reliefs qu'on retrouve dans certains piédestaux des statues antiques"

Ville d'Avray - 1845


Les parents de Corot avaient acquis en 1847 la demeure d'un seigneur du 18ème siècle où le peintre installa à ses débuts son premier atelier et où il ne cessa de revenir durant sa longue existence de voyageur comme à un port d'attache indispensable

Corot exécuta de nombreuses versions quasi identiques de cette vue à plusieurs années d'intervalle

La maison de Corot et son jardin dominent un petit vallon au fond duquel est un étang

Sur l'autre rive un hameau regroupe plusieurs bâtisses appelées les Maisons Cabassud

Le chemin crée un axe vertical traversant des bandes horizontales

L'artiste aimait ces lieux simples où l'homme et la nature semblent avoir fait alliance


Le port de La Rochelle - 1851


Dans la seconde moitié de juillet 1851, l'année de la mort de sa mère, Corot séjourna trois semaines à La Rochelle

Ce tableau présente un rare degré de finition

Une douce tonalité blonde baigne le paysage

Tableau original par les variations blanc sur blanc

Tour de Saint Nicolas sur la gauche, tour de la Chaîne au centre, clocher de l'église Saint Nicolas et tour de la Lanterne sur la droite

Renoir admirait Corot " Je me suis souvent placé dans les endroits où il a peint. Jamais je ne l'ai approché ... Les tours de La Rochelle ? mais il donnait les couleurs de la pierre et moi je ne l'ai jamais pu ... Ce fut le plus grand paysagiste qui ait jamais vécu "


Nymphe couchée à la campagne - 1859


Mi-coquine, mi-pudique, cette déesse au regard enjôleur est une véritable coulée de lueur nacrée éclairant la monochromie verte de la prairie

Son corps joue le rôle de ces récepteurs de lumière qu'affectionnait le peintre

Réinterprétation moderne de "La Vénus endormie" de Giorgione faite d'un équilibre subtil entre rêve et réalité

Talent ce Corot pour transfigurer la vision commune par l'atmosphère de songe créée par les effets de la lumière venant du haut et de l'arrière

Corot a juxtaposé un travail de plein air (le paysage) et un travail d'atelier (la figure) en fusionnant les motifs dans une lumière qui assure l'unité de l'ensemble

Corot "La couleur n'est qu'un charme supplémentaire dont il faut user avec discrétion"

Belle transition chromatique entre le corps et l'herbe par le jaune du tissu sur lequel est allongée la jeune fille


La Toilette - 1859


La disposition d'un grand nu dans un paysage était une entreprise ambitieuse pour Corot exigeant une technique adaptée aussi bien à la  précision de la  peinture de figure qu'à l'approximation de la peinture de paysage

" Vous voyez quel mal je me donne pour dissimuler ces attaches des clavicules et du sternum, pour fondre le modelé des côtes que l'on soupçonne à la naissance des seins ... Puisqu'il ne s'agit pas ici d'une leçon d'anatomie je dois lier toutes les enveloppes des armatures qui construisent et soutiennent le corps afin de ne rendre que ce que j'éprouve devant ces tissus de chair ... tandis qu'ils renvoient la lumière du ciel "

Cette belle dénudée offre timidement au regard sa chair blanche et nacrée

Sa silhouette laiteuse réveille la monotonie des bruns et des verts grisâtres chère à sa palette

" Je cherche à rendre le frémissement de la nature ... et donner par cela même l'illusion de la vie; je veux qu'en regardant ma toile qui cependant ne bouge pas le spectateur ressente l'impression des choses "

On ressent le tremblement de la brise qui danse avec la lumière semée en myriades de petits points clairs au travers des branchages

La composition est chargée de sens car l'on peut reconnaître trois allégories :

- l'amour et la séduction (la belle dénudée)

- le travail et la vie paysanne (la villageoise qui coiffe)

- la sagesse et la connaissance (la femme lisant en retrait)


Le modèle est Emma Dobigny, l'un des modèles préférés de Corot

Souvenir de Mortefontaine - 1864


Ce tableau fut envoyé par Corot au Salon de 1864 et acheté par Napoleon III

Mortefontaine, petit village au nord est de Paris, près de Chantilly, est connu pour son parc et ses lacs embellis par Joseph Bonaparte qui en fit l'acquisition en 1798

Les vapeurs du matin caressent le lac

Au bord de l'eau trois fillettes s'amusent avec les branches d'un frêne élégant

Corot affectionnait le motif des branches qui se tordent et font écho à l'action de la figure principale

L'utilisation d'un écran d'arbre au premier plan pourrait refléter l'intérêt pour les estampes japonaises répandu au cours des années 1860

L'ambiance brumeuse reflète aussi le goût bien connu de Corot pour la photographie

Cette vision voilée est très impressionniste


Jeune fille à la toilette - 1860/1865


Exceptionnellement le peintre montre avec ce tableau une figure en mouvement

Pour une fois il n'a pas figé son modèle dans une mélancolique éternité

Un regard espiègle et l'ombre d'un sourire animent d'une vie inhabituelle le visage de cette jeune fille

Les variations de la lumière créent la figure en lui conférant une fragilité toute de pudeur et de réserve

Les femmes à la toilette de Degas semblent ici en gestation


L'étang à l'arbre penché, Ville d'Avray - 1865


La silhouette étrange d'un arbre solitaire, traversant de part en part la composition d'un paysage, constitue presque une signature de Corot

Chez Corot cet arbre penché sur l'étang (parfois dans un sous-bois) toujours au premier plan du tableau produit un déséquilibre général de la composition et anime le paysage par ailleurs très classique dans sa forme

L'utilisation du premier constitue une des innovations principales de l'art de paysagiste de Corot

Le devant de la toile est conçu comme une véritable introduction visuelle au tableau


Bacchante couchée au bord de la mer - 1865


L'artiste s'est inspiré de son tableau "Le repos" tout en ajoutant le feuillage cotonneux et la mer limpide, "fluide et caressante comme une soie" qui signaient ses oeuvres les plus caractéristiques

La posture suppose un support pour la tête et les épaules du modèle mais le paysage ne s'y prête pas ce qui explique que la pose est un peu recherchée


Allée du bois de Wagnonville - 1865


Cette oeuvre fut peint d'après nature avant d'être retouchée plus tard dans l'atelier

Corot y reprend le thème de la charrette cheminant à travers une forêt, thème abordé à diverses époques de sa carrière


L'église de Marissel - 1867


Fruit de dix séances de travail en plein air ce tableau connut un tel succès au Salon de 1867 que la reine Victoria voulut l'acquérir

Marissel est un petit village proche de Beauvais

Au petit matin les silhouettes élancées des arbres semble frissonner au-dessus reflet lumineux du plan d'eau


Plaine des environs de Beauvais - 1860/1870


Si Corot partait souvent en villégiature c'était pour avoir l'occasion de peindre en extérieur. Il logeait presque toujours chez des amis mais ne s'accordait le plaisir d'être en compagnie et de fumer une bonne pipe qu'après avoir passé une partie de la journée sur le motif

Il s'intéressait à des paysages divers allant des forêts touffues à l'espace ouvert des champs

Il choisissait pour peindre un endroit situé à la limite de la ville et regardait vers le centre. Il indiquait toujours la localité par un élément architectural identifiable. Les flèches que l'on aperçoit au loin sont celles de Saint Etienne de Beauvais

La scène d'hiver désolée n'offre rien de gai malgré la lueur d'espoir apportée par l'éclaircie du ciel

Les branches de l'arbre de droite répondent à l'assymétrie des tours

Quelques touches légères figurent la bruyère et les ronces


Un chemin sous les arbres, Environs de Beauvais - 1860/1870


Ce tableau constitue un exemple de la synthèse réussie par Corot entre les règles de la composition et de la perspective de la tradition classique et ses propres expériences du rythme et de la poésie pour représenter la nature de façon réaliste et lyrique

Ruisseau, Environs de Beauvais - 1860/1870


Ce tableau reprend les mêmes orientations esthétiques que le tableau "Un chemin sous les arbres" en y ajoutant les possibilités offertes par la présence d'un  ruisseau, propice aux mouvements et aux effets de reflets.


Cour d'une boulangerie près de Paris - 1865/1870


Les longs paniers étroits pour les baguettes de pain et les piles de petit bois soigneusement préparées pour les fours indiquent la destination de cette construction

Vision d'un bonheur rural intemporel plongeant dans la France profonde, ce tableau offre une échappée possible au mal-être de la vie urbaine

De telles scènes étaient une spécialité des peintres de Barbizon et c'est par cette veine rurale que Corot se rapproche le plus de l'art de ses contemporains, notamment de son ami Jean-François Millet

Les futurs impressionnistes s'accommodaient mal des visions arcadiennes de Corot mais appréciaient ses tableaux naturalistes

Le coup de vent - 1865/1870


Ce paysage balayé par le vent fut réalisé lors du séjour que Corot fit à Cayeux, sur la côte picarde à l'ouest d'Abbeville, séjour marqué par le mauvais temps

"Le vent souffle; de grands frissons courent sur les champs et les plaines. Les arbres tordent leurs branches en secouant leurs feuilles. Une paysanne a de la peine à se maintenir dans le tourbillon"

Dans les tempêtes peintes par Corot l'homme n'est qu'une poussière en lutte contre des forces énormes et écrasantes

Le motif romantique de l'arbre penché revient souvent dans l'oeuvre de Corot

Corot a su évoquer la brutale transformation du paysage sous l'effet de la rafale


Liseuse sur rive boisée - 1865/1870


Progressivement Corot conférait aux étendues d'eau, dormantes ou en mouvement, une dimension accrue dans l'animation de ses paysages

L'eau et ses effets, concurrençant les arbres et le ciel, s'imposent comme un acteur dominant de la mise en scène de la nature

De superbes dégradés de blancs et de verts rythment la surface de l'étang


Le pont de Mantes - 1868/1870


A travers le lumineux voile gris qui nimbe la composition, les arbres du premier plan brisent l'unité visuelle du pont

La barque immobile est un des thèmes de la poésie romantique

La présence de l'accent vermillon est justifiée par Corot " Il y a toujours dans un tableau un point lumineux; mais il doit être unique. Vous pouvez le placer où vous voudrez  : dans un nuage, dans la réflexion de l'eau ou dans un bonnet; mais il ne doit y avoir qu'un seul ton de cette valeur"


Mantes, la rive de la Seine - 1868/1870


Le noble et majestueux édifice de la cathédrale en arrière-plan et placé par Corot en retrait discret

Le principal acteur de l'oeuvre est la lumière qui fait vibrer tous les motifs naturels

Beffroi de Douai - mai 1871


Corot demeura à Paris jusqu'au 1er avril 1871, date à laquelle il céda aux conseils de son ami Robaut et partit en sa compagnie pour fuir la Commune

A Douai il séjourna chez son ami Robaut

Corot a consacré à ce tableau vingt séances, l'après-midi de 14h à 16h

Le beffroi construit au 14ème et au 15ème siècles est le grand symbole de la commune de Douai

"Le bonhomme en blouse qui cause avec une femme, c'est lui... De la fenêtre le regard enfilait la rue de la mairie"

Ce tableau peut être rapproché des scènes de rue de Monet et Sisley même si Corot n'a pu voir ces tableaux

Corot peignit ce tableau en multipliant les petites touches en surimpression


Sin Le Noble - 1873


Corot séjournait chez Robaut à Douai en juillet 1873 lorsqu'il peignit ce tableau dans le village voisin de Sin Le Noble

Trois ou quatre chaumières à toit rouge au bord d'une route gazonnée

Une maigre rangée d'arbres

Quelques nuages mariant leur floconnement léger à l'azur de la voûte

Ce paysage banal est un poème de lumière et d'air

Tous les matins pendant cinq jours le peintre de 77 ans comme un honnête ouvrier reprenait sa tache

Le tableau fut achevé sur place

Sur le chevalet à Paris il meuble la partie gauche en ajoutant la branche cassée qui lui était familière

Ce tableau rattache Corot à l'école hollandaise du paysage.

Le modeste village est représenté avec une franchise dont Corot n'est pas coutumier car ses pastorales témoignent presque toujours d'une vision bien ordonnée du pittoresque

Les toits abîmés, le ruisseau inerte et l'arbre mort évoquent le naturalisme de la tradition hollandaise

La pêche en barque auprès des saules - 1870/1873


Ce tableau témoigne du talent poétique de Corot

Il magnifie la lumière en rapprochant le bleu du ciel et le chaud orangé du soleil couchant

Les branches des arbres sont fluides et se mêlent aux nuages

Mais la composition est solide et équilibrée par les troncs à droite et à gauche

La barque trace une ligne parallèle à la rive lointaine du lac

Les herbes de l'étang tamisent sur la surface de l'eau les reflets apaisés du soleil couchant

Nous retrouverons la couleur de ce soleil couchant dans le tableau "Impression, Soleil levant" de Monet qui fera éclater l'impressionnisme

Mais ce tableau de Corot est aussi une impression qui résume l'oeuvre d'une vie


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